La France, l'une des principales locomotives de la zone euro aux côtés de l'Allemagne, n'est désormais plus à l'abri de la crise financière qui secoue les économies de l'Union européenne depuis quelques mois, et dont la contagion et les premiers signes de récession sur l'économie réelle semblent de plus en plus difficiles à escamoter. Pour l'Hexagone, pressé qu'il est par Bruxelles et les agences de notation internationales de redresser l'état de ses finances, l'heure n'est plus au sauvetage de l'économie grecque, mais bien au resserrement de ses propres déficits sous peine de se voir déchu de son triple A et de devoir emprunter à des taux majorés pour entretenir sa propre dette. La récente erreur, bien que très vite rectifiée, de l'agence Standard and Poor's (S&P), qui a annoncé par méprise la perte par la France des privilèges de son triple A, privilèges qui lui permettent d'emprunter à de meilleures termes sur le marché, aura tout de même laisser des traces, en semant le doute sur la solvabilité de la deuxième économie de la zone euro. La bourde avérée de S&P, agence à laquelle les marchés prêtent une oreille toujours attentive, a malencontreusement coïncidé, avant-hier, avec un nouveau record historique, au-delà des 170 points de base, de l'écart entre le taux des obligations à 10 ans de l'Allemagne et de la France. Difficile donc de tranquilliser les marchés même après le mea-culpa de S&P. A fortiori quand on sait que l'autre plus importante agence internationale de notation, en l'occurrence Moody's, avait déjà suggéré, à la mi-octobre écoulé, la possibilité de reconsidérer la note de la France. Dans un tel contexte, alimenté par les prévisions pessimistes de Bruxelles qui annonce une croissance économique en France d'à peine 0,6% en 2012, les appréhensions des marchés deviennent de plus en plus vives quant à la capacité de l'Hexagone à contenir son endettement public. Aussi, malgré les propos rassurants des ministres des Finances et du Budget, François Baroin et Valérie Pécresse, qui ont réitéré l'engagement de leur gouvernement à ramener le déficit public français à 3% du PIB en 2013, puis à l'équilibrer en 2016, les marchés continuent à faire montre de beaucoup de prudence. Le risque majeur, pour la France, en perdant la confiance des marchés financiers, est de voir s'aggraver ses taux d'emprunt comme c'est le cas actuellement pour l'Italie. Des voix s'élèvent d'ailleurs dans le ciel de l'Hexagone pour avertir que les marchés financiers ne traitent déjà plus la France comme un pays bénéficiant du précieux triple A. Ils en veulent pour preuve le fait que les taux d'emprunt adjugés au gouvernement français ont déjà enregistré un bond, passant de 3 à 3,37%, au moment où les investisseurs affichent clairement leur préférence pour les bons du Trésor allemands. L'Italie, elle, après avoir rejoint officiellement la Grèce au ban des pays les plus atteints par la crise de l'endettement, a vu ses taux d'emprunts frôler les 7%, alors que l'annonce de la démission de Berlusconi ne semble guère suffire encore à «remotiver» les marchés. Ainsi, malgré quelques mesures de sauvetage administrées à coup de sacrifices politiques, la zone euro reste clairement menacée d'une nouvelle phase de récession. Avec le pessimisme qui gagne la santé économique de la France et, à un degré moindre, celle de l'Allemagne, le devenir de la zone euro continue à susciter autant d'inquiétudes pour les Européens que pour le reste du monde.