Le régime syrien, aux abois, a déversé hier sa colère contre les chancelleries étrangères et lancé un appel à un sommet «urgent»… Comme il fallait s'y attendre, la décision de la Ligue arabe de suspendre la Syrie de ses travaux a été saluée comme il se doit par l'opposition pour qui elle constitue «un pas vers la démocratie». Les partisans du président Al Assad ont en revanche poussé leur délire jusqu'à s'en prendre aux sièges des chancelleries arabes et occidentales à Damas. Fous furieux, des milliers de manifestants favorables au régime n'ont pas hésité à amener une série d'attaques contre plusieurs ambassades, dont celles de l'Arabie Saoudite, du Qatar et de la Turquie, à Damas, ainsi que des missions diplomatiques françaises à Lattaquié (nord-ouest) et Alep (nord). Des attaques, qui ont soulevé la colère et les protestations de ces quatre pays, qui ont tôt fait de réagir. Ainsi, la Turquie a décidé d'évacuer les familles de ses diplomates et ses personnels non essentiels et a convoqué le chargé d'affaires de Damas. Mieux encore, Ankara a appelé hier la communauté internationale à parler d'une «même voix» contre le régime syrien. L'Arabie Saoudite a, elle aussi, dénoncé la «mise à sac» de son ambassade à Damas et déploré la passivité des services de sécurité syriens. La France a, elle aussi, convoqué l'ambassadrice du régime syrien au Quai d'Orsay pour protester contre l'attaque de sa mission à Lattaquié. Parallèlement à ces «descentes punitives» qu'il a sans doute ordonnées et supervisées, le régime d'Al Assad a lancé hier un appel à la tenue d'un sommet arabe «urgent pour remédier à la crise». Quatre personnes tuées Dans un communiqué officiel, Damas invite les pays arabes à envoyer des ministres pour «s'enquérir de la situation sur le terrain» et superviser «l'application du plan» de sortie de crise proposé par la Ligue arabe. Un appel qui n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd puisque le ministère algérien des Affaires étrangères a annoncé, en début de soirée, qu'une réunion extraordinaire des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe se tiendra le 16 novembre à Rabat. «Nous avons décidé d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe le 16 novembre à Rabat, sur la Syrie, en marge du Forum Turquie-pays arabes», qui se tient également dans la capitale marocaine, a précisé ce ministère. Ce nouveau plan de sauvetage du régime syrien intervient quelques heures après la déclaration du secrétaire général de la Ligue, Nabil Al Arabi, en visite à Tripoli, que son organisation étudiait désormais «la mise en place d'un mécanisme pour protéger les civils en Syrie». Il n'avait pas tout à fait tort puisque les bras armés de Bachar Al Assad n'ont pas chômé hier, car au moins quatre civils ont été tués, dont trois à Homs (centre), haut lieu de la contestation, et un autre dans la région d'Idleb (nord ouest), selon l'OSDH. De l'autre côté, le Conseil national syrien (CNS) s'est dit «prêt à négocier la transition de la Syrie dans le cadre de la Ligue arabe, d'une manière à ce que Bachar Al Assad remette le pouvoir à un gouvernement démocratique représentatif du peuple syrien, qui ne comprendra aucun élément du régime dont les mains sont tachées de sang». Mais il n'est pas sûr que le tyran de Damas accepte de laisser son fauteuil bien qu'il soit désormais sur des charbons ardents. La décision de la Ligue arabe de le sanctionner ne lui donne pourtant plus de choix. Ce sommet extraordinaire de Rabat s'annonce crucial pour le régime. Le ministre algérien des Affaires étrangères a insisté hier avec son homologue égyptien, en visite en Algérie, sur la «nécessaire activation sur le terrain de l'initiative arabe pour le règlement de la crise syrienne afin d'éviter définitivement toute intervention étrangère en Syrie». En un mot, les Arabes sont mis en demeure pour ne pas rééditer le scénario libyen en Syrie. Un dilemme cornélien face à un chef d'Etat sanguinaire qui ne recule devant rien d'un côté et une menace sérieuse d'un débarquement atlantiste.