Alors que la Ligue arabe était toujours affairée, hier, à étudier les «nouvelles conditions» posées par la Syrie comme préalable à la signature du protocole relatif à l'envoi d'observateurs sur son territoire, les affrontements entre militaires et manifestants se sont poursuivis avec une rare intensité dans plusieurs villes. Conséquences : les violences ont fait plus de 100 morts en trois jours. Dans sa réponse à l'ultimatum de la Ligue arabe, Damas a demandé l'annulation pure et simple des sanctions prises le 27 novembre par l'organisation panarabe, en échange de la signature de l'accord. «Le gouvernement syrien considère toutes les décisions prises par la Ligue arabe (...) y compris celle de la suspension de la Syrie ainsi que les sanctions prises (contre la Syrie) par le comité ministériel, comme nulles et non avenues, dès la signature du protocole» par Damas, écrit le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, dans une lettre adressée à la Ligue arabe. En attendant que l'organisation tranche sur le dossier, l'armée syrienne a poursuivi les exercices militaires entamés dimanche soir avec des tirs de missiles et de roquettes. Pour de nombreux observateurs, «ces manœuvres sont une démonstration de force destinée à intimider». Le régime entendrait ainsi mettre en garde contre toute velléité d'intervenir militairement en Syrie en montrant qu'il est prêt à déclarer une guerre régionale. Massacre et chantage De leur côté, les Occidentaux ne paraissent pas très chauds concernant l'idée d'un règlement par la force de la crise syrienne. Cela surtout que la Russie et la Chine s'y sont opposées fermement. M. Ricketts, un haut conseiller en matière de sécurité du Premier Ministre britannique David Cameron, a déclaré à ce propos, hier, devant un comité ministériel, qu'il était très peu probable que le Royaume-Uni intervienne militairement dans ce pays. Pour M. Ricketts, la situation en Syrie est très différente de celle qui prévalait en Libye avant l'intervention militaire étrangère sous mandat de l'ONU, en mars. En Libye, «une large frange de la population nous a instamment appelés» à intervenir, ce qui n'a pas été le cas en Syrie, a-t-il indiqué. En outre, dans le cas de Libye, il y avait «une invitation directe de la Ligue arabe et une autorisation explicite figurant au chapitre VII de la Charte des Nations Unies», a ajouté ce responsable, qui doit être bientôt être désigné ambassadeur d'Angleterre à Paris. Mais si l'option militaire semble pour le moment écartée, les capitales occidentales ne s'interdisent toutefois pas de nouer des contacts avec l'opposition à Bachar Al Assad. Tout le monde est, en effet, convaincu que le régime syrien finira bientôt par tomber. Et forcément, dans de nombreuses capitales, on se prépare déjà à l'après-Assad. La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a ainsi rencontré, hier en Suisse, 7 représentants de l'opposition syrienne. La partie américaine n'a donné aucune précision sur les noms de ces opposants ou l'ordre du jour des entretiens. Washington discute avec les opposants Une première rencontre avait, rappelle-t-on, déjà eu lieu entre Mme Clinton et des dissidents syriens, le 2 août à Washington. Par ailleurs, l'on apprend que l'ambassadeur américain Robert Ford est retourné hier soir à Damas, qu'il avait quitté fin octobre en raison de «menaces crédibles pour sa sécurité». Plusieurs pays arabes et européens ont depuis rappelé leurs ambassadeurs pour consultation. Sur le terrain, la situation devient chaque jour plus chaotique. Déjà éprouvée par neuf mois de contestation, la société syrienne découvre les horreurs de la guerre civile. Une quarantaine de corps ont été retrouvés dans la nuit de lundi à mardi dans la ville de Homs. Cette découverte intervient au lendemain d'affrontements entre forces gouvernementales et hommes armés. «Ces affrontements ont éclaté lundi entre l'armée syrienne et des hommes armés qui ont lancé des attaques sur des points de contrôle dressés par l'armée syrienne», a rapporté le journal privé Al Watan. Selon la même source, il s'agirait de personnes récemment kidnappées par des groups armés non identifiés. Lundi, cinq personnes ont été tuées dans de nouvelles violences dans la ville de Homs (centre), selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). La Syrie est en proie, depuis mars dernier, à un mouvement de contestation sans précédent réclamant le départ du président Bachar Al Assad. Les violences dans ce pays ont déjà fait, selon l'ONU, plus de 4000 morts depuis le mois de mars dernier.