Dès le début du XXe siècle, des médecins d'hygiène scolaire, des psychiatres, des psychologues et des pédagogues novateurs ont dénoncé les dérives du système de notation-contrôle à des fins de sélection. Ce n'est que vers la fin des années 1960 que les autorités scolaires des pays (francophones notamment) où cette tradition est fortement implantée les ont écoutés. Le contrôle des connaissances « mémorisées » à partir de programmes surchargés et via des méthodes didactiques aura donc vécu dans ces pays. L'évaluation formative commence à être systématisée pour aider l'élève et le soutenir dans sa progression vers la réussite. Elle s'appuie sur une bonne connaissance des élèves par le maître. Ce dernier ne se contente plus de juger à partir des copies notées : il s'adonne à une observation psychopédagogique de ses élèves. C'est une évaluation qualitative qui permet de cerner au plus près le véritable profil de l'élève. Cette nouvelle approche de l'évaluation a chamboulé le dispositif pédagogique classique. L'élève n'est plus cet entonnoir dans lequel le maître déverse le savoir qu'il doit ensuite restituer fidèlement - par cœur - lors des épreuves de contrôle. La note perd de sa fonction de coercition et donc de contrainte à l'origine des dérives dénoncées par les spécialistes : pression, stress, angoisse et panique. Puisqu'elle n'est plus comptabilisée à des fins de compétition et de classement, version moyenâgeuse, l'élève l'interprète comme étant une boussole qui le guide dans ses efforts. Qu'elle soit bonne ou insuffisante, la note relance toujours sa motivation pour aller de l'avant ou rectifier ses erreurs. Un peu partout dans le monde ont fleuri des expériences inspirées de cette évaluation où la note est dédramatisée, expurgée de ses menaces de sanction (redoublement, exclusion ou échec à l'examen). L'une des plus remarquables a été menée en Georgie dans l'ex-URSS. Espace rédactionnel oblige, nous nous limiterons aux résultats de cette expérience. Ses concepteurs sont partis d'un constat simple, celui étayé par les travaux menés dans des Laboratoires de psychologie et de pédagogie : l'enfant, l'élève du primaire, est doté de deux caractéristiques naturelles inscrites dans son capital génétique, à savoir la curiosité et le besoin vital d'activités cognitives. Selon ces spécialistes, la bonne pédagogie doit s'appuyer sur ces deux caractéristiques pour mener l'élève à apprendre et non lui imposer des stimulants externes tels que la note, les sanctions et les récompenses. Dans les conclusions de leurs travaux, ces laboratoires ont mis en relief les effets néfastes du système traditionnel de notation. Les chercheurs considèrent ce système archaïque comme étant « la cause de l'apparition d'un ensemble de besoins multiformes en relation avec la situation de l'enfant au sein de son milieu social. 46% des élèves de 3e année primaire cherchent la bonne note - par tous les moyens, y compris déloyaux - parce que leurs parents sont sévères avec eux. Seuls 4% sont motivés d'eux-mêmes pour les études ».