Que des gens de culture se réunissent autour de la situation culturelle du pays, voilà une chose à laquelle on ne peut qu'applaudir, bien qu'elle puisse sembler, ailleurs, une lapalissade. C'est la première réaction qui peut venir à la lecture du compte-rendu, sur le site alger-culture, d'une réunion, samedi 17 décembre, au siège de l'association El Djahidia à Alger, «d'artistes, d'universitaires, d'écrivains, et d'intellectuels de tous bords», «venus d'Alger, de Tizi-Ouzou ou encore de Mostaganem» pour «la première rencontre sur la politique culturelle en Algérie» (voir site). Puisqu'il s'agit de la première, on attendra les autres pour se faire une idée plus précise de cette initiative. Cependant, d'ores et déjà, plusieurs aspects interpellent. Le texte affirme que ces participants «se sont donné rendez-vous». Il n'y a donc pas eu d'appel préalable. On peut comprendre qu'il s'agit d'amorcer une démarche plus large. Mais quand on voit la photographie publiée — une dizaine de personnes ? — et que l'on constate que les avis de seulement quatre estimables participants sont cités, on ne peut que s'interroger sur sa validité, même en tant qu'amorce, et ne serait-ce que du point de vue des différentes disciplines du monde de la culture. Le texte laisse en outre penser que tout est déjà préparé. En effet, d'un côté, il est question de 17 recommandations déjà élaborées et, d'un autre, d'un cycle de rencontres durant le trimestre prochain destiné à élaborer une «feuille de route». Outre que cette expression, dont la fortune médiatique est connotée par un contexte précis et sied peu à des intellectuels, le texte ajoute que cette plate-forme (n'est-ce pas mieux ?) sera diffusée «à grande échelle, notamment auprès des institutions internationales». Plus loin, on lit qu'une «copie sera envoyée aux autorités concernées du pays, libre à elles de le prendre en compte ou pas». Elles vont se gêner, tiens ! Mais n'est-ce pas l'original qu'il faudrait adresser à ces autorités ? En quoi les institutions internationales, et lesquelles d'ailleurs, seraient-elles habilitées en priorité à se prononcer sur la politique culturelle de l'Algérie ? Pourquoi bénéficient-elles de cet absurde «notamment» qui devrait revenir aux professionnels algériens des arts et de la culture ? Le vrai problème réside dans l'absence de communication entre ceux-ci. Les corporations de la culture dans notre pays ne sont pas mêmes mobilisées autour de leurs propres situations et devenirs. Celles qui disposent d'associations n'en usent que peu ou pas pour s'affirmer en tant que telles et exprimer leurs revendications ou propositions. Lancer un débat sur la politique culturelle serait plus qu'intéressant, mais en parlant d'abord, et avec le plus grand nombre, des situations culturelles concrètes. Sinon, cette «feuille de route», même pavée des meilleures intentions, risque fort de devenir une route de feuilles semées aux quatre vents.