C'est à ce genre de questions que devront désormais répondre les immigrants établis au Canada lorsqu'ils franchiront la frontière des Etats-Unis, révèle le quotidien The Gazette de Montréal, dans un article daté du 27 août 2004. Les immigrants, quel que soit leur pays d'origine, devront en effet remplir un formulaire et répondre oui ou non à la question « Avez-vous été ou êtes-vous impliqué dans des activités d'espionnage, de sabotage, de terrorisme, ou de génocide ; et entre 1933 et 1945 étiez-vous impliqué, de quelle que manière que ce soit, dans les persécutions associées à l'Allemagne nazie ou à ses alliés ? » Apparemment, ces questions peuvent sembler stupides car on n'imagine pas un terroriste d'El Qaîda assez naïf pour répondre oui. En fait, c'est la réponse (ou son absence) qui est importante car elle sera utilisée comme preuve à conviction devant un tribunal et une fausse déclaration servira à accélérer les procédures judiciaires ou de déportation. Cette mesure, qui s'appliquera dès le 30 septembre, imposera en outre la prise d'empreintes digitales. Mais ce n'est pas tout. L'entrée aux Etats-Unis va se durcir encore vers la fin de l'année quand, en plus des empreintes, on prendra la photo de tout étranger concerné par le programme US visit (indicateur technologique du statut d'immigrant et de visiteur aux Etats-Unis), c'est-à-dire tout le monde, sauf les Canadiens (à part certains d'origine arabe ou de religion musulmane) et certains Mexicains. Toutefois, il est possible que ces mesures soient étendues par la suite aux citoyens canadiens (qui pour l'instant entrent chez leur voisin du Sud sur simple présentation d'une pièce d'identité) ainsi qu'aux résidents et même aux citoyens américains eux-mêmes. Les citoyens américains et canadiens d'origine arabe (surtout les premiers) se sentent de plus en plus ostracisés et traités comme des citoyens de seconde zone. Il y a quelques mois, après l'imposition de mesures d'identification photographique et anthropomorphique semblables à leur égard, le ministère des Affaires extérieures canadien leur avaient recommandé d'éviter d'aller aux Etats-Unis, puis avait retiré ce conseil sous la pression américaine. Depuis, certains Canadiens arabes sont même allés, par souci naïf d'anonymat, jusqu'à demander qu'on retire le lieu de naissance de leur passeport canadien. Ce qui, évidemment, attire encore plus l'attention sur eux quand ils voyagent dans des pays où ils ne sont pas particulièrement les bienvenus ou dont la notion de droit est fluctuante. L'attrait qu'exercent les Etats-Unis sur les touristes canadiens a beaucoup diminué ces dernières années. D'abord pour des raisons très matérielles. La force du dollar américain face au dollar canadien a découragé beaucoup de touristes, surtout ceux du dimanche qui allaient faire le plein d'essence, d'alcool, de tabac et de marchandises diverses à Burlington, Plattsburgh et dans toutes les villes frontalières américaines. Les attentats du 11 septembre ont été très fortement ressentis au canada et ont profondément choqué les Canadiens qui, s'ils sont solidaires du peuple américain, évitent de plus en plus de mettre le pied sur leur territoire de peur du terrorisme et de plus en plus de peur des tracasseries policières ou administratives. Dans la « Belle province » en particulier, on se souvient des Québécois qui ont eu maille à partir avec les agents américains. On se souvient aussi des mésaventures de ce jeune Français qui a fait de la prison et a dû payer une forte amende, simplement parce que, sous le coup de l'exaspération, il avait répondu à une hôtesse de l'air hargneuse qui le harcelait jusque dans les toilettes de l'avion : « My shit is not a bomb ! » (Ma merde n'est pas une bombe !).