Une caravane humanitaire s'ébranle vers Ghaza    Selma Malika Haddadi élue vice-présidente de la Commission de l'Union africaine    Le MCA battu au stade du 5-Juillet par le CRB 0-1    Décès du Moudjahid et ami de la Révolution Félix Louis Giro Colozzi : le président de la République présente ses condoléances    Journées portes ouvertes sur les délégations du Médiateur de la République à l'Ouest du pays    Football: l'Associaion la "Radieuse" rend hommage à titre posthume à Mahieddine Khalef    Judo / Open Africain de Tunis (2e journée) : huit nouvelles médailles pour l'Algérie, dont une en or    Une rencontre en hommage à Ahmed Taleb Ibrahimi à Tunis le 22 février    Cyclisme/Tour d'Algérie 2025 (8e étape) : victoire de l'Algérien Assal Mohamed-Nadjib (MC Alger)    Audition parlementaire de l'ONU: la délégation parlementaire algérienne rencontre le SG de l'UIP    AOMA: conversion prochaine des revues de l'Association en versions électroniques    Des vents forts sur plusieurs wilayas du sud lundi    Ouverture du capital de la BDL: souscription de 85 % des actions proposées en bourse jusqu'à présent    La commercialisation du lait de vache subventionné a permis de baisser la facture d'importation de la poudre de lait de plus de 17 millions de dollars    L'Armée sahraouie cible des bases des forces de l'occupant marocain dans le secteur de Farsia    Attaf reçoit un appel téléphonique du Premier ministre libanais    Baisse des incendies de forêts de 91% en 2024    Protection civile: poursuite des campagnes de sensibilisation aux différents risques    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'alourdit à 48.271 martyrs et 111.693 blessés    Chaib prend part à une rencontre consultative avec l'Association des médecins algériens en Allemagne    Des auteurs algériens et européens animent à Alger les 15e Rencontres Euro-Algériennes des écrivains    Justice pour les Africains !    Les dossiers non résolus de l'occupation coloniale    La délégation parlementaire algérienne rencontre la présidente de l'UIP    Le ministre de la Santé reçoit une délégation du SNPEP    Le Salon du e-commerce « ECSEL EXPO » du 22 au 24 février    Au service de l'Afrique…    Victoire de l'Erythréen Maekele Milkiyas    Maîtriser la clef de voute du nouvel ordre mondial, les nouvelles technologies de l'information    un cri du cœur pour les Jardins Broty    Croissant-Rouge algérien Lancement à partir de Blida de la campagne de «Solidarité Ramadhan»    Le roi Charles III reçoit les leaders musulmans et juifs après les «Accords de réconciliation»    Troisième édition du Salon « West Export » : promouvoir le produit local    Adoption des bilans de l'exercice 2024    L'industrie du livre en Algérie connaît une dynamique grâce au soutien de la tutelle    Ouverture à Batna de la 9e édition        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Une ronde vaudevillesque
Slimane Aït Sidhoum, dans l'auteur sommeille un détective
Publié dans El Watan le 02 - 02 - 2006

il faut toujours se méfier des livres. En tant qu'objet, bien entendu. Un livre exagérément épais et nous voilà rebuté ou effrayé, trop mince, il nous laisse indifférent ou circonspect. Si par malheur, notre œil n'est pas attiré par une couverture se démarquant du lot ou que le libraire du quartier a oublié de nous le recommander, alors c'est une forme d'arrêt de mort pour le livre en question. Et les livres, les romans, hélas, meurent plusieurs fois dans leur vie.
Le roman de Slimane Aït Sidhoum, La faille, paru cet automne aux éditions Chihab, aurait pu faire partie de cette catégorie. Un lecteur distrait serait facilement passé à côté de la couverture discrète, il aurait dédaigné la quatrième de couverture sobre et informée. Mais il aurait eu tort. Comme souvent on ne découvre un livre qu'après l'avoir quelque peu négligé, ou presque oublié. Il traîne des semaines sur une table de chevet, on ajourne le moment de le lire, pressé par de prétendues urgences, puis un soir, parce qu'au fond de soi une pensée coupable s'éternise, on se jette à l'eau. Il y a en Slimane Aït Sidhoum un détective qui sommeille ou qui feint de le faire. Son roman, sorte de ronde vaudevillesque, est construit sur le mode de l'enquête qui prétend reconstruire un puzzle, où des personnages, plus loufoques les uns que les autres et surtout, terriblement épris de leur quant à soi, s'amusent à nous perdre dans le dédale d'un bout de leur vie misérable. Tout se passe dans le temps qui précède le tremblement de terre du 21 mai 2003 à Boumerdès. D'abord, le narrateur principal, dont on ne saura pas le nom. Médiocre journaliste, il entretient d'innombrables correspondances, il lit Kundera et n'admet pas la lente et fatale décrépitude dans laquelle sombre Alger. Il est perdu dans le souvenir des paysages nostalgiques et sereins de Sidi Mlih. « J'avais perdu mes repères, ils s'étaient engloutis dans la faille de Zemmouri. La faille qui avait emporté toutes ces vies », écrit-il dans un sursaut de vérité. C'est donc lui qui raconte au premier degré l'histoire terrible et terriblement grotesque qui lui est arrivé. Au cours des dernières années, voilà qu'il a été amoureux de Rania Chouka, universitaire de près de 50 ans, séduisante comme « une actrice américaine », qu'il a croisée lors d'un cocktail organisé par les Editions du Figuier. Mais voilà : Rania Chouka est une femme de la haute société, c'est l'épouse de l'influent colonel Kamel Chouka, patron du Secours national algérien, établi au lieu-dit Kermous, et elle préside la puissante association Alphabétika, qui vient en aide aux sinistrés. Bref, ce n'est pas une femme pour lui, médiocre « journaliste sans bac » comme elle le prénomme. Mais il s'obstine, et par le hasard curieux des choses de la vie, il la recroise plusieurs fois avant le moment d'extase absolu pour lui : ensemble ils prennent l'avion pour Paris. Là, ils se voient dans des moments lumineux et vivent les prémisses d'une piètre amourette. Ils se séparent sur ce qui restera une humiliation pour lui, avant de se revoir au moment même du tremblement de terre. Voilà donc le cadre du roman. Mais Aït Sidhoum a quelque chose du laborantin cruel et facétieux. On met un certain temps à saisir la structure du livre. En fait, chaque personnage de ce puzzle va successivement raconter des bribes de cette histoire, pour que nous puissions au bout du compte établir un tableau d'ensemble et boucler la boucle sur un coup de théâtre bien amené. Aït Sidhoum possède une arme redoutable : l'humour. Il refuse de s'abandonner à une dramaturgie factice et à la facilité du misérabilisme : tremblement de terre, désastre,... Il se moque de tous, croquant au vitriol la bêtise, guettant les obsessions idiotes. Il galope sur les terres de cette histoire rocambolesque, négligeant parfois quelques accords de temps ou cédant à quelque approximation, mais on jubile de l'amusement certain qu'il a dû éprouver au moment d'affubler ses personnages et ses lieux de noms plus ou moins loufoques : le colonel Kamel Chouka, affreux petit potentat lubrique, Rania, la prétendue femme du monde, qui accapare sans vergogne les livres offerts par les universités étrangères, détourne les fonds destinés à son association, éprouve le besoin maladif de plaire, il y a la ville de Kermous et Sidi Mlih... Et ses personnages, sortes de pantins désarticulés, sont tous misérables, ordinaires, aucun ne sauvant l'autre. Ils dessinent en creux le portrait d'un pays déglingué, rongé par la vermine, ils rendent compte de vies étriquées, dérisoires où la malhonnêteté se le dispute à la corruption, où la petitesse des sentiments voisine avec la puérilité des actes... Pour peu que l'on ait arrangé consciencieusement les pièces du puzzle, on ressort de ce roman un peu hagard mais joyeux, en se disant que oui, décidément, oui on a bien tort de laisser s'endormir les livres sur les tables de chevet !
Slimane Aït Sidhoum La faille, éd. Chihab, sept. 2005.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.