Le pouvoir d'achat des ménages, déjà rudement éprouvé par la faiblesse des revenus salariaux, sera d'autant plus rogné que le dinar continue de subir un glissement de manière sournoise mais prolongée. Elle est aisément visible, cette espèce de dévaluation qui ne dit pas son nom, que subit depuis de longues semaines la monnaie nationale par rapport à l'euro. L'attitude fort confortable de la Banque d'Algérie qui, selon toute vraisemblance, donne l'air de n'être pas gênée, contraste pourtant avec celle du Forum des chefs d'entreprises (FCE) dont le moins qu'on puisse dire est qu'il vient de perdre patience face à ce qu'il considère être ni plus ni moins qu'une dévaluation, carrément, du dinar face aux devises étrangères, notamment l'euro. Il y a tout lieu de dire, en effet, que la perte du pouvoir d'achat de notre monnaie induit automatiquement la hausse de la facture d'importation et pire encore, puisque le pouvoir d'achat des Algériens sera directement laminé. Celui des entreprises aussi. Il va sans dire que le renchérissement des autres monnaies par rapport à la monnaie nationale va accentuer davantage une inflation qui ne rime qu'avec la hausse depuis de longs mois. Même si le taux d'inflation affiché par l'ONS (4,5% en 2011) ne correspond pas au mouvement des prix et au pouvoir d'achat des Algériens, il est tout de même toléré d'en déduire que la cote flirte déjà avec les seuils de l'angoisse. S'il est vrai que le gouvernement s'emploie sans gêne aucune à administrer la monnaie, piétinant ainsi l'autonomie même de la Banque centrale, il ne fait plus aucun doute que la facture sociale, destinée à canaliser la nervosité des ménages, s'avère salée. Autrement dit, le gouvernement est revenu prendre d'une main ce qu'il avait offert de l'autre main. Mais il semble que les contrecoups d'une telle action s'avèrent préjudiciables non seulement pour les ménages, pénalisés par l'augmentation des prix à l'importation, mais aussi pour l'entreprise dont les achats en intrants et pièces de rechange se révèlent de plus en plus onéreux. Réda Hamiani, président du FCE, s'est appliqué à expliquer récemment que cette mesure a été prise au moment où l'euro perdait 10 à 15% de sa valeur face au dollar, ce qui a induit une dévaluation brutale et double du dinar face à ces deux devises. Le patron des patrons a estimé qu'il s'agissait d'un recours des autorités à un procédé purement monétariste pour freiner les importations. Est-il vrai que la finalité de la dépréciation de la monnaie nationale est de réduire les importations que même le crédoc n'a pas pu contenir ? Si tel était le cas, il serait admis d'acquiescer la thèse selon laquelle le pays est administré suivant l'humeur. De toute façon, dans une économie rentière à l'image de la nôtre, le régime préfère jouer pour la stabilité de ses plaques tectoniques en compensant l'inflation par la subvention des prix et en sacrifiant l'entreprise pour que le pouvoir ne change pas de main au profit des vrais acteurs de l'économie.