L'ambassadeur du royaume du Danemark, Bo Eric Weber, explique l'attitude de son gouvernement par rapport à la polémique soulevée par la publication des caricatures sur le Prophète Mohamed (QSSSL) par un journal de son pays. Il insiste pour que les Algériens consultent le site internet de l'ambassade (www.ambalgier.um.dk/fr) pour s'informer des déclarations officielles de Copenhague. En dépit de la grande colère qui s'est emparée du monde musulman, après la publication de caricatures jugées offensantes du Prophète Mohamed par le Jyllands Posten, votre gouvernement refuse de présenter des excuses officielles. Pourquoi ? Jyllands Posten est un journal danois de droit privé. Ce journal, comme les autres journaux danois, n'a rien à voir avec le gouvernement danois. Ils sont protégés par la Constitution danoise, qui garantit la liberté de la presse. Si on est mécontent ou pas d'accord avec un article dans un journal, on peut aller à la justice qui décide si le journal est allé trop loin ou pas. C'est pourquoi le gouvernement ne peut pas présenter des excuses au nom d'une entreprise privée. Mais le premier ministre danois, Anders Fogh Rasmussen, a déclaré, à plusieurs reprises, qu'il ne souhaitait pas voir publiées ces caricatures. Aussi est-il satisfait que le journal en question ait présenté publiquement des excuses pour ces caricatures qui ont gêné autant de personnes. Aujourd'hui que les produits danois sont boycottés par le monde musulman et qui risquent de l'être pendant longtemps, comment allez-vous faire pour surmonter cette crise et améliorer l'image du Danemark dans la région ? Le boycott des produits danois est une façon publique de montrer sa désapprobation. Malheureusement, cette mesure pénalise beaucoup de musulmans, qui ont été licenciés, par exemple, en Arabie Saoudite, où une laiterie danoise a été fermée à cause du boycott. Ici, en Algérie, il y a des importateurs algériens qui, eux aussi, sont touchés par le boycott. Espérons que la sagesse gagnera. L'Algérie est un pays civilisé et je ne doute pas que les consommateurs algériens sauront faire la part des choses parce qu'ils préfèrent naturellement les meilleurs produits. Le respect que vous avez pour la liberté, qui est en soi une attitude noble, permet-il de tolérer des attaques et des provocations de toutes les croyances religieuses ? Personnellement, je trouve que la liberté d'expression ainsi que la liberté de la presse, c'est aussi la liberté de se taire. Si on veut le dialogue on ne commence pas par insulter et blesser le voisin - même si on a raison. Quand le dialogue est établi, on peut commencer à faire des caricatures, des satires, etc. Ceux qui me connaissent ici en Algérie savent que je suis un taquin. J'aime taquiner. Pourquoi ? Parce que j'aime l'homme ici et ailleurs. J'ai trouvé une amitié incroyable ici en Algérie, une grande tolérance et un humour que l'on ne trouve pas ailleurs. Mon épouse aussi. Elle dit souvent qu'elle n'a jamais autant ri comme ici. Votre gouvernement déconseille aux ressortissants danois de ne pas se rendre en Algérie sauf nécessité. Par quoi cette décision est-elle motivée ? Mon gouvernement ne déconseille pas aux ressortissants danois de se rendre en Algérie. Demandez à votre ambassade à Copenhague combien de visas elle a accordés aux Danois. Mais c'est vrai qu'il y a plus de Danois qui se rendent en Tunisie et au Maroc, parce que ces deux pays ne demandent pas de visas. Certains analysent la colère musulmane après la publication des caricatures du Prophète par ce qu'ils appellent « le choc des civilisations » ou « le choc des cultures ». Partagez-vous cette analyse ? Je ne sais pas. Il s'agit d'un journal danois avec un tirage quotidien d'environ 150 000 exemplaires. Je crois que vous donnez trop d'importance à ce journal qui est un parmi beaucoup d'autres. Personnellement, je ne le lis jamais et je n'ai même pas vu les caricatures en question, parues le 30 septembre 2005, à l'exception d'une seule sans doute inspirée par les criminels qui se suicident en Irak et qui tuent leurs frères musulmans au nom de l'Islam.