Bachir Derraïs est un réalisateur boulimique. Il sort aujourd'hui en Algérie la comédie Gourbi Palace et dans un mois le Film Un million de centimes. Et il est déjà sur un tournage sur la boxe et pleins de projets dans la tête. Vous venez de réaliser un film Gourbi-Palace qui est à l'origine un téléfilm... Gourbi-Palace, à l'origine, était un téléfilm dont le producteur est l'ENTV. Il devait être diffusé au mois du Ramadhan. Quand la production TV a visionné le début du téléfilm, l'on a pensé que c'était une bonne idée de le sortir en salle. Comme c'est une comédie drôle et légère. Et que cela fait longtemps que l'on a pas sorti de film algérien où il y a un peu de joie et de gaieté. C'est vrai que ces dernières années, on a tous fait des films tristes et dramatiques liés à la conjoncture. C'est tout à fait normal. Il faut marquer son époque. Le passage du petit au grand écran est fluide... Il n'y pas une grande différence. C'est dommage que je ne le aie pas su avant. Sinon j'aurais fait un film pour cinéma, dès le début. J'aurais fait beaucoup plus de plans, développé et puis réduit quelques scènes que j'ai tournées pour la télévision. Mais ce n'est pas grave. Je ne le regrette pas. On fait une première tentative. Le cinéma, c'est renouer avec les salles... J'ai toujours pensé que la solution du cinéma algérien, ce sont les salles. Comment drainer, reconquérir et fidéliser le public vers les salles. Je pense qu'en proposant un film 100% algérien avec des comédiens algériens qu'ils ont l'habitude de voir à la télévision. Cela rassure le public et les familles. Pourquoi pas le déclic ? La trame du film Gourbi-Palace est une satire de la société algérienne... C'est une histoire banale d'une famille algérienne pauvre dont le père, campé par Lakhdar Boukhors, maçon de son état, se fait licencier. Du coup, toute la famille tombe dans la précarité. Et la hasard fait qu'il rencontre, ce soir-là, un homme riche patron d'un grand hôtel à Alger, qui est incarné par Sid Ahmed Agoumi. Ce nanti s'est fait agresser par de jeunes dealers. Et c'est le maçon qui va porter secours au nanti en repoussant les assaillants. En guise de remerciements, le riche invite toute la famille du maçon à habiter définitivement l'hôtel. Ainsi, cette famille vivant dans le besoin “pétera les plombs” en goûtant au cadre luxueux et opulent... Le casting regroupe de jeunes comédiens et des artistes chevronnés, c'est calculé ? C'est calculé. Pour le rôle de Sid Ahmed Agoumi, je ne voyais pas quelqu'un d'autre. Agoumi est un bel homme, il fait le riche et le bourgeois. Et sa femme est Nadia Samir, c'est la citadine. La famille pauvre est interprétée par le couple Lakhdar Boukhors et Fatima Hlilou et leurs enfants sont Hakim Dekkar et le géant Brahim faisant 2m22. C'est le contraste et le fossé entre la famille riche et pauvre. Vous avez aussi un deuxième film qui sort bientôt... Le très attendu Un million de centimes... Oui, effectivement, le deuxième film Un million de centimes est très attendu, parce que cela fait deux ans qu'on a terminé le tournage. C'est deux ans de retard. A quoi est dû ce retard accusé ? C'est lié à beaucoup d'ennuis. C'est un film qui a eu énormément de problèmes notamment au début, d'ordre financier. C'est un film en cinémascope nécessitant beaucoup d'argent. Et puis ceux d'ordre bureaucratique que j'ai eus ici en Algérie. Les autorisations refusées. Donc, j'ai été obligé de tourner une partie en France. Ce qui est dommage ! Et tourner en France coûte dix fois plus cher qu'ici. Il faut dire que je n'ai pas été aidé par le ministère de la Défense, il y deux ans. Maintenant, j'apprends que le ministère de la Défense délivre des autorisations de tournage. Donc, j'ai été obligé de bricoler. Et comme j'ai tourné à Alger avec une majorité de techniciens algériens, j'ai eu beaucoup de mal à avoir l'agrément du CNC français. Car c'est un film franco-algérien. C'est pour cela qu'on traîné un peu. Je n'ai pas voulu sortir le film précipitamment et le “massacrer”. Maintenant, j'ai attendu. Et le film est en train de se vendre. J'ai réussi à le vendre à Canal+ et on est en pleine négociation avec TF1. Et en même temps, j'ai fait autre chose. J'ai produit les films Morituri, Le soleil assassiné de Bahloul... Vous êtes un boulimique...Vous êtes déjà sur un nouveau film... Je vais tourner un film dans deux mois. Le tournage s'effectuera en Algérie, une partie au Canada et une autre en France. C'est l'histoire d'un jeune Algérien, issu d'une famille pauvre dans un village et qui va devenir champion du monde de boxe qui va se retrouver aux Etats-Unis et en Europe. Et cela retrace aussi une belle histoire d'amour. C'est un peu Rocky à l'algérienne. Vous vous êtes intéressé à la musique raï en produisant une série documentaires pour Arte... Oui, j'étais le producteur exécutif. On avait réalisé trois documentaires sur le raï de 52mn. Et sur la série Babor D'zaïr ? J'étais chargé de production. J'y ai vraiment donné un coup de main à Merzak Allouache. Comment expliquez-vous le “naufrage” de Babor D'zaïr ? Le public n'a pas adhéré. Et on est obligé de respecter son choix. Quand on élabore un produit, on le soumet au public. Il aime ou il n'aime pas. On ne peut pas contester son choix. Les téléspectateurs n'ont pas aimé. Alors, je n'ai pas de commentaires. Il ne faut pas dramatiser la chose. Parce que Merzak Allouache est un bon réalisateur et il a fait bons films. Quel serait le film que tu rêves de réaliser ? L'histoire qui me tient vraiment à cœur, c'est celle du chanteur Matoub Lounès. J'ai vraiment envie de réaliser un film sur sa vie. J'aimerais bien participer à la réhabilitation de ce chanteur. C'est quelqu'un que j'ai connu. Une personne et un personnage vraiment humains.