La crise multiforme que vit le Mali provoque une légitime inquiétude à travers tout le continent africain, inquiétude soulignée par les démarches urgentes et insistantes de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao). Il faut dire que la déclaration de sécession de l'Azawad par le MNLA constitue une autre violation du principe sacro-saint du respect des frontières héritées à l'indépendance. Il a été introduit comme principe cardinal par les pères fondateurs de l'Organisation de l'unité africaine. Dans leur grande sagesse, ces derniers l'ont inscrit dans la charte de l'OUA pour éviter des guerres des frontières, sachant que, souvent, elles ont été tracées par les colonisateurs européens de façon arbitraire. Le premier pays à avoir violé cette charte a été le Maroc qui, en novembre 1974, a envahi le Sahara occidental. Mais l'acte le plus grave a été incontestablement commis par le dictateur soudanais, Omar El Béchir. Celui-ci a accompli la plus grave trahison jamais connue en Afrique. En effet, il a décidé d'accorder l'indépendance au Sud-Soudan alors que les Sud-Soudanais n'ont jamais revendiqué la séparation. Ils ont simplement lutté pour l'égalité des droits, la citoyenneté et, pourquoi pas, l'autonomie. En fait Omar El Béchir n'a fait qu'exécuter un plan mis au point par Israël en 1956 et auquel ont adhéré les Etats-Unis plus tard. L'OUA, en son temps, s'était fermement opposée à la sécession du Biafra. Aujourd'hui, la menace de guerre des frontières, de remise en cause des tracés hérités de l'ère coloniale, resurgit de façon extrêmement dangereuse. Tout le continent est désormais menacé de déstabilisation depuis que le dictateur de Khartoum a ouvert la voie aux sécessions et aux dissidences. Désormais, n'importe quel autre aventurier dictateur pourrait déclencher un conflit frontalier pour détourner l'attention de son peuple des problèmes intérieurs et pour alimenter le chauvinisme national. Ce qu'a fait le MNLA est un acte irréfléchi et irresponsable, qui inquiète légitimement les pays voisins et l'Union africaine. Il faut espérer que l'incendie qu'il a allumé soit rapidement circonscrit, sinon le grand gagnant dans l'affaire sera inévitablement le terrorisme islamiste. Le Qatar, l'Arabie Saoudite et d'autres monarchies sont aux aguets. Ils n'attendent que l'occasion pour répandre davantage le salafisme.