Les élèves sont en grève depuis dimanche à l'appel de la Coordination intersyndicale des travailleurs de l'éducation composée de 5 syndicats pour protester contre la dégradation de leur pouvoir d'achat et des conditions pédagogiques de l'enseignement. La grève de trois jours qui a impliqué les trois paliers de l'enseignement a été massivement suivie selon les organisateurs. Le ministère de tutelle minimise, de son côté, la portée de la démonstration de force du syndicat évoquant, pour décrédibiliser le mouvement, un taux de suivi de 24%. Cette traditionnelle guère des chiffres ne saurait pourtant occulter une réalité affligeante, celle de voir encore une fois les élèves pris en otage dans cette guerre d'usure opposant certains syndicats des enseignants au ministère de l'Enseignement. Il ne s'agit bien évidemment pas de jeter la pierre aux enseignants qui ont la lourde responsabilité de former les générations montantes. A cet égard, ils ont le droit au respect et à des conditions de travail et de vie décentes qui passent par une revalorisation de leur statut. Les enseignants refusent de croire que l'avenir de l'école algérienne peut se faire sans eux ou contre eux. Ils refusent de croire que leur destin n'est pas intimement lié à celui des élèves. Une grève des élèves est pourtant toujours mal vécue par les parents convaincus que la clé du conflit n'est pas entre les mains de leurs enfants, car si tel était le cas nul doute que ces derniers n'auraient pas choisi la solution de la confrontation qui est la pire des solutions car ce sont eux et personne d'autre qui paieront l'addition à la fin de l'année scolaire. Le durcissement du mouvement de protestation des enseignants est somme toute prévisible suite à l'attitude de fermeté avec laquelle a réagi le ministère de l'Enseignement qui n'a pas hésité à actionner la machine judiciaire pour endiguer l'action des syndicats en colère. Un succès indéniable Sûrs de leur bon droit et de la légitimité de leurs revendications, les syndicats n'ont pas craint, pour leur part, de recourir à la solution extrême de la grève, convaincus en cela que c'est là l'ultime moyen qui leur reste pour faire entendre leur voix. Quant à la légalité de leur action, c'est une autre paire de manches. Car en définitive, qui est dans l'illégalité dans cette affaire ? Les pouvoirs publics qui refusent d'agréer pour des raisons peu convaincantes les syndicats autonomes de l'enseignement ou bien ces syndicats en question qui ne demandent qu'à avoir une existence légale et à activer dans le cadre des lois et règlements du pays. A travers ce débrayage, le ministère devrait pouvoir à présent jauger à sa juste mesure le poids de ces syndicats et leur représentativité. Même si la grève avait été suivie à 24% comme le soutient le ministère, cela devrait selon toute logique donner à réfléchir à la tutelle. C'est un succès indéniable à mettre au crédit des syndicats, car il faut rappeler le contexte dans lequel cet appel à la grève a été lancé un contexte fait de pression et de menaces de traîner devant les tribunaux les représentants des syndicats concernés. Dans un tel climat de peur et d'intimidation, la grève aurait dû être un lamentable échec. C'est le contraire qui s'est produit. L'opération coup-de-poing du ministère a contribué à doper les troupes des syndicats protestataires. Fort de cette légitimité de la base, le mouvement de protestation est appelé à aller crescendo. Les expériences des mouvements de protestation qu'a connus le pays ont pourtant montré, à l'instar du mouvement des archs, que l'on ne règle pas des conflits sociaux par le harcèlement judiciaire et les sentences administratives.