On vient de faire mieux que les Américains”. En venant à la tribune exprimer son trop-plein d'émotion pour avoir reçu le prix de la meilleure interprétation masculine, Mustapha Ayad, le fils de Rouiched, n'avait pas du tout l'air de lancer une boutade. La cérémonie du Fennec d'or lui paraissait tellement “somptueuse” avec ses paillettes et son look très jet-set qu'il s'oublia devant le micro, allant jusqu'à commettre une ineptie qui n'a fait rire personne. Ainsi donc, la Coupole version tapis rouge, tables festives et convives triés sur le volet, qui dame le pion... à Hollywood, on aura tout entendu. Les monstres sacrés du cinéma mondial immortalisés par les grands festivals dont la réputation internationale n'est plus à faire n'ont qu'à aller se rhabiller. C'est un simple raccourci pour rester dans la dérision, mais cette propension à vouloir, chez nous, surdimensionner à coup de superlatifs pompeux le plus banal des événements a quelque chose de maladif qui fausse les appréciations les plus pertinentes, au risque de vous faire passer pour des rabat-joie si votre regard ne cède pas à la complaisance et s'obstine à être objectif. Quelle impression faut-il garder de cette troisième nuit du Fennec d'or ? Sincèrement, s'il faut louer l'initiative qui consiste à réunir une fois par an, en un espace de convivialité, le monde de l'audiovisuel pour encourager la création artistique et récompenser les œuvres les plus performantes, il faut se garder en revanche de cautionner la médiocrité et les incohérences au plan organisationnel sous prétexte que le “produit” est algérien et mérite forcément les applaudissements. A cette cérémonie, force est de dire que les imperfections étaient hélas trop nombreuses pour passer inaperçues. Cela prouve que les concepteurs n'ont pas été à la hauteur de leurs ambitions en restant dans les limites d'un amateurisme ressenti à tous les niveaux, alors qu'ils nous promettaient une soirée respirant le faste cannois ou berlinois où les réglages des mises en scène sont d'une précision redoutable. Chez nous, on sentait partout le poids de l'improvisation. La cérémonie a manqué terriblement de rythme, d'enchaînement, de concordance. Les “vides” étaient difficiles à combler en raison de l'inexpérience des différents acteurs. Les couacs étaient par conséquent grossiers comme celui d'attendre, trophée et bouquet de fleurs à la main, l'heureux élu qui ne répondait pas à l'appel. C'est la preuve qu'on n'a pas pris le soin de vérifier à l'avance si tous les nominés étaient bien présents dans la salle. Que dire de la “prestation” de Benguettaf qui semblait complètement perdu dans un rôle qui n'était pas le sien. On comprend le fait que HHC, en lui confiant cette tâche, voulait lui offrir un piédestal à la mesure de sa valeur artistique, mais manifestement ça n'a pas réussi. L'homme de théâtre, assurément, n'était pas fait pour ce genre de spectacle. Que dire aussi de Baya L'hachemi qui, en recevant le prix à la place de celui qui l'a obtenu, a profité de l'occasion pour dériver dans une revendication sociale qui n'a pas plu à l'assistance. Que dire enfin de cette jeune animatrice qui, avec ses maladresses criantes, en ne sachant pas trop s'il fallait s'exprimer en arabe ou en français, a rabaissé la cérémonie au rang d'une kermesse de lycée. Mais s'il faut lui reprocher cette audace d'accepter une mission capitale pour laquelle elle n'était pas visiblement préparée, ce sont ceux qui ont la légèreté de lui confier une responsabilité aussi lourde qui sont à blâmer. On le voit, la bourde de Mustapha Ayad n'était pas la seule. L'audiovisuel a donc vécu un moment qui lui ressemble en fait. Sans génie et sans éloquence. Avec quelques productions, HHC organise un festival qui nous montre plus nos faiblesses que nos performances. Vu sous cet angle, c'est un miroir qui peut nous servir. A la prochaine.