A force de côtoyer les notaires, les huissiers et autres avocats, un jeune désœuvré de Foughala, qui fréquentait assidûment les prétoires, s'est dit : « Pourquoi ne pas se faire passer pour un de ces honorables auxiliaires de la justice ? » Mais comme il n'avait pas du tout le physique de l'emploi, notre apprenti escro s'ingénia à imiter discrètement la voix de plusieurs ténors du barreau de Biskra tant est si bien, qu'au téléphone, il pouvait se faire passer pour maître X ou Y, sans que son interlocuteur y trouve à redire. Son stratagème était fort simple : se faisant passer pour l'avocat X, il téléphonait à un de ses confrères et non moins ami. Après l'avoir salué et parlé de la dernière affaire qu'il a brillamment plaidée, il lui demandait à brûle pourpoint de le dépanner : « Oh juste 3000 DA, je suis passé ce matin à ma banque, il y avait un monde fou et une chaîne trop longue devant le guichet de la caisse. Merci d'avance, je t'envoie un jeune chercher l'argent que je te rendrai demain matin c'est promis ! ». Il raccrochait aussitôt. Puis, un quart d'heure plus tard, c'est lui-même qui allait empocher la somme. Il arnaqua, semble-t-il, une demi-douzaine d'avocats jusqu'au jour où il tomba sur un bec, en l'occurrence une dame qui n'est pas née de la dernière pluie ; l'avocate, soupçonneuse juste après le coup de téléphone, appela le prétendu confrère qui l'avait sollicitée. « Je ne vous ai pas du tout téléphoné ce matin et de plus, j'ai assez d'argent sur moi ! » Le jeune escro se présente chez l'avocate, qui l'accueille chaleureusement et, avec un sourire en coin, lui remet la somme demandée. A peine sorti du cabinet, le jeune escro est arrêté par la police judiciaire, alertée par l'avocat dont il a usurpé l'identité. On le trouve en possession de la somme remise par la dame qui, par précaution, avait relevé les numéros des billets. Inculpé d'usurpation d'identité et d'escroquerie, l'imitateur en herbe médite actuellement derrière les barreaux.