La question des droits de l'homme a été quasiment absente dans les interventions des partis politiques. Dans un contexte caractérisé par des interpellations et des condamnations de syndicalistes et de militants des droits de l'homme, les formations politiques engagées dans la course aux législatives ont tout simplement ignoré les questions des libertés individuelles et collectives, la liberté de manifester pacifiquement ainsi que le droits à la libre expression des opinions. Les 44 partis politiques ont «zappé» ce chapitre auquel les Algériens accordent tant d'importance. C'est ce que déplore le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh), Noureddine Benissad : «Ce déphasage traduit un manque de volonté d'aller vers un vrai changement.» L'avocat pointe du doigt le régime, qui a favorisé un discours «pro-vote» en excluant toute voix discordante. «Les Algériens ne sont pas naïfs. Ils savent que la diabolisation du Printemps arabe n'est plus adéquate dans la conjoncture actuelle», souligne-t-il. Le premier responsable de la Laddh affirme : «Malgré la levée de l'état d'urgence, les autorités interpellent les militants ou les citoyens qui ne partagent pas les thèses du pouvoir, pour écraser leur droit à la parole.» Toutefois, M. Benissad pense que «si le pouvoir a une mainmise sur les moyens d'expression, les Algériens parviennent toujours à exprimer et faire passer leurs idées». Le président de la Laddh rappelle, dans la foulée, le manque de représentativité des partis. Pour sa part, le président de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADH), Boudjemaâ Ghechir, dénonce le fait que «les autorités interpellent tout militant qui ne partage pas la vision du régime». «Il faut comprendre que l'Algérie est revenue aux pratiques du parti unique. L'Alliance présidentielle, qui était composée du FLN, du RND et du MSP, a encouragé des agissements totalitaires. Les partis alliés au régime sont antidroits de l'homme et donc il ne faut rien espérer d'eux. Quant aux nouvelles formations, il subsiste toujours, dans l'esprit de quelques-uns, une peur des tenants du pouvoir», analyse M. Ghechir. Les organisations autonomes et les mouvements citoyens, rappelons-le, subissent depuis des semaines une répression sans précédent. Une situation qui a fait réagir bon nombre d'ONG de défense des droits de l'homme. Le Mouvement des jeunes indépendants pour le changement (MJIC), le Réseau pour la défense de la liberté et de la dignité (RDLD) et le Rassemblement action jeunesse (RAJ) ont été les principales cibles des forces de l'ordre. Malgré cela, les militants de ces organisations n'ont pas ménagé leurs efforts pour soutenir le jeune Tarik Mameri, un internaute qui a appelé sur Youtube au boycott du scrutin du 10 mai. Ce dernier doit comparaître le 30 mai devant le juge pour répondre de quatre chefs d'inculpation, dont «destruction de biens d'autrui», «destruction de documents administratifs officiels», «incitation directe à attroupement» et «outrage à corps constitués».