Le patron du RND regrette que «l'argent commande et commence à gouverner en Algérie» sous l'impulsion de cercles mafieux. Ahmed Ouyahia dérange en politique.» C'est ainsi qu'a répondu le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, à la question de savoir qui se cache derrière le mouvement de contestation qui secoue actuellement son parti. Mais quelles sont les parties que Ouyahia dérange ? Le patron du RND ne donne pas de noms, mais il révèle qu'«il dérange des parties dans le système et en dehors du système, car il n'est pas l'homme du compromis». Une qualité qui lui a valu beaucoup d'adversaires. «Je dérange parce que dans ma gestion et ma participation aux affaires publiques, j'ai refusé d'être un homme de compromis et d'image», a-t-il dit, lors d'une conférence de presse animée à l'issue des travaux de la réunion du conseil national du RND. Ouyahia sait pertinemment qu'en épousant le monde de la politique, il s'attirerait beaucoup d'ennemis, mais il se réjouit, toutefois, d'avoir aussi quelques amis et des sympathisants : «Chaque homme est appelé à avoir des amis et des ennemis et la situation devient complexe lorsqu'on est un homme public.» Et d'ajouter sur un ton ironique qu'«il ne se plaint pas trop, car il a de quoi composer une équipe de football capable de jouer sur la pelouse». Ouyahia se targue, dans le même sens, d'être «un homme du devoir» : «J'ai servi mon pays pendant les moments les plus difficiles, je suis un homme au service de l'Etat.» Le patron du RND s'est également expliqué sur le retard enregistré dans la démission du gouvernement, comme le veut la tradition après l'installation d'une nouvelle Assemblée ; il reconnaît que cette attente est gênante, mais justifie ce retard par «des raisons objectives liées notamment à la préparation du baccalauréat et à l'organisation du marché». «Le gouvernement fonctionne» L'essentiel, pour Ouyahia, c'est que «la République continue de fonctionner» : «La non-démission du Premier ministre n'a pas influé sur le travail de l'Exécutif. Le gouvernement fonctionne», a ajouté encore Ahmed Ouyahia, en laissant entendre qu'il était prêt à quitter le gouvernement. «Croyez moi, le gouvernement n'est pas un paradis», a-t-il affirmé, arguant que la date de la démission du gouvernement sera arrêtée par le chef de l'Etat, avant de rappeler que, selon la Constitution, «la décision finale concernant le gouvernement revient au président de la République». A la question de savoir si, au nom de l'équilibre régional, Ouyahia sera sacrifié, l'orateur a répondu que dans une équipe de foot, ce sont les bons joueurs qui sont retenus, et ce, quelles que soient leurs origines. Interrogé sur ses ambitions politiques et s'il sera candidat en 2014, Ouyahia réitère sa phrase fétiche : «C'est la rencontre d'un homme avec son destin.» Pour lui, «les enjeux importants pour le pays ne sont pas cweux d'être candidat à la présidentielle, ministre ou député», mais plutôt l'édification d'un pays stable et d'une économie productive. «Le train a mal démarré en 1990» Le patron du RND regrette, dans la foulée, que «l'argent commande et commence à gouverner en Algérie» sous l'impulsion de cercles mafieux. Ouyahia s'est montré très critique à l'égard du «lobby des conteneurs». Ces groupes, qui, selon lui, transfèrent l'argent du pétrole à Paris et à Shanghai, ont créé un «Dubaï» dans chaque coin du pays. «J'ai mal pour mon pays», lance-t-il. Le moment est venu, de son avis, de poser des questions sur l'avenir économique du pays et les choix adoptés. Reprenant sa casquette de Premier ministre, Ahmed Ouyahia a, à ce titre, reconnu l'échec du gouvernement, mais a toutefois estimé que «cet échec est collectif» et que «la responsabilité est également collective». «Je ne suis pas le seul responsable. Si vous pensez que le fait de changer de gouvernement, la situation sera mieux, je voterais avec dix doigts pour ce changement. Mais je vous signalerai que le train a mal démarré en 1990, lorsque l'Algérie a opté pour l'économie libérale basée sur l'importation qui a pris le dessus sur la production», a-t-il martelé. Revenant sur les législatives, Ouyahia récuse l'idée de fraude et traite les partis criant à la fraude de «mauvais perdants». Il salue dans cette optique le courage politique du chef de l'Etat qui s'est investi dans cette élection afin d'éviter une défaite, d'abord pour lui-même et ensuite pour le pays. Il se dit également contre le boycott de l'APN, et ce, par respect pour les lois de la République et les électeurs. Dans ce sens, le premier responsable du RND se dit pour la réduction du champ de l'immunité des députés qui devrait se limiter aux activités des élus au sein du Parlement. Ouyahia a expliqué que l'article 111 de la Constitution donne l'immunité au parlementaire «pour ses propos et actes au sein de l'Assemblée, mais ne donne aucune immunité au parlementaire dans sa vie quotidienne». La législation algérienne «a fait confiance» au Parlement quant à la levée de l'immunité, mais «il n'a rien fait». Quant à l'éventuelle révision des indemnités perçues par les députés, le responsable du RND a relevé qu'il y avait «deux instances capables d'initier un mouvement» pour réviser le salaire des députés : «L'APN et l'Exécutif.»