Le procureur général égyptien va faire appel après les verdicts rendus samedi dans le procès du président déchu Hosni Moubarak, qui ont provoqué une vague de protestations, a-t-on appris hier de source judiciaire. Le procureur «a ordonné d'entamer les procédures d'appel», a-t-on appris auprès du parquet. Cette source n'a toutefois pas précisé si ces appels visaient toutes les décisions de justice rendues samedi, ou seulement les acquittements. M. Moubarak a été condamné à la prison à vie, de même que son ministre de l'Intérieur Habib El Adli, mais six anciens hauts responsables de sa police ont été acquittés. Tous étaient poursuivis pour la répression de la révolte contre le régime au début de l'année 2011, qui a fait officiellement environ 850 morts. Les six responsables des services de sécurité acquittés restent toujours frappés d'une interdiction de quitter le territoire égyptien, a ajouté le parquet. Les deux fils de M. Moubarak, Alaa et Gamal, poursuivis pour corruption, n'ont, quant à eux, pas été condamnés, le tribunal ayant fait valoir que les faits reprochés étaient couverts par la prescription. Un des avocats de la défense de l'ancien président avait indiqué samedi que son client allait faire appel. Le résultat de ce procès, et tout particulièrement les acquittements des hauts responsables de la police, ont poussé des milliers d'Egyptiens à manifester samedi au Caire et dans plusieurs autres villes. Quelques centaines d'entre eux étaient toujours présents hier place Tahrir, dans le centre de la capitale. Pour le journal indépendant Al Chorouq, «Moubarak est condamné, son régime acquitté» et «les révolutionnaires sont à nouveau sur Tahrir». M. Moubarak, quant à lui, a passé sa première nuit en prison, après avoir été interné samedi dans l'aile médicalisée de l'établissement pénitentiaire de Tora, au sud du Caire. Il était auparavant en détention préventive dans un hôpital militaire de la capitale. Agé de 84 ans, M. Moubarak était le premier des dirigeants emportés par le Printemps arabe à comparaître en personne devant les juges après trois décennies passées à la tête de l'Egypte. Chafiq offensif Ce jugement intervient dans un contexte politique tendu, entre les deux tours de l'élection présidentielle. Le second tour, qui oppose un islamiste, Mohammed Morsi, au dernier Premier ministre de M. Moubarak, Ahmad Chafiq, est prévu les 16 et 17 juin. Ce dernier a d'ailleurs attaqué hier les Frères musulmans, dont il doit affronter le candidat au second tour, en affirmant qu'ils allaient ramener le pays «vers le Moyen-Âge». M. Chafiq s'est aussi posé en garant de la démocratie, en assurant que sous sa présidence, les droits de l'homme seraient respectés. Le candidat a appelé lors d'une conférence de presse les Egyptiens «à choisir pour l'Egypte un président qui en fera un pays pour tous, pas un Etat pour une seule faction», en allusion à la confrérie islamiste. L'ancien chef d'état-major de l'armée de l'air a assuré que les droits de l'homme seraient respectés s'il était élu. «Personne ne sera détenu pour son opinion (...). Les services de sécurité seront liés par la loi et les normes des droits de l'homme», a-t-il dit. «Je représente un Etat non religieux (...), les Frères musulmans représentent un Etat sectaire. Je représente le progrès et la lumière, ils représentent l'arriération et l'obscurantisme», a-t-il ajouté. M. Chafiq a aussi dit qu'il aspirait à «un Etat juste, non religieux, moderne» alors que les Frères musulmans ramèneraient l'Egypte «vers le Moyen-Âge».