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Sahar Khalifa, un printemps chaud
La Palestine dans le texte
Publié dans El Watan le 02 - 03 - 2006

Traduite dans plusieurs langues dont le français, Sahar Khalifa fait aujourd'hui partie de cette pléiade d'écrivains qui ont donné à la littérature palestinienne toute sa maturité, sa force et une grande clarté.
Une littérature qui a forgé une voie très consciente de la tâche difficile qui incombe à l'écrivain : comment écrire la Palestine, sans s'engouffrer dans un discours engagé sans substrat esthétique ? Comment garder cette distance invisible qui donne à la littérature toute son essence et sa vraie définition. Sahar Khalifa s'identifie comme faiseuse de mots et tisseuse de toute une mémoire, elle n'est jamais historienne, même si elle vit dans ses tourmentes et marquée par ses avatars. L'expérience romanesque de Ghassan Kanfani a défini cette voie depuis 30 ans, depuis la sortie de ses premiers romans, diamétralement différents de ce qu'il faisait à l'époque. Hommes sous le soleil, Ce qui vous reste, Retour à Haïfa... n'étaient que des indices d'un envol littéraire nouveau. Une littérature dans laquelle la Palestine n'était qu'une toile de fond, certes importante, mais sans retombées sur l'écriture. Assassiné par les services secrets israéliens, mettant fin à une voix de la raison et de l'art et ouvrant ainsi les portes à tous les fanatismes et les dérives, Ghassan Kanfani a laissé derrière lui tout un chantier ouvert, dont Sahar Khalifa est l'une des dignes héritières. Née à Naplouse en 1942, très tôt, Sahar Khalifa se marie, mais elle divorce après treize ans de mariage. Elle se consacre à son écriture et ses études. De 1980 à 1987, elle s'installe aux Etats-Unis. Elle focalise tous ses efforts pour la préparation d'une thèse sur la littérature féminine noire, aux Etats-Unis. Après son retour, elle fonde en 1988 le Centre d'études féminines à Naplouse qui sera relayé, une année après, par deux autres, un à Ghaza l'autre à Amman. En parallèle, elle suit de près la douleur du peuple palestinien par son écriture romanesque. Elle publie Chronique du figuier barbare (1970 - traduction Gallimard 1978), La foi du tournesol (traduction Gallimard 1989), Image et Icône et surtout l'Héritage (Flammarion 1998) qui fait d'elle une écrivaine incontournable. Avec Un printemps chaud, son dernier roman, Sahar Khalifa, s'installe définitivement dans cette lignée d'écrivains ayant choisi d'écrire et de dire leur rage face aux injustices, celle des leurs qui n'ont pas su concrétiser le rêve palestinien, mais aussi celle de l'occupant, barbare et injuste. Dans Un printemps chaud, elle revisite toutes les assurances qui font aujourd'hui l'inconscient palestinien. Sans hésitation, elle place toute son écriture sous la lumière de la raison, dans un contexte quotidien pénible. Sahar Khalifa fait face aux questions les plus épineuses « sans ça, on n'est jamais écrivain, juste des perroquets qui redisent ce qu'on leur donne. Pas plus ». Pourquoi, par exemple, une jeune fille pleine de vie, belle et en bonne santé, décide-t-elle de sacrifier tout son bonheur pour une cause, dont elle ne connaît aucun aboutissement ? Quelle est cette force interne qui fait d'un jeune Palestinien, voué aux délices de la vie, l'art, l'image, une bombe prête à sauter ? Y a-t-il une morale juste et équitable, partagée par tous les êtres, dans un monde où les raccourcis sont devenus fréquents ? Est-il criminel celui qui défend une terre usurpée ? Imaginons un seul moment que les nazis avaient remporté la Deuxième Guerre mondiale : quelle serait la position des Anglais, Allemands révolutionnaires, des Français, Américains... ? Démunis de tout armement de résistance et désespérés, ils se font sauter dans des casernes, des bus, des marchés... Sans aucun doute, ils seront considérés par les Allemands nazis comme des barbares et des criminels. Ces mêmes hommes se verront rehaussés aux rangs de martyrs pour une cause nationale par les leurs. Ce n'est aucunement un justificatif pour glorifier l'effacement des dizaines d'êtres qui ont eu le seul tort de se retrouver dans le mauvais lieu au mauvais moment. Tout ce qui touche à la vie des civils est condamnable. Mais une réflexion philosophique s'impose pour un débat qui, aujourd'hui, perd beaucoup de son objectivité et de sa teneur. On ne se suicide pas par plaisir, on ne tue pas des gens innocents par excès de bonheur, à moins qu'on soit malade. Au-delà du politique, c'est une question ontologique d'abord à laquelle, chacun d'entre nous, doit trouver une réponse satisfaisante. Un printemps chaud est un roman très complexe par sa problématique et très audacieux par ses questionnements et son écriture crue qui coupe avec la métaphore aveuglante, comme si la Palestine ne peut plus supporter le non-dit ou l'amalgame. Sahar Khalifa reprend le quotidien palestinien dans sa complexité, loin des cartes postales. L'histoire de plusieurs familles face aux agressions. Les hommes se déterminent par leurs actes et non pas par une identité religieuse ou ethnique. Une famille modeste comme on en trouve en Palestine : un père journaliste, photographe de son état, dans le journal El Qods, une mère, maman-poule, comme toutes les mères dans les moments les plus durs, qui fait tout pour préserver ses deux enfants, Ahmed, la tête en l'air, trop fragile et presque débile, et Majid, universitaire, athlète et chanteur. Deux parcours différents ; Ahmed, après maints efforts, suit la trace du père en devenant photographe. Il tombe amoureux de Mira, fille d'un colon juif, qui chaque jour dépasse le grillage de séparation pour rencontrer son ami. Ils grandissent vite et avec eux leurs différences assassines. Bercée dans un certain idéal de justice avec son ami palestinien, elle devient partisane du mouvement pacifiste qui prônait dialogue et droits pour les Palestiniens. Ahmed devient ambulancier dans le Croissant-Rouge pour pouvoir aider les blessés. Malgré les interventions de Mira et de son ami Rachel pour préserver la maison des parents de Ahmed des bulldozers israéliens, la demeure fut détruite entièrement. Ahmed s'aveugle et va jusqu'au bout de l'absurde, et se fait exploser avec sa voiture sous le regard effaré de tout le monde. Majid, son grand frère, devient chanteur, très aimé par la jeunesse, mais les injustices le poussent aussi à s'enrôler dans le camp des combattants de la liberté. Même critique à l'égard des dirigeants palestiniens, Majid se bat jusqu'à l'ultime souffle en défendant la Moukataâ et Arafat. Il prenait son café quand il reçut en pleine tête un éclat d'obus qui l'envoya dans un coma profond et le cloua définitivement au sol. Un printemps chaud est un roman très fouillé. D'ailleurs, la romancière n'oublie pas, à la fin du roman, de remercier tous ceux qui l'ont aidée à réaliser ce roman qui s'inspire de l'histoire de Palestine sans s'y installer. La part de l'imaginaire est tellement forte qu'elle nous fait oublier le substrat sur lequel repose le roman entièrement. Une question reste en suspens : comment la vie d'un jeune Palestinien, promis à un avenir radieux de chanteur ou de caméraman, peut-elle balancer vers l'innommable et l'ambigu ? Comment une fille élevée dans un ghetto de colons juifs, devient-elle une adepte de la question palestinienne, de justice et de pacifisme ? Des questions qui nous interpellent tous, ceux qui croient à l'idéal humain, au-delà des religions, des langues et des ethnies ? Ce qui est sûr, c'est qu'on ne choisit jamais la voie de la négation et du nihilisme sur un coup de tête ou à cause d'une petite déception amoureuse.

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