Un démarrage en beauté qui prélude un programme de haute facture. Constantine. De notre envoyé spécial
Mourad Benhamou, batteur franco-algérien, était tout heureux d'annoncer, jeudi soir au théâtre régional, son retour à Constantine pour le Festival international du jazz, Dimajazz. «Et je suis heureux d'annoncer que ma mère, constantinoise, est là» a-t-il lancé, applaudi par le public assez nombreux. Avant lui, Zoheir Bouzid, commissaire du festival, a reconnu que le Dimajazz n'était au début qu'un projet. «Aujourd'hui, nous sommes fiers de cet acquis. Le festival est né comme un graine parmi des amis attachés à leur identité, amoureux de leur ville et ouverts sur le monde. Le festival est un acquis pour tous les Algériens. Nous croyons, avec la célébration cette année du 50e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, que le culture en général et le jazz en particulier sont un symbole de la liberté», a-t-il déclaré. Après un hommage rendu par le ministère de la culture, lors de la Journée de l'artiste, à Adel Merouche, un des fondateurs du Dimajazz, décédé depuis quelques années, le premier concert a été donné par Mourad Benhammou et les Jazz Workers avec Fabien Mary à la trompette, David Sauzay, à la flûte et au saxophone ténor, Pierre Christophe au piano et Fabien Marcoz à la contrebasse. Au groupe est venu se joindre Jean-Luc Di Fraya aux percussions et au chant. Celui-ci, originaire de Marseille et également batteur, joue habituellement avec la compagnie Nine Spirit. Le groupe interprète au début un classique du jazz, Caravan de Duke Ellington, et enchaîne avec O, miss Africa de Ronald Boykins, The king swings de John Williams, Smart set de Roy Brooks... Benhammou a rendu hommage à travers sa composition Perk's snare, titre de son album de 2009, à Walter Perkins, maître américain de la batterie qu'il avait rencontré en 2004, à New York. Célèbre batteur, Walter Perkins, fondateur du fameux groupe MJT + III, avait produit plusieurs albums dans les années ‘60 dont Holiday soul. Les Jazz Workers ont interprété également Too short, nouvelle composition de Fabien Mary à inscrire dans le registre du jazz aérien et nerveux. Le concert s'est clos sur le très festif Funji Mama composé par Jimmy Smith, célèbre saxophoniste. Peu porté sur le jazz-fusion, artisan convaincu du hard bop, Benhammou a présenté un spectacle tonique où tous les ingrédients de l'intensité de ce style new yorkais étaient réunis. Le dialogue entre instruments n'a aucun moment failli. Mieux, c'était l'entente totale. «Je suis très frustré de ne pouvoir rester plus longtemps. J'ai vu que dans le programme off du Dimjazz, il y a des groupes locaux qui se produisent. J'aurais voulu les écouter. Je suis content que ça pousse et émerge en Algérie. Cela grâce notamment au Dimajazz. L'équipe de ce festival doit être encouragée davantage. C'est important pour la suite», nous a-t-il confié. Le maître américain du steelpan (casserole en anglais), Andy Narell, a pris le relais pour un concert tout en découverte. Le steelpan, instrument idiophone né à Trinité et Tobago dans les années ‘40, est adapté par Andy Narell au jazz, au calypso et à la World music. Muni des sticks, il a fait «dire» au steelpan tout ce qu'il a voulu en frappant sur ses surfaces vives selon une mélodie parfaitement accordée au piano et à la basse. Le jazz a pris alors un doux parfum des îles Caraïbes. Andy Narell était accompagné du grand bassiste mauricien Linley Marthe, connu aussi comme pianiste. Linley Marthe a fait partie du prestigieux groupe Joe Zawinul Syndicate. Au piano et au chant, Andy Narell a fait appel à la cubaine Janysett Mcpherson, connue notamment par son album Tres almas et qui chante en espagnol et en français. «Au début, le steelpan n'offrait que de la rythmique. Ensuite, il a évolué pour être associé à des musiques d'orchestre. C'est également un instrument pour le jazz et à la musique du monde. J'essaie de l'impliquer partout. Il m'arrive de composer des morceaux pour les grandes steelbands. J'essaie d'explorer toutes ses possibilités», nous a expliqué Andy Narell qui a appris le steelpan dans le Qeens à New York, participant à plusieurs projets musicaux tels que Carribbean Jazz Project, «University of Calypso» avec Relator, Pedro Martinez et Paquito D'Rivera. Il également ajouté sa touche en produisant l'album Tatoom où figurent de grands noms du steel tels Davis Sanchez et Luis Conte. Depuis 1979, Andy Narell a sorti plusieurs autres albums. Hier soir, la scène du TRC a été animée par le saxophoniste italien Stefano Di Battista et le trio français d'Andrien Moignard. Le programme Off du Dimajazz, prévu jusqu'au 20 juin, débute aujourd'hui, samedi, à 17 heures, au Palais de la culture Malek Haddad avec les groupes Freeklane, Algorithme, Cassiopée, Illusions and Hadjer et Black Rock Garden. Le Dimajazz 2012 se poursuit jusqu'au 23 juin.