On savait l'opposition syrienne en exil divisée. La division sur la question de la transition atteint aussi l'opposition militaire sur le terrain et celle, politique, basée à l'extérieur du pays. Tout en déniant le droit au Conseil national syrien (CNS) de parler au nom de l'opposition, la rébellion syrienne, structurée au sein de l'Armée syrienne libre (ASL), a estimé hier que le futur gouvernement de transition dirigé par un groupe minoritaire de l'opposition était «mort-né», car non représentatif.Allusion faite au projet annoncé la veille par le doyen des opposants syriens Haytham Al Maleh de former un gouvernement en exil qui sera basé au Caire. «Ce gouvernement d'exil est mort-né, car il est issu d'un seul groupe qui ne représente pas l'ensemble de l'opposition et ne répond pas aux revendications du peuple», a affirmé à la presse le colonel rebelle Kassem Saadeddine, porte-parole de l'Armée syrienne libre (ASL), à l'intérieur de la Syrie. Un gouvernement de transition nécessite «un consensus» et «tout projet gouvernemental qui marginaliserait des groupes à l'intérieur du pays» sera voué à l'échec, a-t-il déclaré. Haytham Al Maleh, 81 ans, avait annoncé mardi avoir été chargé par une coalition de Syriens «indépendants sans affiliation politique» de former un gouvernement en exil qui sera basé au Caire. M. Maleh, un avocat et défenseur des droits de l'homme qui a passé plusieurs années en prison, avait expliqué la décision de former un gouvernement par la crainte d'un «vide» en cas de chute du président Bachar Al Assad. Actuellement en désaccord avec l'ASL sur la manière de gérer l'après-Al Assad, le CNS s'est empressé aussi de réagir en jugeant «hâtive» la formation d'un gouvernement en exil, estimant qu'elle affaiblissait l'opposition syrienne. Le CNS tient à son «gouvernement de transition» Le président du CNS, Abdel Basset Sayda, avait annoncé samedi qu'il allait discuter avec les groupes rebelles présents sur le terrain d'un «gouvernement de transition» qui serait dirigé par une personnalité engagée dans le soulèvement dès son déclenchement. Non séduits par cette idée de gouvernement de transition, les chefs de l'ASL, dont l'état-major est établi en Turquie, ont par ailleurs aussitôt présenté le 31 juillet leur «programme de salut national». Leur feuille de route propose, dans un premier temps, la création d'un «conseil supérieur de défense regroupant les chefs militaires des villes et des provinces syriennes ainsi que les plus importants officiers ayant fait défection ou ayant participé à la révolution». Plus important encore : il est prévu que cette instance choisisse «un conseil présidentiel de six personnalités politiques et militaires pour diriger le pays durant la période transitoire». Ce conseil aura la prérogative de «proposer des lois pour restructurer les organismes militaires et de sécurité». Al Assad : «Alep est une bataille cruciale» Sur le terrain des combats, les insurgés ont entrepris hier d'accentuer la pression à Alep. Selon diverses sources, ils se seraient fixés pour objectif la prise des sièges des services de renseignements de l'armée de l'air pour s'assurer le contrôle de la ville. En face, les soldats loyalistes ont continué à bombarder certains quartiers sans toutefois parvenir à avancer. Dans la capitale, l'on a signalé que de brefs combats ont opposé pour la première fois des soldats à des assaillants aux abords de deux quartiers chrétiens réputés comme étant pro-régime, aux premières heures de la journée. Conscient de l'enjeu stratégique que représente Alep, le président Bachar Al Assad a affirmé hier que l'armée livrait une bataille «cruciale» pour le destin du pays, à l'occasion du 67e anniversaire de l'armée. «L'ennemi se trouve aujourd'hui parmi nous, utilisant les agents de l'intérieur comme un moyen pour déstabiliser la patrie, la sécurité du citoyen», a lancé le président à l'adresse des soldats dans un discours diffusé par l'agence Sana. Exprimant sa «profonde préoccupation» par la situation dans la ville, la mission de supervision de l'ONU en Syrie a indiqué pour sa part que l'armée syrienne avait recours à des avions de chasse pour tirer sur Alep. Sausan Ghosheh, la porte-parole de la mission, a mentionné que l'opposition armée syrienne était aussi en possession d'armes lourdes, dont des chars. A ce propos, elle a précisé que la situation humanitaire se détériorait dans la majorité des quartiers d'Alep, ajoutant qu'«il y a quelques civils qui sont pris au piège entre deux feux, il y en a d'autres qui cherchent refuge et abri dans des écoles, hôpitaux et bâtiments publics, et des quartiers plus sûrs». Elle a précisé qu'il y avait une pénurie de nourriture, de carburant, d'eau et de gaz, et a appelé toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue. En l'état actuel des choses, il est peu probable que son appel soit entendu.