Si les deux jours des fêtes de l'Aïd sont chômés et payés pour l'ensemble des travailleurs, c'est loin d'être le cas pour le monde du secteur du commerce, notamment les corporations des boulangers et des distributeurs des denrées de base qui s'autorisent une semaine de repos, voire plus. Ils ont décidé de mettre le valet sur le maillet. Et advienne que pourra. Leur activité relève du secteur «privé», disent-ils, et ils ne pensent nullement avoir tort en privant les gens de la pertinence d'un service public, d'autant que les ouvriers et autres tâcherons tiennent à rallier leur «bled» pour les fêtes. L'Ugcaa, quant à elle, nous a habitués à reconduire le même topo. La même rengaine. Mais les dispositions ne dépassent pas le cadre de son chargé de communication, à travers les communiqués d'avant-fête qui se veulent rassurants. Car la réalité est tout autre. Elle a beau dissiper la crainte des gens, liée à l'indisponibilité des produits alimentaires pendant les fêtes de l'Aïd el-Fitr. Elle a beau multiplier les appels à l'endroit des boulangers et autres gérants de supérettes sur la nécessité de ne pas fermer boutique, sinon à tour de rôle. Mais ces derniers ne l'entendent pas de cette oreille. Ils envoient valdinguer leurs chalands après avoir mis la clé sous le paillasson pendant une semaine, voire plus. Dans la capitale, la plèbe s'affole. Elle gare en procession devant les quelques boulangers qui assurent une panification au rabais, pendant que les trois-quarts des fournées attendent dans l'arrière-boutique les petits revendeurs pour les écouler au prix fort sur le trottoir. C'est devenu un secret de Polichinelle. La puissance publique laisse faire. Elle est en congé ou en fête pour ne pas dire démissionnaire. Et aucune mesure coercitive n'est envisagée par la tutelle à l'encontre des dupes fabricants de pain qui font une recette record en un temps record, bien entendu, au grand mépris de leur clientèle qui joue des coudes pour s'arracher une baguette. Un clin d'œil, toutefois, à nous autres consommateurs. Pendant qu'on peine à s'acheter une flûte ou une couronne, des tonnes de quignons sont ramassées chaque jour que Dieu fait par les agents de Netcom. Bizarre et déconcertant quand même ! L'eau minérale, cette denrée précieuse n'échappe pas à la règle de la loi de l'offre et de la demande, au même titre, d'ailleurs, que le sachet de lait qui a déserté les étals depuis plus d'un mois. Elle est monnayée chez l'épicier du coin qui tire de substantiels gains : 40 à 50 dinars la bouteille. Il majore le tarif de la bouteille de Youkous ou Saïda, car le distributeur censé l'alimenter lui a fait faux bond, tient-il à justifier à ses clients. Qui dit mieux ?