La décision unilatérale du roi du Maroc, Mohammed VI de supprimer le visa d'entrée aux Algériens a surpris plus d'un observateur à Alger. Pour les spécialistes algériens du dossier marocain, le Palais royal est allé un peu trop vite en besogne dans la mesure où les discussions, destinées à mettre de l'ordre dans les relations algéro-marocaines, n'ont encore débouché sur rien de concret. Pour étayer leurs propos, ces spécialistes rappellent que la commission mixte installée par les deux pays pour traiter leurs contentieux n'a toujours pas finalisé son travail. A l'heure actuelle, le Maroc n'a fourni aucun élément de réponse concernant les biens spoliés d'Algériens établis au Maroc. Il en est de même pour le dossier des Algériens emprisonnés dans les geôles du royaume après la chasse à l'homme déclenchée contre les ressortissants algériens, à la suite des attentats de Marrakech de 1994. Sans détenir des preuves tangibles, les autorités marocaines avaient accusé les services secrets Algériens d'avoir perpétré ces attentats. Et en guise de représailles, Rabat a décidé de manière unilatérale d'imposer un visa d'entrée aux Algériens. Une décision à laquelle Alger a répliqué en fermant sa frontière terrestre avec ce pays. L'empressement du Maroc d'annuler sa décision prise en 1994 est, ajoute-t-on, difficilement explicable en raison de la dégradation de la situation sécuritaire dans ce pays. Pour certains, un tel « geste » ne peut être expliqué que par « les difficultés internes liées à la panne de l'appareil économique du royaume » qui est bien illustré par le taux élevé du chômage. Il en est de même pour le secteur touristique qui est en souffrance depuis les « bouleversements » sécuritaires enregistrés ces dernières années dans ce pays voisin. Contentieux Cela dit, le Maroc semble avoir bien fait ses calculs, jugeant ainsi nécessaire de faire appel implicitement et d'une manière subtile au concours de l'Algérie. Mais, ainsi dire, les autorités algériennes ne se montrent pas très « chaudes » quant à cette approche marocaine du rapprochement voulu entre les deux nations. La position algérienne quant à la réouverture de sa frontière marocaine n'est pas encore arrivée à maturité, d'autant plus que les discussions entre les deux pays viennent de commencer. Le chef de la diplomatie algérienne, Abdelaziz Belkhadem, l'a confirmé hier, en précisant que ce dossier ne trouvera pas d'issue que dans le cadre du travail des deux commissions mixtes. « La question des frontières est examinée dans le cadre des deux commissions qui travaillent tant à Alger qu'à Rabat », a-t-il déclaré hier à l'APS. Est-ce que cela veut dire que l'Algérie voit d'un autre œil une telle décision, et par là ne veut pas se précipiter ? Cela semble être plausible. Aux yeux des observateurs, les autorités algériennes préfèrent attendre encore et aller étape par étape dans le cadre des concertations bilatérales. Dans cet ordre d'idées, la question de la réouverture des frontières algéro-marocaines, qui pourrait être prise par Alger dans l'esprit de réciprocité dicté par les bonnes mœurs diplomatiques, ne peut se faire qu'autour d'une table sur laquelle tous les contentieux seront traités ensemble.