Le rapport exige du département d'Etat de s'assurer du respect des droits de l'homme au Sahara occidental avant l'octroi de toute aide financière militaire au Maroc. Le département d'Etat américain a adressé au Congrès un rapport critique sur la violation des droits de l'homme par le Maroc au Sahara occidental. Ce rapport a été élaboré par le département de Hillary Clinton en application d'une loi adoptée en décembre 2011 par le Congrès américain, qui exige du département d'Etat de s'assurer du respect des droits de l'homme au Sahara occidental avant l'octroi de toute aide financière militaire au Maroc. Le département d'Etat américain a ainsi informé le Congrès que «la situation générale des droits de l'homme dans les territoires sahraouis soulève un certain nombre de sérieuses inquiétudes, dont les limitations à la liberté d'expression et de réunion, le recours à la détention arbitraire et les abus physiques et verbaux contre les détenus lors des arrestations et emprisonnements». Concernant les droits des individus à exprimer leur opinion sur le Sahara occidental, le rapport américain note que le Maroc considère que les revendications prônant l'indépendance du Sahara occidental constituent «une atteinte grave à la sécurité». «A ce titre, il existe des restrictions continues, en particulier pour les droits de réunion pacifique et les publications qui appellent à l'indépendance ou à un référendum qui inclurait l'indépendance comme option», constate le département d'Etat. Dans ce sens, il rapporte que «les grandes manifestations sur les droits de l'homme ou toute manifestation en faveur spécifiquement de l'indépendance des territoires sahraouis sont strictement interdites par la loi» au Maroc. Pire encore, ajoute le rapport, «les personnes arrêtées pour avoir protesté contre l'intégration du Sahara occidental au royaume du Maroc n'ont pas toujours bénéficié d'un procès public équitable». Aussi, «la distribution de tracts appelant à l'indépendance du Sahara occidental ou à un référendum qui inclurait cette option est interdite», poursuit le département d'Etat, qui précise que le gouvernement marocain «refuse également l'accès à des sites web à controverse, comme ceux prônant l'indépendance» du Sahara occidental. Tortures, censures et menaces au quotidien Le rapport – dont une copie a été obtenue par l'APS – n'a pas manqué par ailleurs de signaler que «la loi marocaine interdit aux citoyens d'exprimer leur opposition à la position officielle du gouvernement à l'égard du Sahara occidental». Aussi, affirme-t-il, «la plupart des médias et des blogueurs pratiquent l'autocensure sur cette question», tandis que «les blogueurs, qui suspectent être étroitement surveillés par les autorités marocaines, sont amenés alors à occulter leur identité». En conséquence, «les organisations non agréées ne peuvent ni accéder à des fonds publics ni accepter des contributions financières et ont des difficultés à obtenir l'autorisation pour organiser des réunions publiques», déplore le rapport, qui cite le cas notamment de l'Association sahraouie des victimes des violations graves des droits de l'homme (ASVDH) et du Collectif des défenseurs des droits de l'homme au Sahara occidental (Codesa). Dans son rapport adressé aux élus américains, le département d'Etat a également évoqué la visite effectuée au Sahara occidental, en août dernier, par une délégation de la fondation américaine Robert F. Kennedy pour la justice et les droits de l'homme (RFK Center) qui avait dressé, rappelle-t-on, un rapport accablant sur le Maroc pour sa violation des droits de l'homme des Sahraouis. La délégation de RFK Center, note le département d'Etat, a fait état dans son rapport «de graves violations des droits de l'homme commises au Sahara occidental». Echecs diplomatiques Le département d'Etat indique, en outre, que le gouvernement marocain applique des procédures strictes qui «limitent considérablement la capacité des ONG et des militants de rencontrer les journalistes», précisant que les journalistes étrangers doivent obtenir l'autorisation officielle préalable du ministère marocain de la Communication, avant de rencontrer des ONG favorables à l'indépendance du Sahara occidental. Pour enfoncer davantage le clou, le département d'Etat rappelle que «le Maroc refuse une présence permanente d'un bureau du haut-commissaire de l'ONU des droits de l'homme ou un mécanisme des droits de l'homme dans le cadre de la Minurso». A signaler que Rabat vient par ailleurs aussi d'essuyer un autre camouflet diplomatique concernant le même dossier. Quatre mois après avoir décidé de retirer sa confiance à l'émissaire de l'ONU au Sahara occidental, Christopher Ross, Rabat a en effet reculé et vient de décider d'accepter de nouveau l'envoyé spécial américain. M. Ross est attendu en octobre dans la région, où il devrait rencontrer les principaux acteurs du conflit. En mai dernier, le Maroc avait accusé M. Ross de mener un travail «partial et déséquilibré» – quelques semaines après un rapport des Nations unies sur cette zone conflictuelle – et annoncé qu'il lui retirait sa confiance. Le rapport de l'ONU mettait en cause des agissements (violation massive des droits de l'homme) des autorités de Rabat au Sahara occidental, occupé par le Maroc depuis 1975. Mais la décision de Rabat a été rejetée par l'ONU et par plusieurs pays. Christopher Ross avait été désigné en janvier 2009 émissaire spécial pour le Sahara occidental par le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon.