A 15 ou à 5, les membres du Conseil de sécurité n'arrivent toujours pas à s'entendre sur une attitude face à la crise du nucléaire iranien. On était loin mardi des déclarations ou de l'accord presque parfait annoncé la semaine dernière. Il n'était question alors que d'ultimes retouches, ce qui laissait supposer que l'accord était total. Mais la réunion mardi du Conseil de sécurité est venue rappeler que rien n'avait été conclu, et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, se faisait fort hier de réaffirmer que son pays était opposé à tout « ultimatum » dans la crise iranienne. « Nous restons opposés à un ultimatum visant l'Iran », a déclaré M. Lavrov à Pékin où il accompagne le président Vladimir Poutine, en référence à la possibilité que les Américains durcissent leur position. « Sortir du cadre de l'AIEA et poser d'abord le problème devant le Conseil de sécurité sont une erreur, car une évaluation professionnelle (des activités nucléaires iraniennes) ne peut être faite que par des inspecteurs de l'AIEA », a ajouté le chef de la diplomatie russe, au lendemain de la réunion en question. Moscou estime que le Conseil de sécurité doit se limiter à soutenir les initiatives de l'AIEA pour sortir de la crise, excluant de facto des sanctions contre l'Iran. Retour à la case départ pour le Conseil de sécurité contraint de reporter une séance de consultations formelles, qu'il avait prévue mardi, pour se donner le temps de surmonter des désaccords sur le texte d'une déclaration franco-britannique, ont indiqué les diplomates. « Nous avons demandé un report des consultations, pas pour réviser le texte mais pour poursuivre des discussions informelles sous différentes configurations », a déclaré à la presse l'ambassadeur britannique à l'ONU, Emyr Jones Parry. Il a précisé que lui et son homologue français, Jean-Marc de La Sablière, estimaient inutile d'amender leur projet de texte sans une bonne perspective d'accord. « S'il n'y a pas la perspective d'un accord, nous n'amenderons pas le texte », a-t-il dit. Auparavant, un diplomate occidental avait indiqué que le report des consultations avait été décidé pour laisser le temps à la France et à la Grande-Bretagne de rédiger une nouvelle version du texte actuellement en débat au Conseil, qui tienne compte des objections de la Russie et de la Chine. « Les Russes veulent un texte plus général, qui ne fasse pas référence aux menaces à la paix et à la sécurité internationale » constituées par le programme nucléaire iranien, avait-il indiqué. En langage onusien, une référence explicite à de telles menaces impliquerait de facto que le Conseil pourrait envisager des sanctions. Cet échec est intervenu au lendemain d'une réunion infructueuse, lundi à New York, entre hauts responsables diplomatiques de ses cinq membres permanents (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie) et de l'Allemagne. Cette réunion n'avait débouché sur aucun consensus, que ce soit sur ce texte, ou sur une stratégie pour la suite au cas où Téhéran n'obtempérerait pas. L'Allemagne était présente, car c'est l'un des trois pays européens - avec la France et la Grande-Bretagne - à avoir négocié sans succès durant 3 ans au sein de la Troïka européenne (UE3) avec Téhéran sur le dossier nucléaire iranien. Forte de ce constat, la diplomatie déploie tout son talent, et se frayer une porte de sortie. « Nous avons jugé que la méthode la plus efficace était de revenir aux consultations informelles, bilatérales ou en petits groupes, de recueillir l'opinion des autres gouvernements et de faire le point après les discussions d'hier soir », a déclaré l'ambassadeur américain, John Bolton. « C'est juste une manière différente d'avancer », a dit M. Bolton. Et d'ajouter qu'il s'attendait à une réunion formelle du Conseil « dans les deux jours qui viennent ». Le texte en discussion doit en principe être une déclaration du président du Conseil, non contraignante, mais dont l'adoption exige l'unanimité de ses 15 membres. Bien qu'affichant leur unanimité sur l'objectif - empêcher l'Iran de devenir une puissance nucléaire militaire - les Occidentaux d'une part, la Russie et la Chine de l'autre, divergent fondamentalement sur le rôle que doit jouer le Conseil de sécurité dans cette crise. Et en fait, chaque camp, puisqu'il faille les considérer ainsi, considère les choses à sa manière comme cette notion de délai laquelle ne peut être accompagnée que par celle de l'urgence. Ou encore de sécurité internationale, ce qui suppose un recours au fameux chapitre 7 de la Charte de l'ONU et ses implications comme la possibilité de recourir à la force.