Le Premier ministre libyen, Ali Zeidan, a présenté, hier, une proposition du gouvernement de «coalition» auprès du Parlement libyen, qui doit encore l'approuver. Le fait inattendu est qu'il ait fait appel à d'anciens responsables du régime d'El Gueddafi. Pour éviter de faire des mécontents, Ali Zeidan, élu Premier ministre à la mi-octobre par le Congrès national général (CNG), a néanmoins précisé que la liste comprenait des représentants des deux principales forces politiques du pays : l'Alliance des forces nationales (AFN) et le Parti pour la justice et la construction (PJC), la branche libyenne des Frères musulmans (17 sièges). Au plan politique, le Premier ministre est surtout soutenu par l'AFN (39 sièges), la coalition hétéroclite présentée comme étant à prédominance libérale que mène l'ancien Premier ministre de transition, Mahmoud Jibril. Ce sont toutefois les 120 parlementaires indépendants qui détiennent la clé du soutien du CNG, qui compte 200 sièges. A la surprise générale donc, les ministères régaliens du nouveau gouvernement ont été confiés à des indépendants qui ont en commun d'avoir travaillé sous l'ancien régime. Au ministère de l'Intérieur, M. Zeidan a nommé Achour Chwayel, 58 ans, un docteur en droit qui a travaillé dans la police durant 35 ans. Le portefeuille de la Défense a été attribué à Mohamed Al Barghathi, 71 ans, un pilote de guerre en retraite depuis 1994 et qui a été parmi les premiers officiers à rejoindre la rébellion dès le déclenchement de l'insurrection en février 2011 à Benghazi. Le ministère des Affaires étrangères a été confié à l'ambassadeur de Libye aux Etats-Unis, Ali Al Oujli, 65 ans, un diplomate qui a 45 ans de carrière. Abdelbari Al Aroussi, un docteur en environnement, de la ville de Zawiyah, a été proposé au ministère stratégique du Pétrole. M. Zeidan a proposé par ailleurs de créer un nouveau ministère du Tourisme avec à sa tête une femme, Ikram Bach Imam. S'il est accepté, le futur gouvernement doit remplacer celui du Premier ministre sortant Abdelrahim Al Kib, en poste depuis novembre 2011. Selon le plan de transition, le nouveau gouvernement aura un mandat d'un an jusqu'à la tenue de nouvelles élections sur la base d'une nouvelle Constitution dont la rédaction se fait attendre. En présentant son programme devant le CGN le 14 octobre, M. Zeidan a précisé que la construction d'une armée et d'une police sera «la priorité de ses priorités». Les tractations autour de la composition du nouveau gouvernement interviennent alors que la situation sécuritaire dans le pays est des plus préoccupantes. L'armée et les forces de sécurité, composées de milices, n'obéissent toujours pas à un centre de décision unique. Le constat a d'ailleurs contraint récemment Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères français, à reporter une visite à Tripoli. Les spécialistes de la Libye les plus optimistes soutiennent qu'il faudra entre 3 et 10 ans pour que l'ex-Jamahiriya commence à renouer avec la stabilité.