Algérie Télécoms (AT) est née à la faveur de la restructuration du secteur des postes et télécommunications. L'opérateur historique est, comme l'explique M. Ahmed Kehili, directeur du marketing et du contrôle de la qualité au sein d'AT, " le produit des réformes initiées par l'Etat dans le domaine des télécommunications pour ouvrir ce secteur à la concurrence ". Ce n'est cependant qu'en 2003 qu'elle change de statut pour devenir une société par actions (SPA). " La levée de monopole a eu lieu en plusieurs phases et avant d'ouvrir le marché, il y a eu ce qu'on appelle la déclaration de politique sectorielle (DPS) qui a été faite par le gouvernement. Celle-ci prévoit d'ouvrir les marchés du mobile, du VSAT, du GMPCS, du fixe, pour arriver en dernier lieu à l'ouverture du capital d'AT " a souligné M.Kehili. Jusqu'à maintenant toutes les étapes de la DPS ont été réalisées. Il ne reste plus que l'ouverture du capital d'Algérie Télécoms. Les premiers pas d'AT dans un marché libéralisé ont été plutôt chancelants. AT donnait l'image d'un opérateur dépassé par la levée du monopole. Pourtant, cette entreprise avait un patrimoine infrastructurel qui faisait d'elle un passage incontournable pour tout opérateur qui voulait investir dans les télécommunications en Algérie. Ce patrimoine est évalué à 4 milliards de dollars. M.Kehili relèvera que AT peut s'enorgueillir " d'offrir toute son infrastructure pour tout le monde que ce soit pour Mobilis ou Djezzy, ou Wataniya, l'EEPAD". La réalisation de tels investissements a nécessité plus de vingt ans. Rien que le backbone, il coûte 2,5 milliards de dollars ". Mais après avoir longtemps navigué à vue, AT a réussi à retrouver ses repères. En témoigne sa position actuelle sur le marché. Selon M.Kehili, " globalement , AT détient actuellement entre fixe et mobile plus de 50% du marché. Sur le fixe nous avons 100%. Sur le mobile nous avons à peu près 40% du marché ". Elle est aussi passée en un an et demi de 50 000 abonnés dans le segment de la téléphonie mobile à 5,2 millions d'abonnés. Pour ce qui est du fixe le nombre de ses abonnés a atteint 3,1 millions. " Nous avons d'autres activités comme la voix sur IP, le réseau VSAT, la publiphonie, AT est le seul opérateur qui offre toute la gamme de produits " indiquera non sans fierté M.Kehili. Concurrents et partenaires Notre interlocuteur assurera que les relations d'AT avec les autres opérateurs se sont nettement améliorées ses derniers temps après le règlement des conflits notamment ceux liés aux coûts de l'interconnexion. " Les gens qui sont entrés sur le marché sont nos concurrents , en même temps qu'ils sont nos clients. Ils nous prennent les abonnés mais ils achètent chez nous pour pouvoir travailler. Il en est de même pour l'Internet " soulignera encore M.Kehili. Ce dernier fera savoir qu'AT a revu à la baisse tous Les prix du catalogue qui étaient " au début ceux d'AT au moment où elle avaient le monopole " mais, a-t-il poursuivi, " AT se devait de s'adapter au marché donc aller vers la vérité des coûts ". Le catalogue actuellement sur le site Internet d'AT est validé par l'autorité de régulation, relèvera-t-il. Mais il n'y a pas que les coûts de l'interconnexion qui ont été revu par AT. Il en est ainsi des de ceux de l'énergie, de la colocalisation " qui étaient excessivement chers " reconnaîtra M.Kehili. Selon lui, AT fait évaluer les prix vers la vérité des tarifs tout en essayant de ne pas casser son équilibre financier. Elle met à la disposition des autres opérateurs 6000 liaisons. Les relations avec les concurrents et partenaires d'AT sont donc au beau fixe y compris avec le nouveau venu de la téléphonie fixe Consortium Algérien des télécoms (CAT), dont la marque commerciale a été lancée récemment. La concurrence dans ce domaine ne fait pas peur à l'opérateur historique, soutiendra M.Kehili. " Nous sommes mieux disant, car il loue l'infrastructure d'AT donc il sera forcément plus cher " avancera-t-il à ce propos. Pour lui, il n'est pas question de faire des concessions sur les prix. " On nous a demandé de ne pas jouer la guerre des prix, ils ont peur de cette guerre. Ils veulent qu'on s'entende sur un prix or ce n'est pas possible car ça sera au détriment des abonnés. On ne peut pas augmenter les tarifs, on veut au contraire les baisser " a-t-il argumenté. En somme, AT est en position de leader, ce qui fait d'elle une entreprise convoitée. Ouverture du capital Beaucoup d'opérateurs étrangers auraient manifesté leur intérêt auprès de la banque Santander, qui a été sélectionnée pour accompagner l'ouverture du capital d'AT. Cette institution financière a commencé par faire une évaluation d'Algérie Télécoms. Dans une deuxième étape, elle va vendre l'image d'AT. Actuellement la question qui se pose est : à quel taux ouvrir le capital d'AT ? La décision revient en dernier lieu au Chef du gouvernement et au Chef de l'Etat. Une fois qu'ils auront décidé , la procédure sera enclenchée. " En fait ce n'est pas les actions qu'on vend, l'acquéreur va au contraire contribuer à l'augmentation du capital d'AT. Déjà aujourd'hui nous sommes la troisième entreprise après Sonatrach et Naftal. Avec l'ouverture du capital d'AT on pourra devenir deuxième " a relevé M.Kehili. Et d'ajouter : " beaucoup on été impressionnés par les indicateurs : très peu d'endettement, une bonne santé financière, une bonne progression du chiffre d'affaires (CA). Avant 2004, l'évolution du CA était de 2 à 5%. On a introduit 12 nouveaux produits. On a fait dix nouvelles offres tarifaires. Le taux de progression de Mobilis est plus important actuellement. Dans tous les autres services, tel que l'Internet, la voix sur IP ; le fixe, nous avons de bonnes part du marché ". Pour se maintenir en pole position, AT ne lésine pas sur les moyens. L'année dernière, elle a investi 30 milliards de dinars. Le même montant sera investi en 2006. AT a amorcé un nouveau plan stratégique, selon M.Kehili. Il consiste en un repli vers le réseau. " Même si on perd un peu au niveau des abonnés, nous avons toujours ce backbone. C'est notre métier qui change. Il se déplace de l'abonné vers le réseau. La structure du chiffre d'affaire aussi change. Avant c'était 100% vers les abonnés" a-t-il conclu.