Didine Karoum fait de plus en plus parler de lui dans le milieu artistique, surtout à l'issue de la sortie de son dernier opus mis sur le marché en novembre 2005 et qui culmine au niveau des statistiques des meilleures ventes. Neuf chansons figurent dans ce dernier produit qui confirme, pour ceux qui ont suivi l'évolution de sa carrière, le niveau de perfection atteint par Didine tant sur le plan de l'interprétation que de la maîtrise instrumentale, après une expérience de quelque 25 années d'activité. Ce CD, qui est pour ainsi dire la synthèse d'un travail de longue haleine entamé dès l'âge de quinze ans, souligne encore davantage la personnalité artistique d'un élément qui s'est forgé sur le tas, en parfait autodidacte, avant de s'affirmer comme étant l'un des plus doués représentants de la nouvelle vague chaâbi sur laquelle repose la lourde responsabilité de porter le témoin laissé par les grands maîtres. Ce n'est pas une mince affaire lorsqu'on sait qu'entre le chaâbi d'hier et celui d'aujourd'hui, les générations de mélomanes se sont inscrites dans l'air du temps, s'adaptant aux nouvelles tendances, aux nouveaux styles, sans cependant sacrifier à ce qui constitue l'essence même ( le label traditionnel) de cette musique populaire par excellence qui commence, depuis le retour à la stabilité du pays, à revivre comme autrefois. « Quand on me demande où se situe aujourd'hui Didine, je réponds invariablement : à cheval sur deux générations. Et cela pour deux raisons : quand on est chanteur chaâbi, on est qu'on le veuille ou pas dépositaire d'un héritage précieux qui doit être enrichi et sauvegardé. Ensuite, il y a l'impératif effort à faire pour répondre à l'attente d'un public, généralement jeune, dont la particularité est d'exiger le changement dans la continuité. Il faut donc savoir innover, sortir de l'ordinaire, jouer avec la forme sans toucher au fond. » Cette profession de foi, Didine la vit au quotidien en essayant de gérer une carrière qui semble lui ouvrir les perspectives les plus prometteuses. Au demeurant,dans un style un peu capricieux, mais néanmoins très rigoureux au niveau de l'orchestration, et porté par une voix qui aime bien fignoler, on relève chez l'artiste dans ce CD qui se laisse écouter, ce souci de se conformer aux normes préétablies tout en se libérant des contingences par trop encombrantes. Un exercice très périlleux qu'il faut savoir négocier. On y trouve partout une belle harmonie, résultat d'une complicité musicale qui s'est beaucoup développée dans les fêtes familiales ou Didine se sent à l'aise. L'enfant de Kouba, qui a consacré une chanson affective à son quartier natal, là où il a appris encore adolescent et à la lumière d'un lampadaire public à gratter sur une mandole, ne compte pas en rester là. Son projet, c'est de s'attaquer désormais aux quacidate en les mixant avec des chansonnettes pour équilibrer ses productions futures. « Je suis avant tout un interprète chaâbi dans le sens le plus noble du terme. Je suis donc pour l'authenticité de cet art qui est loin d'être immuable lorsqu'on fait preuve de créativité », dit-il. De la petite école de Fen Ouel Adeb où il a fait ses premières classes sous la conduite de Mustapha Boutriche, aux studios d'enregistrement où il sort un album par an, en n'oubliant pas le long passage annabi où il a fait aimer le chaâbi à ses nombreux admirateurs, le parcours de Didine paraît atypique et en même temps très conventionnel. Il peut le mener encore loin dans la célébrité...