Malgré les appels à la raison de la communauté internationale, la crise s'exacerbe en Centrafrique. Les rebelles du Séléka ont pris, dans la nuit de vendredi à samedi, deux nouvelles villes, Alindao et Kouango, dans le centre du pays. Cette offensive intervient alors que des négociations devraient avoir lieu à Libreville cette semaine. «Les rebelles ont pris deux villes près de Bambari (déjà théâtre d'affrontements et contrôlée par les rebelles) : Alindao et Kouango. Cela montre leurs velléités à faire la guerre même quand il y a des négociations», a déclaré à la presse le ministre centrafricain de l'Administration territoriale, Josué Binoua. Alindao, une ville de 40 000 à 50 000 habitants, est située à une centaine de kilomètres au sud-est de Bambari tandis que Kouango, ville plus petite, se trouve à une centaine de kilomètres au sud de Bambari mais dans un cul-de-sac routier se terminant sur le fleuve Oubangui qui marque la frontière avec la République démocratique du Congo. Eu égard à leur faible intérêt stratégique, la prise de ces deux villes – éloignées de Bangui – est beaucoup plus à considérer comme une démonstration de force du Séléka dans la perspective de la rencontre de Libreville. Celui-ci se donne visiblement les moyens de négocier en position de force afin de tirer son épingle du jeu. Ces négociations auront lieu mardi dans la capitale gabonaise entre le gouvernement centrafricain et la rébellion du Séléka sous l'égide de la Communauté des Etats de l'Afrique centrale (CEAC). Ces pourparlers avaient été proposés la semaine dernière par le président centrafricain, François Bozizé, dont le départ est la principale revendication du Séléka qui a lancé une offensive à la mi-décembre et contrôle désormais la majeure partie du pays. «Il y aura trois délégations de 15 membres. Pouvoir, rebelles, opposition. Soit 45 personnes au total», a encore affirmé le ministre de l'Administration territoriale. «La présence de la société civile n'est pas encore actée», a-t-il ajouté. Le président Bozizé venant en tant que chef d'Etat, la délégation du pouvoir sera conduite par le ministre d'Etat de l'Enseignement supérieur, Jean Willybero Sacko, et comprendra aussi des membres du parti présidentiel KnK (Kwa na Kwa, «le travail, rien que le travail») et d'autres personnalités, a souligné le ministre de l'Administration territoriale qui sera également du voyage. Cette délégation partira aujourd'hui pour Libreville. De son côté, la délégation rebelle sera composée d'une dizaine de membres de l'Alliance Séléka. Selon le ministre, cette délégation comptera aussi quatre représentants des groupes politico-militaires, les ex-rebelles, qui adhèrent toujours au processus de paix. De source de la CEAC, qui a organisé leur voyage, le chef du Séléka, Michel Djotodia, son porte-parole, Eric Massi, Florian Ndjadder et Djouma Narkoyo feront partie de la délégation qui arrivera à Libreville aujourd'hui. La délégation de l'opposition sera, quant à elle, conduite par l'avocat Nicolas Tiangaye, la présence du principal opposant Martin Ziguélé étant aussi annoncée. Le Conseil de sécurité de l'ONU a, rappelle-t-on, demandé vendredi aux deux parties de négocier «de bonne foi» et sans conditions préalables. Il a réitéré sa demande aux rebelles de «cesser les hostilités, de se retirer des villes prises et de cesser leur progression» vers Bangui. Une demande restée jusque-là lettre morte.