Une nouvelle affaire impliquant Farid Bedjaoui est actuellement au niveau du parquet d'Alger, apprend-on de source sûre. La justice se penche sur le marché de construction de la centrale électrique de Hadjret Ennous, à Tipasa, obtenu par SNC-Lavalin auprès de Sonelgaz en 2005 pour un montant de 826 millions de dollars. Alors que la délégation constituée de magistrats et d'officiers de la police judiciaire vient d'obtenir un accord pour se déplacer en Italie, dans le cadre de l'affaire Sonatrach 2, liée aux contrats avec Saipem, le parquet d'Alger vient de se saisir d'un autre dossier en relation avec le marché de construction de la centrale électrique de Hadjret Ennous à Tipasa par le groupe canadien SNC-Lavalin au profit de Sonelgaz, apprend-on de source sûre. Il y a quelques semaines, M. Boutarfa, PDG de Sonelgaz, avait nié, dans une conférence de presse, toute malversation ou corruption dans l'octroi de ce marché. Cependant, nos interlocuteurs affirment que ce contrat qui porte sur un montant de 826 millions de dollars a été attribué grâce aux «bons offices» de Farid Bedjaoui, celui que Chakib Khelil, ancien ministre de l'Energie, présentait comme conseiller financier. Un contrat qui, faut-il le préciser, fait l'objet d'une autre enquête au Canada, pays où les responsables de SNC-Lavalin ont recouru aux «services» de Farid Bedjaoui pour leurs activités en Algérie qui, en moins de dix ans, leur ont rapporté plus de 6 milliards de dollars. Les soupçons pèsent sur le coût réel de ce marché attribué «dans des conditions contestables» au groupe canadien. Selon nos sources, c'est Chakib Khelil qui aurait facilité la transaction une fois les négociations menées par Farid Bedjaoui avec les responsables de SNC-Lavalin terminées. C'est également dans les mêmes circonstances et avec le concours de Farid Bedjaoui que Chakib Khelil aurait attribué au groupe canadien, de gré à gré, les études et l'exécution des prestations de suivi, de contrôle et de coordination des travaux de construction de la ville de Hassi Messaoud, en 2008, moins de trois ans plus tard, pour un montant de 38,152 milliards de dinars. Le recours à la procédure de gré à gré avait suscité à l'époque de lourdes interrogations. Aujourd'hui, Farid Bedjaoui et Khaldoun Khelil (fils de Chakib Khelil avec lequel il est associé) gèrent pour plus de 8 milliards de dollars d'actifs au Moyen-Orient et en Asie, grâce aux affaires conclues en Algérie, notamment dans le secteur de l'énergie. Bedjaoui aurait privilégié une sélection de sociétés spécialisées originaires de Syrie, avec lesquelles l'épouse de Chakib Khelil est associée, ou alors du Liban, grâce à la famille de l'épouse (fille de l'ancien ministre libanais de la Défense) de Farid Bedjaoui qu'il imposait, semble-t-il, comme sous-traitant à Saipem, mais aussi à d'autres compagnies qui décrochent un contrat. Selon nos interlocuteurs, en Algérie, «les mises en relation» d'affaires auraient rapporté à Farid Bedjaoui un pactole de près de 800 millions de dollars, une grande partie de cet argent aurait été investie dans l'immobilier en France, en Espagne et à Dubaï. Il possède une propriété de 3000 m2 à Emirates Hills, une des zones les plus prestigieuses des Emirats, et des biens au Canada d'une valeur de 3,7 millions de dollars. Agé d'à peine 44 ans, Farid Bedjaoui a su tirer profit de la position de son oncle (ancien ministre des Affaires étrangères) pour s'introduire dans les affaires. Son nom est cité pour la première fois dans le scandale de l'autoroute Est-Ouest, lorsque son oncle était à Paris en tant que représentant de l'Unesco et qu'il a aidé Pierre Falcone à introduire les Chinois en Algérie. Il commence à s'intéresser aux affaires du secteur de l'énergie avec l'envolée des prix du pétrole, au début des années 2000. Il s'associe avec le fils de Chakib Khelil et renforce sa relation avec ce dernier, jusqu'à devenir son conseiller financier. Si pour l'instant les soupçons pèsent sur les contrats attribués à Saipem et SNC-Lavalin, nos sources n'écartent pas d'autres scandales au cœur desquels se trouveraient des compagnies américaines, très privilégiées par l'ancien ministre. Nous y reviendrons.