Une colonne classique de 5500 hommes venant de Bougie, constituée de cavalerie, d'infanterie et d'artillerie, est arrivée à Ouzellaguen le 25 juin 1851. Sadki Abdelaziz, historien spécialiste de l'Algérie du XIXe siècle, a animé vendredi 15 mars à Ighzer Amokrane une conférence-débat sur «la grande bataille d'Ouzellaguen contre les français». L'invité de l'association des activités de jeunes Horizons a replongé les nombreux présents dans la bibliothèque communale dans l'ambiance d'une bataille méconnue remontant aux 25 et 28 juin 1851. Ses sources, il les puise particulièrement des archives françaises. «Il s'agit essentiellement des deux rapports du Général Camou, destinés au Gouverneur général par intérim, le Général Pélissier et des rapports des Bureaux arabes de Bougie, Sétif et Aumale», fera-t-il remarquer. Et pour mieux planter le décor, l'orateur projeta sur écran, grâce au Data Show, des photos d'officiers français, des cartes géographiques d'époque et des croquis de l'instance militaire coloniale se rapportant à cet épisode guerrier dont on ne parle plus. Jusque-là, la tribu (ou Arch) d'Ouzellaguen était divisée en trois fractions constituées de cinq villages chacune : la fraction d'Ibouziden (Tazrout, Cheurfa, Ighil Oudlès, Tizi Maghlaz et Ibouziden), la fraction d'Ifri (Isgouan, Timilyiwine, Ighbane, Imahjadhene et Ifri) ainsi que la fraction de Tighilt (Nasroune, Tighzirt, Chehid, Fournane et Tighilt Lahfir). L'assistance apprendra que cette bataille était terrible malgré le soutien des voisins alliés. Aux nombreux morts s'ajoute la destruction de tous les villages dont deux ne seront jamais reconstruits : Ighil N'Tara et Taourirt. Pourquoi et comment s'est déroulée cette grande bataille? Le conférencier affirme qu'une colonne classique de 5500 hommes venant de Bougie, constituée de cavalerie, d'infanterie et d'artillerie, arrive à Ouzellaguen le 25 juin 1851. En face, les forces kabyles rassemblaient quelque 700 à 800 combattants dotés d'un armement qui se résumait à quelques fusils variables. «En toute logique, le commandement revient à Boubaghla qui s'est présenté en avant-garde avec ses cavaliers et ses fantassins sur la position dominante d'Ighil N'Tara et qui donnait une vue panoramique sur la vallée de la Soummam. Il pouvait, par conséquent, surveiller l'approche et la progression de la colonne et décider des dispositions tactiques», soulignera-t-il. Il ajoutera que la tactique des français consistait à attaquer en trois colonnes les kabyles qui restaient sur la défensive : une colonne attaque par la gauche, une deuxième par le centre et une troisième par la droite. «L'objectif des troupes françaises, conduites par les généraux Camou et Bosquet, était de contourner les kabyles, les enfermer et capturer Boubaghla à Ighil N'Tara», dira M. Sadki. L'on apprendra que le premier combat a été livré à Taourirt. S'ensuivit, malgré une sérieuse résistance, la destruction de tous les villages de la fraction de Tighilt par la colonne de droite. «À Ighil N'Tara le combat, confirmé par les rapports du Général Camou et les croquis du Capitaine Balland, fait ressortir une forte résistance et la cavalerie fut stoppée net. Il aura fallu l'arrivée en renfort des 1400 hommes de la colonne de gauche pour que le village soit pris et détruit», précisera l'historien. Selon ses recherches, les Kabyles, à leur tête Boubaghla, remontent à Ighil Oudlès pour s'y retrancher. Ils réussiront même à repousser l'ennemi en contre-attaquant. Les troupes de l'armée coloniale étaient contraintes de mettre pied à terre et battre en retraite. Mais le véritable sort de la bataille se jouera à Ibouziden. Le médiateur Ben Ali Cherif entrera alors en scène et invitera, dans une lettre, les Ouzellaguen à se soumettre, en vain. «Les français changent de tactique. Ils se remettent en marche le 28 juin très tôt le matin en direction d'Akbou pour tromper les kabyles mais bifurquent vers Ibouziden. La résistance était tellement forte que les français eurent recours à l'artillerie lourde pour pilonner les villages alentours», ajoutera le tribun. C'est ainsi, conclura-t-il, que «les Ouzellaguen durent se soumettre après que tous leurs villages soient détruits et leurs oliveraies dévastées. Si les pertes subies par les kabyles sont nombreuses, les français compteront dans leurs rangs neuf morts, dont trois officiers et vingt deux blessés».