A une année de l'élection présidentielle de 2014, l'Algérie est anormalement suspendue à la décision du chef de l'Etat de briguer ou non un quatrième mandat. La situation politique n'a jamais été aussi plombée. Tout semble à l'arrêt. La seule actualité est faite de scandales de corruption et de kidnappings d'enfants. Après 14 ans de règne de Abdelaziz Bouteflika et son équipe, l'Algérie se retrouve toujours à la case départ en ratant l'occasion historique de sortir définitivement de l'engrenage de la crise politique et économique qu'elle vit depuis des années. C'est donc dans un tel contexte qu'est venue la sortie, hier, d'un conseiller à la Présidence (qui a préféré garder l'anonymat) dans les colonnes de notre confrère El Khabar. Les confidences de ce responsable à la présidence de la République sont un véritable concentré de messages destinés à une l'opinion nationale choquée par l'ampleur de la pratique de la corruption ces dernières années en Algérie et le climat politique qui prévaut dans le pays à 12 mois d'un rendez-vous électoral aussi important que l'élection présidentielle. Le premier est lié au projet de révision de la Constitution. Selon la source du journal El Khabar, le président Bouteflika veut instituer le poste de vice-Président. Argument avancé : pour que le pays «ne vive plus la situation qu'il a eu à vivre après la démission de défunt président Chadli Bendjedid, le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, pense qu'il est nécessaire d'instituer le poste de vice-Président pour le remplacer en cas de démission». Surprenante indiscrétion ! La question qui se pose d'emblée est : envisage-t-il une telle éventualité ? Compte-t-il réellement démissionner pour évoquer un tel cas de figure en ce moment précis ? Le conseiller à la Présidence informe ensuite sur l'humeur du Président qui, selon lui, «vit très mal les problèmes qui secouent le pays». «Il ne se passe pas un jour sans qu'il ne reçoive de mauvaises nouvelles. Les scandales de Sonatrach l'ont vraiment touché», indique encore le responsable de la Présidence, qui n'a pas manqué d'aborder la question du quatrième mandat. «Si vous le lui (le président Bouteflika) demandez, il vous répond : je ne veux pas m'éterniser au pouvoir. Non pour des raisons de santé, explique le conseiller anonyme de la Présidence, mais parce que la situation du pays n'est pas rassurante.» En 2009, ajoute la même source, Abdelaziz Bouteflika avait répondu «à l'appel de l'Algérie profonde» et «si cet appel est, selon lui, renouvelé, il y pensera et étudiera la demande». Mais, indique-t-il, «toute la question repose sur l'existence de forts arguments qui convaincront le Président d'accepter de prolonger son règne». Le conseiller conclut, toutefois, que le chef de l'Etat se contentera, c'est sa conviction personnelle, de «trois mandats». Sauf qu'il ne ferme pas totalement la porte devant l'éventualité d'un quatrième. Donc pas si sûr qu'il n'ait pas l'intention de perpétuer son pouvoir, ou du moins celui de «ses proches» en pesant de tout son poids sur sa succession. Sinon, pourquoi insisterait-il autant sur la révision de la Constitution qui consisterait à introduire dans la Loi fondamentale la vice-Présidence ? Son conseiller, qui dit aussi que le président Bouteflika «n'est pas satisfait du bilan de 14 ans au pouvoir», explique l'absence du chef de l'Etat des activités officielles en arguant que ce dernier préfère des rencontres officieuses avec ses ministres aux Conseils des ministres. On apprend également que le Président n'a rien à voir avec les crises au sein du Front de libération nationale (FLN) et du Rassemblement national démocratique (RND) ni dans la destitution des deux responsables que la source de notre confrère El Khabar considère tout à fait «naturelle». A lire les propos du conseiller à la Présidence, le président se plaint des ministres qui n'appliquent pas son programme. Ce sont donc ceux-là, qu'il a d'ailleurs maintenus, qui ont empêché le bon fonctionnement de la République. Tel que cela a été présenté, le chef de l'Etat veut se mettre au-dessus de la mêlée. Une manière de se soustraire à la responsabilité des problèmes dans lesquels patauge l'Algérie.