Le chef de la diplomatie burkinabé, Djibril Bassolé, et les partenaires internationaux (ONU, UA et Cédéao) se sont une nouvelle fois réunis, hier à Ouagadougou, les représentants du pouvoir malien et ceux des groupes armés touareg pour relancer les négociations directes suspendues mardi dernier. Les populations du Nord malien sont représentées à ces négociations par une délégation conjointe du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et du Haut-Conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA). Lancées le 8 juin par le président burkinabé Blaise Compaoré, médiateur régional, ces tractations ont pour objectif de permettre un retour de l'armée malienne dans la ville de Kidal, dans la perspective de l'élection présidentielle prévue le 28 juillet prochain dans tout le Mali. Les rebelles touareg se sont installés, fin janvier, à Kidal à la faveur de l'intervention militaire française contre les groupes terroristes armés liés à Al Qaîda. Les djihadistes avaient pris, en 2012, le contrôle du nord du Mali, s'alliant d'abord au MNLA qui avait lancé l'offensive, avant d'évincer ce mouvement dans la région. Il s'agit désormais de rediscuter le texte élaboré ces derniers jours et accepté par les mouvements touareg, mais néanmoins rejeté en l'état par Bamako. L'émissaire principal des autorités maliennes, l'ancien ministre Tiébilé Dramé, a rallié à nouveau jeudi soir la capitale burkinabé. «Nous sommes pour la paix, mais une paix qui défende les intérêts du Mali», a-t-il expliqué à la presse. Il compte pour la première fois dans sa délégation des militaires, trois officiers de l'armée malienne. «Mais ça n'a rien de belliqueux», a-t-il assuré, précisant qu'ils devraient participer à la définition des «modalités concrètes du déploiement de l'armée malienne à Kidal» en cas de conclusion d'un accord. Les représentants de Bamako espèrent un compromis «avant le week-end (aujourd'hui et demain, ndlr), ou au plus tard pendant le week-end», a indiqué une source proche de cette délégation. Les tractations intenses menées par Djibril Bassolé et ses soutiens internationaux, qui ont rencontré mercredi dernier à Bamako le président malien par intérim, Dioncounda Traoré, ont jusque-là échoué à convaincre le régime malien de signer l'accord mis au point à Ouagadougou. Attendu en début de semaine, un accord n'est désormais plus espéré avant quelques jours. Selon des participants, les négociations bloquent surtout du côté du pouvoir malien sur le calendrier du cantonnement et du désarmement des combattants touareg et sur les poursuites judiciaires engagées contre des chefs rebelles, dont Bamako refuse la suspension prévue dans le projet d'accord. Le régime de Bamako rejette aussi l'usage du terme «Azawad», par lequel les autonomistes touareg désignent la région septentrionale du Mali. Malgré le souhait de Bamako de revoir une grande partie du texte du projet d'accord, un projet que pourtant beaucoup de monde qualifie de «bon», les autorités françaises en charge du dossier malien semblaient tout de même, hier, persuadées que la situation allait vite se débloquer. A ce propos, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, s'est dit optimiste sur l'issue des discussions. «Je suis optimiste sur la suite, il y aura un accord», a-t-il assuré sur les ondes de la radio RFI. «Il serait d'ailleurs invraisemblable que l'ensemble de ces acteurs ne trouvent pas un point de consensus pour la garantie de l'unité de ce pays, y compris par rapport à ce qu'a fait la France pour ce pays», a observé M. Le Drian. «Il y a un seul Mali qui va aller voter, on votera partout, y compris à Kidal», a insisté encore le responsable français, en allusion à la présidentielle malienne dont le premier tour est prévu le 28 juillet prochain. L'optimisme affiché par Paris n'est cependant pas partagé par certains observateurs présents à Ouagadougou. Un diplomate participant aux discussions s'est carrément montré pessimiste. «Le gouvernement à Bamako est fragile, l'opinion est surchauffée. Finaliser un accord risque de prendre du temps», a-t-il affirmé. Selon des observateurs internationaux, ce pessimisme se justifie assez dans la mesure où, en effet, «il ne sera pas évident non plus de demander aux représentants des Touareg d'accepter de faire de nouvelles concessions du fait qu'ils ont déjà cédé sur de nombreux points importants». Mais d'après la même source, la plus grande crainte est de voir la transition au Mali «coincée entre la communauté internationale, l'auteur du coup d'Etat qui tient à donner son avis, les exigences de la classe politique malienne et une campagne présidentielle déjà lancée».