Les islamistes algériens semblent galvanisés par la victoire de leurs «frères» en Egypte et en Tunisie. «Nous aussi nous voulons diriger le pays», a déclaré le tout nouveau président du MSP, Abderrezak Makri, avant-hier, à Boumerdès. Cette confession a été faite lors d'un important regroupement ayant consacré «l'unité tant souhaitée» entre son parti et le Front du changement (FC) présidé par Abdelmadjid Menasra. Cet important conclave a eu lieu à l'hôtel Soummam et a vu la participation de centaines de militants et militantes des deux formations politiques. L'objectif étant de signer le premier acte qui mettra un terme au conflit qui couve entre les deux frères ennemis depuis plusieurs années. Les retrouvailles se sont déroulées dans une ambiance détendue. Accolades par-ci, embrassades par-là, les militants islamistes semblent décidés à enterrer la hache de guerre à jamais. Les leaders des deux partis ont pris place côte à côte, histoire de rassurer leurs fidèles sur la sincérité de leurs intentions de se constituer désormais en un seul front. «La fête» a été entamée par la célèbre chanson de Rabah Deryassa Yahiaouledbladi khawa fi koulmekan (vive les enfants de mon pays, frères là où ils sont). «Ce regroupement est le premier du genre à l'échelle nationale entre nos deux partis», a dit Menasra lors de son intervention. L'orateur a consacré une bonne partie de son discours à la vie et au parcours de cheik Nahnah, décédé en 2003. Evoquant les questions d'actualité, il a souligné que «le pays est toujours géré par la terreur». «Il n'est pas normal qu'en 2013, on continue à parler de hebheb (mortier artisanal)», déclare-t-il. Pour lui, «les Algériens souffrent encore d'une multitude de privations». Le chef du FC indique que le temps est venu de «mettre vos clivages de côté». «Nous souhaitons avoir un seul candidat à la prochaine élection présidentielle», a-t-il noté en plaidant «pour un consensus national qui sera suivi par l'organisation d'élections législatives et locales anticipées». Menasra avoue qu'il n'a «aucune intention de se présenter à la prochaine élection présidentielle», ajoutant avoir même engagé des pourparlers avec les responsables de Harakat bina el watan (Mouvement pour l'édification nationale) de Mustapha Bel Mahdi «pour qu'ils s'allient avec nous». Interrogé sur la maladie de Bouteflika, il a estimé qu'«il est inopportun de demander l'application de l'article 88 de la Constitution pour destituer le président de la République pour motif d'incapacité à gouverner». Prenant la parole, son nouvel allié du MSP, Makri, est revenu sur le parcours de son parti avec ses hauts et ses bas. «Nous avons trop patienté. Le pouvoir nous a privés d'une victoire en 1995. Le courant islamiste modéré a perdu 400 personnes durant la décennie noire, mais nous sommes toujours là», a-t-il rappelé avant de revenir sur l'importance de ce projet d'unité. «Nous ne voulons pas mourir divisés et désunis. Unissez-vous, car l'unité fait la force et nous aussi nous voulons diriger le pays», lance-t-il sous les ovations des présents. Cependant, si l'on se fie aux résultats des dernières législatives, l'ambition de Makri a peu de chances de se réaliser. «Cette unité n'a pas été conclue en prévision de la présidentielle, mais celle-ci nous intéresse beaucoup. Notre premier objectif est de voir l'Algérie sortir indemne de l'épreuve qu'elle traverse aujourd'hui», a-t-il conclu.