Le parti Ennahdha a appelé pour la deuxième fois en une semaine à un rassemblement de soutien au président Morsi. Tunis De notre correspondant La mobilisation durant la semaine a fait que la centaine du dimanche dernier est passée hier à un grand millier. La rue n'a donc pas suivi. A entendre les orateurs lors de la manifestation de soutien à «la légitimité» en Egypte, organisée hier sur le boulevard Habib Bourguiba, à Tunis, on comprend les messages que les islamistes d'Ennahdha veulent passer à l'opinion publique. «Nous avons consenti de grandes concessions pour parvenir à un projet consensuel de la Constitution, qui représente tous les Tunisiens», n'a cessé de crier Sahbi Attigue, le président du bloc d'Ennahdha à l'Assemblée, lors de son intervention. «Des millions de personnes descendront dans la rue pour défendre ‘la légitimité' et l'exemple égyptien ne saurait se reproduire en Tunisie», a ajouté le président du bureau politique d'Ennahdha, Ameur Laarayedh. «Seules les urnes peuvent décider de l'avenir politique d'un pays et non l'appel de l'intervention d'une armée», a insisté pour sa part Lotfi Zitoun, le conseiller politique du gouvernement démissionnaire de Hamadi Jebali. Les islamistes d'Ennahdha veulent donc dire qu'il n'y a pas de similitude entre la Tunisie et l'Egypte et que le projet d'Ennahdha représente tous les Tunisiens qui ne doivent pas réfléchir à reproduire l'exemple égyptien. Mais le hic dans tout cela, c'est que la rue n'a pas été au rendez-vous, à voir le nombre de présents hier dans la manifestation, ce qui montre qu'Ennahdha serait en perte de vitesse parmi la population. Le début d'un déclin Pourtant, à lire les banderoles, les islamistes sont venus de toutes les localités du Grand-Tunis. Les bureaux de Hammam Lif, la Marsa, la Manouba, l'Ariana, etc., étaient là, avec leurs affiches, mais sans leurs «troupes». Est-ce un signal ? «Le meeting d'aujourd'hui montre clairement que la rue ne soutient plus les islamistes en Tunisie», a commenté le politologue Néji Jalloul. «A voir l'armada de politiciens mobilisée, Ennahdha s'attendait à un ra de marée populaire. Or, cette présence limitée montre que leurs structures sont en coupure avec les masses», a-t-il constaté. «Même après la destitution de Morsi suite à une sanction populaire sans précédent, Ennahdha ne veut pas comprendre qu'ils sont appelés à reconnaître l'échec de leur gouvernance pour laisser une issue de sortie», a indiqué le politologue. Il reste maintenant à savoir si l'opposition est en mesure de relever le défi et comment va se développer le scénario tunisien. A ce propos, Taïeb Baccouche, le secrétaire général du principal parti d'opposition, Nidaa Tounès, propose, d'une part, «d'élaborer par des experts une refonte du projet de la Constitution afin qu'il soit en harmonie avec les aspirations de la révolution du 14 janvier 2011». Selon lui, ces experts établiront également l'arsenal constitutionnel de ces élections (ISIE, loi électorale, etc.). D'autre part, concernant le gouvernement, le secrétaire général de Nidaa Tounès a appelé à «des concertations pour la constitution d'un gouvernement de salut national dont la tâche se résumerait à la réussite de la 2e phase de la transition démocratique et à un plan d'urgence sur le plan socioéconomique». Pour Baccouche, c'en est fini du gouvernement de Ali Laareyedh. «S'il y avait une réussite en vue, on aurait perçu les signaux annonciateurs dès les premiers 100 jours, dans un plan initial de sauvetage», a-t-il indiqué. Le sort des islamistes serait-il déjà scellé en Tunisie ?