IAM sera en concert, ce soir, au Théâtre de verdure Laâdi Flici à Alger. Prévu à 23 heures, le premier concert en Algérie du groupe de rap français est organisé par Broshing Events. Par le passé, on a eu plusieurs occasions de venir se produire en Algérie. A chaque fois, les rendez-vous étaient annulés. La première fois c'était en octobre 1988. Vous savez ce qui s'est passé à cette date», a déclaré Akhenaton (Phillippe Fragione), leader du groupe, hier, lors d'une conférence de presse à l'hôtel Sofitel à Alger. Shurik'n (Geoffroy Mussard) a, pour sa part, soutenu que le concert d'Alger sera varié. «Nous allons naviguer dans les époques. Les gens veulent aussi écouter nos morceaux devenus des classiques», a-t-il dit, rappelant qu' IAm a, à un moment donné, voulu aller vers «la nouveauté à tout prix». Le groupe jouera notamment des extraits de son dernier album Arts martiens (sorti au printemps 2013). Selon Akhenaton, IAm anime le même concert partout. «A Alger comme à New York. Pas de régime de faveur. Nous sommes exigeants sur le plan technique. Nous voulons que les gens assistent à nos concerts dans de bonnes conditions. Après cette première venue pourquoi ne pas penser à des projets particuliers comme cela nous a été proposé au Maroc de jouer avec des musiciens gnawa», a-t-il dit, précisant éviter de jouer dans des boîtes de nuit (concerts privés). La maturité est d'être réaliste aussi Il a estimé que la durée de vie de la musique engagée est plus longue que celle de la musique festive. «Les sujets graves nous parlent plus aujourd'hui. Entre Je danse le mia (1993, ndlr) et aujourd'hui, il y a eu une grosse révolution dans l'information. La maturité est d'être conscient de ce qui nous arrive. Ces dernières années, nous vivons dans l'instant. Ce n'était pas le cas lorsque nous étions plus jeunes. La maturité est d'être réaliste aussi», a-t-il noté. Revenant sur l'interdiction de leur clip La fin de leur monde (en 2006), Akhenaton a précisé que plusieurs sujets continuent de déranger en France. «Nous sommes entrés dans l'industrie de la musique avec quelque chose d'hyper formaté, pas plus de 3 m 30. Ce clip fait dix minutes. Les images qui sont dedans n'ont pas plu. Dans nos pays aujourd'hui, on préfère plus divertir les gens que parler des problèmes de fond. Nous, on veut aborder autant les sujets graves dans nos morceaux que des thèmes plus amusants comme Je dans le mia», a souligné Akhenaton. Pour Imhotep (Pascal Perez), les membres de IAM demeurent des rêveurs et des idéalistes. «Même si nous avons perdu un peu en naïveté !», a-t-il lancé. Selon lui, de Marseille, où est installé le groupe, les musiciens sont souvent en contact avec la musique algérienne, telle que le chaâbi ou le raï. «Nous suivons le mouvement rap algérien. Nous avons invité à un festival les Hamma Boys et N'Tic. On connaît Lotfi Double Kanon aussi», a soutenu Imhotep. D'après lui, IAm est parmi les premiers groupes rap à introduire les musiques du monde dans ses compositions. «L'âme du groupe est d'être ensemble. On est amis depuis vingt-cinq ans. On est devenus une famille. Nous avons une passion commune, la même vision de la musique. La culture hip-hop est restée la même, mais le rap a beaucoup évolué. Rester droit dans la tempête, c'est le plus dur» a relevé Shurik'n. Les membres d'IAM regrettent que Marseille, consacrée capitale de la culture européenne 2013, tourne le dos à la Méditerranée. «On dirait qu'il y a ce petit complexe d'être Méditerranéen à Marseille et de vouloir intégrer l'Europe à tout prix. On peut intégrer l'Europe en gardant sa culture d'origine, pas en la trahissant», a souligné Akhenaton. D'après lui, la politique européenne vise à scinder la Méditerranée en deux ou trois. « Marseille est devenue une ville ultra individualiste » «Entre pays riches et pays pauvres, entres les religions. Je ne crois pas au choc des civilisations. Quand on connaît l'histoire des civilisations, c'est une histoire de mélange, pas de choc», a-t-il appuyé. Imhotep a rappelé le caractère pluriculturel de la cité phocéenne. «Malheureusement, la culture élitiste s'adresse à un infime pourcentage de la population marseillaise», a-t-il regretté. «La télévision et les émissions de téléréalité font la culture des plus jeunes. Marseille, qui était dans le partage, est devenue une ville ultra individualiste aujourd'hui. C'est inquiétant», a observé Akhenaton. D'après lui, le rap est toujours caricaturé en France. «Aujourd'hui, en France, les hommes et femmes politiques ont pris option de se faire élire en jouant sur les divisions. Se faire élire sur les divisions, c'est très dangereux», a-t-il déclaré.