Ils vont mettre le feu Debout les braves! C'est ce soir le moment tant attendu, ça va chauffer grave ce soir en plein air à Alger. En prévision de leur concert qu'ils donneront ce soir au Théâtre de Verdure Laâdi-Flici, sur initiative de Broshing Events, Akhenaton, Shurik'N, Imhotep, Kheops, Kephren, étaient tous là hier à l'hôtel Sofitel pour évoquer avec nous leur musique, leurs idéaux, pousser quelques coups de gueule sans omettre, bien sûr, de parler de leur dernier album Art Martien dont ils font actuellement la tournée de promotion dans le monde. Marseille n'est qu'à quelques encablures d'Alger et pourtant, ils ne s'y sont jamais produits alors que ce ne sont pas les occasions qui ont manqué a-t-on avoué. Akhenaton confie qu'en 1988, le groupe IAM était prêt à venir, mais le concert avait été reporté au mois d'octobre et «vous savez après ce qui s'est passé, dira-t-il avec les trois points de suspension. Aujourd'hui, en tout cas, ce sera enfin fait et ce, du haut de 20 ans de carrière». Un groupe qu'il n'a de cesse de caracoler en haut de l'affiche du rap. Une chose est sûre, pas de concert en boîte de nuit, un lieu que vraisemblablement, déteste le groupe IAM et Akhenaton l'a bien fait comprendre. «C'est émouvant d'être à Alger, en arrivant on cherchait des endroits ressemblant à Marseille», fait savoir Akhenaton en préambule. A propos de la manifestation Marseille-Provence, capitale de la culture européenne», dans la ville portuaire phocéenne, Akhenaton regrettera amèrement que cet événement ne soit pas assez tourné vers la rive sud de la Méditerranée qu'une grande population de Marseille soit marginalisée. Un manque d'ouverture vers la ville méditerranéenne malgré l'opulence civilisatrice de cette ville riche en histoire qui n'est pas assez enseignée dans les écoles reconnaît-il. «C'est la télé qui fait la culture ici et ça donne une ville ultra-individualiste (...) et des élections basées sur la division, ce qui est très dangereux.» A propos de la musique du dernier album, teinté de gravité, Shurki'n fera remarquer que «chaque album est représentatif de l'humeur dans lequel on est à une période donnée», sans se départir de ce côté mélodieux du son du monde qui existe depuis longtemps, depuis leur cursus du fait de la richesse et diversité ethnique et confessionnelle des différents musiciens qui forment le groupe. Si IAM a mûri, aujourd'hui a-t-il estimé, il prend plus temps à savourer son plaisir de jouer ensemble. «On prend acte de la réalité tout en gardant une part de rêve, mais on ne s'enflamme pas». Avec des morceaux bien ancrés dans la réalité, dénonçant la misère humaine, le racisme, l'exclusion et le marasme social qui existent en France et notamment à Marseille, Akhenaton dira être déçu par ce qui se passe aujourd'hui tout en avouant être inquiet pour le futur de ses enfants. «Oui, effectivement, c'est une grosse désillusion..» et d'ajouter: «Je ne pense pas que la musique puisse changer grand-chose. La preuve, le rap est caricaturé en France. Mais on défend les valeurs dans nos paroles. C'est en ce sens-là que la société peut changer. Ce qu'on peut faire c'est au niveau cellulaire, au sein de la famille...» et Imhotep de souligner: «Le rap est une résurgence de la tradition orale. Avec cet outil et codes on peut expliquer les informations et faire passer des choses, examiner certains sujets sous un angle différent.» Si le carburant du groupe, sa sève de jouvence, est réellement le plaisir d'être ensemble et partager la même passion de la musique et la vision des choses, l'âme du groupe est sans doute «la complicité qui existe entre nous depuis 25 ans. On ne parle plus de mot «ami» là, mais on est devenu une famille», dira Shurik'n, chose rare aujourd'hui dans la nébuleuse sphère du rap actuel où chacun s'envoie des bâtons dans les roues et se noie dans des règlements de comptes. Cependant, reconnaît-on, nonobstant le rap commercial qui tourne dans les radios, il y a de plus en plus un retour vers le même état d'esprit du rap qu'avant et une recherche au niveau de l'écriture, ont estimé Akhenaton et Shurik'n qui avouent apprécier le rappeur Youssoufa, entre autres. Evoquant leur musique, Imhotep avouera être le premier groupe de rap à avoir intégré des sonorités du monde. S'agissant des mélodies du rap d'IAM, Akhenaton soulignera: «Dans le rap ce sont des musiques qui intègrent le blues, la saoul, le jazz. On apporte de la diversité, on n'est pas sectaire. Parfois, c'est le doute qui pousse à créer» et Shurik'n d'abonder dans le même sens: «La prise de risque est nécessaire.». A propos du rap algérien, le groupe IAM qui connaît Hama Boys et Double Canon, notamment, il dira avoir peu d'échos sur ce qui se passe ici mais «il y a des choses très intéressantes.» Comme des samouraïs partis en guerre contre l'injustice par la plume et la force de frappe d'une société passée au fil de leurs lames, IAM viendra ce soir vous interpréter ses plus beaux morceaux, des classiques comme Je danse le mia aux tout derniers à l'image de Marvel, Debout les braves, Mon encre si amère, Spartiate Spirit, Misère, Pain au chocolat etc et faire la fête jusqu'au bout de la nuit... 4, 2, 1, les dés roulent...