La commune de Heuraoua, à l'est de la capitale, était, dans un passé pas très lointain, une localité rurale par excellence. En l'espace de quelques années seulement, la commune a subi une métamorphose totale, qui, au lieu de lui apporter des attributs positifs devant la hisser au rang d'agglomération moderne, l'ont, au contraire, fait régresser de manière significative. La ville arbore, aujourd'hui, des allures tentaculaires, mais ne pourrait aucunement prétendre à une quelconque homogénéité en matière d'agencement urbain. De nouvelles cités et lotissements ont été greffés au noyau du village, pour former, au final, une agglomération hybride qui s'étend sur plusieurs hectares. Les quartiers que sont Maâmria et Braïdia illustrent à eux seuls, cette nouvelle donne urbaine, marquée par une anarchie déconcertante. La fièvre et la frénésie du béton ont eu raison du petit village de Heuraoua, et ont définitivement dénaturé sa vocation première qui est l'agriculture. En venant de Rouiba, l'accès étroit et sinueux de la ville paraît disproportionné par rapport aux gigantesques immeubles qui se côtoient tels des obélisques dépourvus d'ornements, dans un espace aussi réduit que deux terrains de football. Ce contraste démontre que les extensions qui ont été faites dans la ville ne répondent à aucune logique, si ce n'est à celle de résorber la demande grandissante en logements. Aussi, ces projets n'ont pas été suivis par la réalisation d'infrastructures devant répondre aux besoins des nouveaux habitants. A Heuraoua et dans cet amalgame de constructions sans âme, se mêlent deux genres d'habitations. La ville étale tantôt des immeubles modernes, greffés tels un corps étranger aux espaces agrestes, tantôt des maisons rustiques dont le toit est en tuiles. Le tout cerné par des potagers où l'on s'abstient de cultiver encore toutes sortes de légumes, particulièrement du côté de Braidia. Ici les maisons individuelles semblent grignoter sournoisement des parcelles de terre fertile, centimètre par centimètre, réduisant leurs proportions de jour en jour. Manque d'infrastructures de base La forêt d'immeubles, à l'entrée de la ville, cache bien ses entrailles, ne dévoilant aux visiteurs que ce qui lui paraît utile, c'est-à-dire, les bâtiments et rien d'autre. En dépit de l'existence de quelques écoles primaires, aucune autre structure devant répondre aux attentes des habitants, particulièrement en matière de santé et de loisirs, ne sont visibles. Ainsi, Dans cette cité à l'appellation numérotée, comme c'est d'usage, il n'y a ni centre de santé ni maison de jeunes et encore moins de lycée. Les autorités, qui avaient à charge de réaliser ces unités ont mis de côté ces exigences qui ne sont nullement de l'ordre du superflu, mais relèvent au contraire, des besoins réels de la vie quotidienne. «Nous avons été parqués dans cette cité sans aucune commodité. Il existe des écoles pour le cycle primaire et moyen, mais s'agissant du secondaire, nos enfants doivent se déplacer sur plusieurs kilomètres dans les communes limitrophes, à savoir Aïn Taya, Rouiba, Réghaïa ou encore Bordj El Bahri», déplore un habitant de Maâmria, et de poursuivre : «Nous n'avons pas également de centre de santé, de bureau de poste, ou de structures de loisirs pour nos enfants.» Le seul bureau de poste opérationnel à Heuraoua date d'une trentaine d'années. Il a été construit du temps où la commune n'était qu'un petit village avec à peine quelques centaines d'âmes. «Souvent le bureau de poste manque de liquidités, ce qui nous oblige à nous rabattre sur les bureaux de Rouiba et de Aïn Taya», regrettent des habitants. Quant au réseau routier, il se trouve dans un état de dégradation tel, qu'il devient, par moments, difficile de se mouvoir. «Les routes n'ont pas été refaites depuis des années. Les déplacements en ville sont devenus difficiles», nous raconte-t-on, et d'ajouter : «le réseau d'éclairage public aussi doit être impérativement renforcé,, notamment à Aïn El Kahla où des quartiers entiers sombrent dans l'obscurité dès les premières heures du soir.» S'éloignant progressivement, mais sûrement, de sa vocation initiale qui est l'agriculture, la commune de Heuraoua n'a pas pour autant entrepris d'introduire des activités de rechange susceptibles de donner des ressources pour la collectivité locale. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les quelques unités industrielles, qui se trouvent dans le périmètre de la commune, possèdent majoritairement leur siège hors de la commune, ce qui veut dire que la municipalité ne bénéficie pas de rentrées d'argent dans le cadre de la fiscalité. Plage d'El Kadous un atout non exploité Heuraoua possède la plus grande plage de la capitale, à savoir El Kadous, mais ne possède aucun droit pour son exploitation. «La côte est exploitée par l'APPL (Agence chargée de la protection et de la promotion du littoral de la wilaya d'Alger) quant au parking, il est géré par l'Epic de wilaya EGCTU», affirme un élu de l'APC. Alors que la plage se trouve sur le périmètre de la commune, l'APC ne bénéficie d'aucune rentrée d'argent. «Nous assurons le ramassage des déchets collectés par les agents de l'APPL», ironise-t-on. La plage d'El Kadous est un lieu paradisiaque, tant les atouts qu'elle recèle sont uniques. En plus de la grève qui s'étend sur plusieurs centaines de mètres en largeur, celle-ci est large d'une centaine de mètres, surplombée par une magnifique forêt où serpente majestueusement le lac de Réghaïa. Il faut dire que l'endroit présente tous les atouts pour la création d'une zone touristique. «La plage d'El Kadous pourrait devenir un haut lieu du tourisme balnéaire, à l'instar de la côte ouest», nous assure-t-on. Les responsables locaux déplorent, toutefois, le fait que la municipalité ne puisse pas prétendre à un tel projet. En tout état de cause, le budget municipal, qui est de l'ordre de 13 milliards de centimes par an, fait de la commune de Heuraoua l'une des plus pauvres de la capitale, d'où la nécessité de créer et de diversifier les ressources de la commune susceptibles de renflouer les caisse de l'APC et permettre son développement réel, car elle possède des atouts majeurs, particulièrement dans le domaine de l'agriculture et du tourisme.