Abandon n A la situation lamentable de la commune, s'ajoute la démobilisation de la population qui ne trouve pas d'interlocuteur. A l'entrée de cette commune où le bitume se fait désirer, le visiteur est alerté par une gigantesque plaque de signalisation mettant en garde les automobilistes. «Attention travaux !». En réalité, nous n'avons rencontré aucun chantier sur notre chemin. Cette parenthèse fermée, nous nous dirigeons vers Aïn El-Kahla où se trouve l'EAC de l'ex-domaine Bernard dont les constructions sont sérieusement endommagées. En traversant le sentier menant à cette EAC, nous constatons l'état de dégradation très avancée des bâtisses dont plusieurs sont en parpaing. En nous voyant, les habitants nous ont accostés afin de nous indiquer le chemin que nous ne leur avions pas demandé au préalable. Nous avons compris que ces citoyens voulaient nous conduire chacun dans son quartier. Certaines bâtisses sont dans un état déplorable, d'autres ont un besoin pressant d'être renforcées ou restaurées. Les citoyens n'hésitent pas à désigner du doigt les responsables locaux. Le climat au niveau de tous les quartiers est à la désolation. Le vandalisme est aussi une recette locale. «Nous sommes consternés par les actes de vandalisme qui se produisent quotidiennement, alors que les responsables ne font absolument rien pour y remédier», disent les citoyens de Braïdia. Ils appellent les responsables locaux «à travailler dans la concertation et la transparence afin de mieux gérer la localité et apprendre à recréer des liens basés sur le respect et surtout sur la bonne application des lois de la République». Notre escale au lieu dit Dechra s'est faite dans la douleur. En effet une bande de malfaiteurs s'est attaquée à un couple de sexagénaires. L'homme et son épouse ont eu la peur de leur vie quand des délinquants les ont attaqués sous le regard «hébété» des passants, en les sommant de leur donner le sac que portait la vieille dame. Refusant de céder à leurs menaces, ils ont été malmenés. Tandis que l'un des agresseurs tentait de délester la dame de son sac, deux autres ont immobilisé le vieil homme. «L'insécurité semble prendre racine à Heuraoua», nous dit une jeune demoiselle de passage. Au deuxième jour de notre virée au chef-lieu de la commune, un citoyen nous prend en charge pour une visite plus approfondie de la localité. «Heuraoua s'est transformée en un véritable ghetto», affirme-t-il avant de nous inviter à le suivre. L'urbanisation qu'a connue la commune ces dernières années est pour le moins inquiétante et pourrait, selon notre guide, avoir des conséquences néfastes, notamment sur le plan sociologique. «La plupart des bidonvilles se trouvent sur des terrains à vocation agricole. Les élus locaux ne disposent que de données approximatives sur les bidonvilles.» Dans les quartiers d'Aïn El-Kahla 1 et 2, Haouch Djendi, Haouch Si Boualem, les quartiers de Braïdia et Maâmria. Les citoyens rencontrés se révoltent lorsqu'ils évoquent avec nous l'état des lieux. Le constat est amer. «Les maisons coloniales, construites en 1940, n'ont jamais été entretenues, d'où leur dégradation avancée», nous disent nos interlocuteurs. «Des familles entières vivent dans une situation dramatique. Nous avons avisé les autorités concernées, à savoir le P/APC de Heuraoua et le wali délégué de Rouiba. Nous leur avons demandé de nous loger dans des habitations décentes, ou faire en sorte que nous puissions bénéficier d'assiettes de terrain pour construire nos demeures. Notre requête est restée sans suite», dit un quinquagénaire. Nos interlocuteurs semblent frustrés et ne savent plus à quel saint se vouer. «C'est aux pouvoirs publics de prendre en charge ces problèmes. Nous ne leur demandons pas l'aumône, mais nos droits», affirment d'autres citoyens.