La privatisation des entreprises publiques a été l'une des principales mesures imposées par le Fonds monétaire international dans le cadre des plans d'ajustement structurel. Toutefois, celle-ci n'a pris de réel essor que durant les années 2000. Elle marque un tournant lorsque Abdelhamid Temmar est nommé à la tête du ministère des Participations, dans le sillage de l'arrivée à la présidence de la République de Abdelaziz Bouteflika en 1999. En chantre du libéralisme à l'état pur, Temmar commence à privatiser à tour de bras. Et les anecdotes les plus étranges à ce propos sont nombreuses, à l'image de l'aventure marseillaise de Temmar. Petit rappel des faits : le conseil des privatisations dissous, les opérations de privatisation dont les processus avaient été enclenchés et annulés, une ordonnance est promulguée afin «de donner un véritable ancrage juridique» aux privatisations. C'est ainsi que l'ordonnance n°01-04, de 2001, qui insistait sur le fait que «toute privatisation est un acte d'investissement» fixe les modes de privatisation, par appels d'offres, manifestations d'intérêt, recours au marché financier, recours à l'actionnariat populaire et par recours au gré à gré. Un cadre qui concentre surtout tous les pouvoirs entre les mains, au-delà du Conseil des participations de l'Etat présidé par le chef du gouvernement, du ministre des Participations. C'était lui qui proposait les programmes modalités et conditions de privatisation. Il exécutait aussi les processus de privatisation, via les sociétés de gestion des participations dont il avait la tutelle et dont il avait fait de véritables agences de privatisation. Le CPE intervenait en fin de cycle pour examiner et valider ou non les opérations. Temmar avait donc toutes les cartes en main pour gérer la vente en masse des entreprises publiques économiques. On se souvient d'ailleurs des fameux road-show que le ministre avait entamés dès 2005 afin de «présenter tous les atouts des entreprises algériennes éligibles à la privatisation». Si les EPE à privatiser présentaient certes des atouts indéniables, la qualité des repreneurs éventuels suscitait quelques doutes. C'est ce que laisse entendre l'un des témoins à ces road-show qui rappelle qu'en 2005, à Paris au siège du Medef, le ministre algérien avait présenté un échantillon comptant une cinquantaine de très belles entreprises à privatiser. Au cours de la rencontre rehaussée de la présence de personnalités politiques françaises d'origine algérienne, comme Azzouz Begag, ministre français délégué à la Promotion de l´égalité des chances, et Tokia Saïfi, députée au Parlement européen, Temmar avait insisté sur le fait qu'il fallait accorder, au cours des privatisations, une attention toute particulière aux entrepreneurs français d'origine algérienne. Temmar ciblait particulièrement le Club 92 dont il qualifiait certains des membres d'hommes d'affaires d'origine algérienne au «poids important». Il faut savoir cependant que le Club 92 est une association d'entrepreneurs d'origine algérienne établie à Marseille et dont le président n'est autre que Slimane Azzoug, propriétaire d'un réseau de boucheries à Marseille ainsi que d'une entreprise de transformation et de conservation de la viande et connu en Algérie pour avoir un temps promis aux ménages algériens la viande à 20 DA le kilo. Tentative qui n'aura pas abouti d'ailleurs. Ce qui fait dire à notre interlocuteur qu'au lieu de valoriser les entreprises en question, comme prôné par Temmar, celles-ci ont failli être «cédées à des entrepreneurs de seconde zone afin de renforcer le réseau de ce personnage coloré de la cité phocéenne».