L'Algérie figure parmi les 13 pays, la plupart arabes, dont des avoirs d'origine douteuse se chiffrant en milliards de francs suisses, ont trouvé refuge dans les coffres des banques helvètes. Même si la Suisse a modifié sa loi sur le blanchiment d'argent (LBA), les détenteurs de ces comptes sont encore bien protégés. «L'argent placé sur des comptes secrets appartenant à plusieurs anciens et actuels hauts responsables algériens de la sphère économique et politique de votre pays est des plus important»,assure un responsable bancaire suisse rencontré à Genève en juin dernier. Et si cet argent sale, provenant surtout de la corruption et du crime organisé, a pu être recyclé et placé en toute sécurité, c'est bien grâce à des transactions secrètes. S'effectuant sur la très puissante place financière (banques,trusts, entreprises fiduciaires, sociétés anonymes, établissements et fondations), ces mouvements de capitaux illicites sont l'œuvre d'experts de la finance internationale souterraine, précise notre source. Mais le mythe helvétique de la sécurité et de la garantie absolues est en train de fondre sous la pression du groupe Egmont – organe regroupant les cellules de renseignements financiers (CRF) de 127 pays, dont l'Algérie. En modifiant sa LBA, la Suisse a, en effet, marqué sa volonté de poursuivre encore plus efficacement sa lutte contre les dangereux phénomènes de blanchiment d'argent et financement du terrorisme. En vertu des amendements apportés sur la LBA, le Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent, rattaché à l'Office fédéral de la police (Fedpol), sera désormais en mesure d'échanger des informations financières avec ses homologues étrangers et disposera de compétences plus larges envers les intermédiaires financiers qui sont les banques, les sociétés de transfert de fonds, les fiduciaires, les gérants de fortunes, les conseillers en placement, les avocats, les courtiers en assurance, les entreprises de cartes de crédits, les casinos, les négociants en devises et en valeurs mobilières.
Entraide
«Le MROS pourra disposer d'un corpus de données plus vaste, ce qui renforcera l'efficacité et la crédibilité de l'ensemble du dispositif suisse de lutte contre le blanchiment d'argent», explique notre source. Conformément à la nouvelle LBA, dont le projet a été approuvé par le Conseil national (suisse) en mars 2013, les numéros de comptes bancaires, les renseignements se rapportant aux transactions de capitaux ou aux soldes de comptes pourraient être communicables. Des données jusqu'à l'heure couvertes par le secret bancaire. En plaçant officiellement via un cadre juridique, fin mai 2013, la Cellule de traitement du renseignement financier sous le giron du ministère des Finances, les autorités algériennes, ont, en fait, répondu à un impératif, indique notre source bancaire genevoise : «Si la CRF d'un pays aspire obtenir, au lendemain de l'entrée en vigueur de la nouvelle LBA, de son vis-à-vis suisse, le MROS, une coopération réelle et efficace, la demande en la matière doit impérativement émaner d'une autorité officielle. Chez nous, c'est l'Office fédéral de la police dont relève le MROS». Néanmoins, souligne-t-elle, les informations susceptibles d'être échangées sont d'une portée purement administrative. Une entraide judiciaire est par conséquent incontournable. C'est dire que la réponse des autorités helvétiques à la demande adressée, il y a plus d'une année, par le ministre algérien de la Justice concernant des comptes secrets appartenant à des personnes morales et physiques nationales et étrangères sur lesquelles pèsent de fortes présomptions de blanchiment d'argent, n'est pas pour demain. Elle est tributaire de l'entrée en vigueur de la nouvelle LBA et les dispositions en découlant. D'autant que, toujours d'après notre source, tel que prévu dans les dispositions de la nouvelle LBA suisse, un accord de coopération technique doit au préalable être conclu entre et les CRF et le MROS. Par ailleurs, avec plus de 3 milliards de francs ayant fait l'objet en 2012 de communications de soupçons des intermédiaires financiers, le MROS a enregistré les mêmes records qu'en 2011, fait ressortir son tout dernier rapport (fin mai 2013). Le nombre de communications de soupçons de blanchiment d'argent reste toujours élevé : 1585 cas dont a été destinataire le MROS en 2012. La corruption demeure l'infraction la plus présente.