Pour un spécialiste de l'université d'Oran, «la remontée de la nappe phréatique provoque des désordres dans la ville». La totalité des sebkhas et autres dayas qui caractérisent la wilaya d'Oran sont en général à cette période de l'année à sec. Sauf bien entendu dans les parties où elles servent de réceptacle aux eaux usées des agglomérations voisines. Il est toutefois impossible que l'accumulation de ces eaux vienne à couvrir les grandes surfaces que constituent ces dayas. C'est pourtant bien ce qui arrive à Dayat Morsli, plus connue sous l'appellation de Petit Lac, même si cette dernière est certainement la plus petite des dayas de la wilaya d'Oran. Promu à un bel avenir, Dayat Morsli, qui se trouve aujourd'hui au centre du grand Oran, devait en principe devenir un haut lieu de villégiature pour les Oranais après avoir été la première décharge de la ville. D'ailleurs, un programme de dépollution et de revitalisation avait été mis en place dès le début des années 2000. Les eaux usées et polluées de la zone industrielle voisine furent interdites de déversement alors que la société civile fut invitée à venir planter des arbres et autres végétaux lors des différentes campagnes de reboisement. D'ailleurs, la présence périodique de bandes de flamants roses et autres volatiles de passage fut largement saluée et considérée comme une avancée notable en matière de dépollution du lac. Il y eut même quelques appels d'offres invitant les investisseurs potentiels à venir participer à la création d'une zone de loisir au centre d'Oran. D'où provient donc ce million de m3 d'eau qui alimente aujourd'hui cette daya de quelque 100 ha ? Il faut dire qu'en bordure de Petit Lac se trouve une grande station de relevage du réseau principal de collecte des eaux usées du grand Oran et qui alimente la station de traitement des eaux usées d'El-Kerma. A la direction d'assainissement de la société des eaux d'Oran (SEOR), on est formel : «aucune eau usée provenant du réseau urbain ne peut se déverser dans la dépression de Petit Lac, même en cas d'accident ou de panne technique, les eaux usées de la ville reprendront l'ancien tracé pour aboutir dans la mer», nous dira M. Bouhadasous, directeur de la SEOR. Les eaux de Petit Lac seraient donc d'origine naturelle. Pour un spécialiste de l'université d'Oran, «il s'agit tout simplement de la remontée de la nappe phréatique». Une nappe qui n'en finit pas de provoquer bien des désordres dans la ville. Pas très loin de cette daya, le projet de la trémie de la citée Emir Abdelkader a tourné au cauchemar pour les ingénieurs des travaux publics tant la remontée des eaux usées pose de sérieux problèmes aux techniciens en charge du projet. C'est aussi là que se situerait l'origine de l'épineux problème des caves et autres sous-sol inondés du centre-ville. Problème qui mettrait sérieusement en danger bien des bâtisses dans la ville coloniale. «La nature se venge», disent quelques nostalgiques qui voient dans la construction de hautes tours et de profonds sous-sol la principale raison des dérèglements géologiques que connaît la ville. La mise en place d'un réseau de récupération des eaux de surface, qui nécessiterait la pose de quelques milliers d'avaloirs, idée maîtresse du partenaire espagnol «Agar», concessionnaire de la gestion de l'assainissement de la ville. Ce réseau viendrait, dit-on, compenser l'absence sous la ville de réseau naturel d'écoulement et de drainage des eaux. L'idée qui semblerait trouver une oreille très favorable auprès des autorités locales ne fait pas l'unanimité auprès des spécialistes et de la communauté scientifique qui avancent que le bassin versant des eaux souterraines qui alimente la nappe se situerait bien au-delà de la ville.