Y a-t-il, comme semble le faire croire la presse écrite quotidienne, une grave crise politique au sommet de l'Etat ? Allons-nous dans les tout prochains jours assister à un changement de gouvernement qui apparaît, aux yeux des analystes avertis, comme l'alternative classique incontournable pour calmer (ou taire pour un temps) les divergences qui mineraient les sphères du pouvoir et à propos desquelles le commun des mortels est tenu à l'écart ? Ouyahia, qui a, jusqu'à preuve du contraire, toujours eu les faveurs et la confiance absolue du chef de l'Etat, serait-il vraiment assis sur un siège éjectable ? Ce ne sont pas les interrogations qui manquent actuellement aux Algériens, mais plutôt les réponses vraies et crédibles qui ne viennent pas à leur secours au moment où la rumeur ne cesse d'enfler. Un Premier ministre en ligne de mire, des institutions qui se décroisent, les partis de l'Alliance présidentielle qui se tirent dans les pattes, un Président observant de très haut, dans un mutisme total, une scène qui ferait pâlir un spectacle d'ombres chinoises, quel ingrédient faut-il donc ajouter à la sauce pour faire réagir les grands moyens de communication et accompagner les citoyens dans leur quête de vérité. Qui donc est mieux placé que la télévision - dont on aime bien dire qu'elle est la seule à détenir le pouvoir de pénétrer les foyers sans qu'on l'y invite - pour nous éclairer un tant soit peu sur les gesticulations politiques qui installent, qu'on le veuille ou pas, des inquiétudes dans les esprits et rendent le climat social encore un peu plus malsain. Ce serait formidable si pour avoir une idée précise sur les problèmes qui nourrissent leur quotidien, les Algériens n'ont qu'à appuyer sur un bouton, celui de leur poste de télé. Ce geste qui semble magique s'il est entré dans la banalité ailleurs, relève hélas encore chez nous de l'illusion... Pourtant, connaissant les règles de fonctionnement qui régissent notre boîte à images, les pressions auxquelles elle demeure soumise, personne ne demande à celle-ci de verser dans le sensationnel, ni dans l'excès, ni dans le parti-pris, ni dans la moralisation bête et méchante comme elle a l'habitude de faire, pour se tirer d'affaire, mais simplement de se conformer, lorsque les circonstances fortes l'exigent, aux principes élémentaires de la déontologie professionnelle. En termes plus directs, elle a - au cas où elle l'oublierait - obligation d'informer les Algériens sur toutes les situations qui les concernent au plus haut point, en veillant à ne pas altérer l'objectivité. Ce devoir d'informer dans un pays qui a appris à vivre avec la liberté d'expression, et qui devrait figurer dans les statuts de l'entreprise est-il à si difficile à assumer ? Qu'est-ce qui empêcherait par exemple d'organiser un face-à-face Ouyahia-Belkhadem - puisque ce sont eux les principaux acteurs d'un conflit qui ne dit pas son nom - où les questions les plus pertinentes pourraient leur être posées pour lever le voile sur cette lutte sourde que les deux antagonistes semblent mener l'un contre l'autre ? Que risquerait HHC s'il autoriserait un tel débat qui ne saurait dépasser les limites de la confrontation politique ? Apparemment, il n'y a rien qui puisse constituer un handicap disons technique à ce genre d'émission, sinon la peur d'être mal vu ou de faire la gaffe fatale qui remettrait en cause toute une carrière. Nos dirigeants sont-ils donc tellement allergiques à l'esprit d'initiative qu'ils commettraient l'acte le plus odieux envers les citoyens, celui de stimuler la censure et le silence complice pour éviter que la vérité n'éclate ? Entre le pouvoir invisible et celui qui endosse les lourdes responsabilités, HHC a du mal à naviguer. Comme Ouyahia, lui aussi serait dans une position inconfortable (la revue Les Nouvelles Confidences affirme que son départ serait à l'ordre du jour), mais est-ce encore une simple rumeur. Allez savoir... Pendant ce temps, MBC s'installe subrepticement dans notre paysage médiatique, avec cette ambition de conquérir le public maghrébin. Demain, on s'étonnera une fois de plus de la désertion des téléspectateurs algériens pour des écrans plus attirants.