Un documentaire déchirant El Banat Dol, de l'egyptien Tahani Rached, a produit un terrible choc au Festival de Cannes. C'est sur les filles abandonnées dans les rues du Caire. Une plongée dans un drame sordide où on voit des filles-mères, des femmes-enfants enceintes soumises à la violence, aux menaces, aux rafles policières. Ce film a produit de vives controverses parmi les Egyptiens à Cannes. Fallait-il ou non montrer ça ? Aucune controverse en revanche sur le film de Marwan Hamed L'immeuble yacoubien, avec une pléiade d'acteurs tels Adel Iman, Yousra, Hind Sabri, Nour El Cherif... Chronique mi-frivole, mi-sérieuse de la vie quotidienne dans un immeuble historique du Caire construit en 1920 par un millionnaire américain. jadis occupé par de grands bourgeois, aujourd'hui par une foule de miséreux. Les dix étages sont envahis, on construit des cahutes sur le toit. Portrait vif, truculent de ce microcosme caïrote. Chose étrange, on rit beaucoup dans cette histoire plutôt triste. Mais c'est à cause des acteurs comme Adel Iman, qui joue le rôle du fils d'un ancien pacha, qui subit la montée graduelle des épreuves avec philosophie, et Nour El Cherif qui campe un arriviste, ancien cordonnier devenu millionnaire en vendant de la drogue, des habits pour femmes islamistes...Pas grand chose à dire de Marie-Antoinette de Sofia Coppola, accueilli très froidement à Cannes. Reine de France, épouse de Louis XVI, elle a péri sur l'échafaud avec le roi et ses enfants après la prise de la Bastille. Le destin tragique est à peine évoqué dans le film. Sofia Coppola préfère montrer le spectacle de la cour de Versailles où règne une certaine décadence quand arrive la reine d'origine autrichienne, très jeune mariée au dauphin. Femme flamboyante, dépensant sans compter. On lui dit que les français manquent de pain. Elle répond : « ils n'ont qu'à manger de la brioche. » Babel, par contre, est un très beau film réalisé par le mexicain Alejandro Gonzales Inarittu, avec Brad Pitt, Cate Blanchett, Koji Yakusho, Gael Garcia Bennal. Sauf que c'est un film qui donne au Maroc une très mauvaise image. Les images du Maroc sont en déphasage par rapport aux campagnes publicitaires vantant le tourisme de ce pays. Babel est construit sur une histoire complexe qui se déroule simultanément dans le sud marocain où une touriste américaine est grièvement blessée dans ce que les médias qualifient aussitôt d'attentat terroriste, à Tokyo, à San Diégo, au Mexique... La mise en scène est certes agitée mais on retiendra les sublimes images de Tokyo la nuit et le virtuose jeu d'acteurs de Brad Pitt et Cate Blanchett. Badel fait plaisir à voir. A Cannes, on l'a déjà inscrit au palmarès.