La ville de Thenia a vécu avant-hier une soirée agitée. Des émeutes y ont éclaté en fin de journée pour se poursuivre durant une bonne partie de la nuit. Le match ayant opposé l'équipe locale de football à celle de Lakhdaria aura été une occasion pour se rassembler afin d'exprimer sa colère. L'argument sportif s'est mêlé au malaise social qui couve à Minerville pour donner naissance à une manifestation populaire. Car à leur sortie du stade, à la fin du match, des supporters de l'équipe locale, déçus par le nul concédé par leur club, ont commencé à manifester dans la rue en scandant des slogans hostiles aux visiteurs et aux instances de football, selon des témoignages concordants. Une colère somme toute prévisible : il existe entre les deux clubs une rivalité des équipes voisines. Mais la manifestation a tout de suite pris un caractère revendicatif. La gestion de l'après-séisme cristallisera vite le mécontentement et les revendications des manifestants. Dans le désordre qui suit, des jeunes vont incendier la salle polyvalente de la ville appelées maison de culture, saccager les cabines téléphoniques, brûler des pneus, bloquer les axes principaux à la circulation à l'aide d'objets divers et s'attaquer à d'autres édifices publics. Ils se mettent à évoquer l'« omission de Thenia du programme de relogement » et à réclamer des chalets et autres aides au logement. L'intervention de la police a provoqué des affrontements entre les forces anti-émeutes et les manifestants. Lesquels se sont soldés par une dizaines de blessés légers des deux camps. Le calme a été rétabli vers 22h, mais hier encore, la tension était vive dans toute la ville. Le dispositif de sécurité demeurait, en milieu d'après-midi, déployé. Les citoyens, eux, nous diront que « tout cela est dû au malaise que vit la population ». « Un malaise aggravé par le sentiment d'oubli que nourrissent les citoyens du fait que le programme de relogement prévu dans la commune n'a à ce jour pas encore démarré. On nous propose d'aller dans d'autres communes, mais cela est-il si évident ? Beaucoup préfèrent rester chez eux, là où ils ont grandi, là où ils ont leurs familles ; pourquoi vouloir les emmener ailleurs ? », nous a déclaré un commerçant de la ville qui « regrette cependant qu'on en arrive là, à l'usage de la violence ». Son ami voit mal le fait que « Thenia qui a été durement touchée par le séisme, l'une des communes les plus dévastées, soit à ce point ignorée ». « Nous voyons dans toutes les communes s'ériger de nouvelles cités qui font oublier le cataclysme, mais chez nous les traces restent encore vivaces. Ces jeunes ont raison de réclamer un programme de reconstruction qui donnerait un autre visage à leur cité. Le centre-ville de Thenia risque de rester à jamais sinistré et les habitants n'ont pas beaucoup de chances de quitter leur chalets », ajoute-t-il. D'autres citoyens nous parleront des problèmes sociaux divers auxquels ils sont confrontés : le chômage et les l'habitat en tête. Hier, en fin de journée, les affrontements ont repris dans certains endroits de la ville contraignant de nombreux commerçants, notamment ceux du centre, à baisser rideau. La route de la sortie est de la localité a été bloquée à la circulation à l'aide de pneus brûlés, de troncs d'arbre et autres objets. Les éléments des forces anti-émeutes travaillaient encore à rétablir l'ordre. On a appris de source policière qu'une vingtaine d'interpellations avaient été effectuées. Les forces de l'ordre se chargeaient surtout de protéger les édifices publics, la daïra et la mairie notamment.