Après le bras de fer engagé avec l'OREF, les Débats d'El Watan ont été au rendez-vous. Au menu : le coût du statu quo autoritaire. Le public s'est déplacé en force à la salle Cosmos. Une belle image de communion et de résistance. La salle Cosmos de Riadh El Feth était bien pleine hier, à l'occasion de la reprise des Débats d'El Watan. Et, au-delà de l'intérêt grandissant que suscite ce rendez-vous désormais ancré dans le paysage intellectuel algérois, il nous plaît d'y voir une marque de solidarité avec les initiateurs de ce colloque. «Au vu de l'assistance nombreuse, nous avons bien fait de maintenir cette rencontre», soufflait Omar Belhouchet, directeur d'El Watan, à l'ouverture de ces rencontres. Dans la salle, deux légendes vivantes, deux icônes de la Révolution dont la présence vaut «son pesant de poudre» comme dirait Kateb Yacine : Djamila Bouhired et Louisette Ighilahriz. Omar Belhouchet n'a pas manqué de leur rendre un hommage appuyé : «Le combat pour la liberté d'expression et la liberté de la presse qui est porté par les jeunes générations s'inscrit dans la continuité des valeurs de Novembre», en saluant le combat des deux illustres moudjahidate. Ce nouveau cycle des Débats d'El Watan sera étrenné par un thème hautement pertinent : «Statu quo autoritaire : quel coût pour l'Algérie ?» Trois éminents spécialistes devaient se relayer pour disséquer cette thématique : l'économiste Smaïl Goumeziane, le juriste Mouloud Boumghar et le politologue Mohammed Hachemaoui. Un quatrième intervenant, en l'occurrence Abdelkader Lakjaa, sociologue à l'université d'Oran, était annoncé mais n'a pas pu faire le déplacement. Omar Belhouchet, modérateur de la rencontre, a jugé utile de mettre l'accent, dans son allocution d'ouverture, sur le lien ombilical qui s'est noué entre ce forum et le public algérien : «Je me réjouis qu'il y ait du monde.» Et de souligner : «Nous avons décidé, à El Watan, de reprendre ces Débats à la demande pressante de nos lecteurs. A l'occasion du 50e anniversaire de l'Indépendance, nous avions organisé un colloque pour faire le bilan de ces cinquante ans. Après, nous avons marqué une pause. Beaucoup de lecteurs nous ont exhorté à reprendre ces débats. Le sondage que nous avons réalisé en juillet dernier a fait ressortir un besoin très fort de la part des lecteurs d'El Watan de renouer avec ce rendez-vous.» Revenant sur les péripéties de l'interdiction des Débats d'El Watan par la direction de l'OREF, M. Belhouchet explique : «La demande de location de la salle a été faite dans les délais. La salle a même été payée. Mercredi dernier, on a été obligés d'informer l'opinion publique de la volonté de certains responsables, à quelque niveau qu'ils soient, d'empêcher la tenue de cette rencontre.» Et de préciser : «El Watan organise ces débats dans un esprit académique, scientifique, en donnant la parole à des économistes, des sociologues, des politologues, des chercheurs de tout bord. On a réagi vigoureusement à l'acte d'interdiction. Il y a eu des réactions indignées, puis le communiqué de la tutelle qui a présenté ses excuses. Quelle est la part du vrai et du faux dans cette affaire ? On a pesé le pour et le contre, et vu l'assistance nombreuse, on se dit qu'on a bien fait de maintenir cette conférence. Je suis heureux qu'El Watan renoue avec son public. C'est un moment de joie après ce qu'on a vécu durant ces 48 heures. On a été soumis à une forte pression, on a résisté et votre soutien massif signifie très clairement aux autorités publiques : laissez les Algériens discuter des problèmes qui agitent la société, à défaut de participer à la décision.» Nous reviendrons par le menu, dans notre édition de demain, sur les interventions de nos trois conférenciers.