Quand l'art et l'architecture s'épousent, ils enfantent le «Cénacle».Un club scientifique installé à l'Institut d'architecture de l'université de Blida 1 (ex-Saâd Dahlab). En Algérie, le divorce entre l'art et l'architecture est une tendance lourde. El Watan étudiant s'est rendu sur place pour partager avec les étudiants, un événement nommé «Portes ouvertes sur l'art et l'architecture». C'est une démarche pour tenter de reconnecter les deux disciplines, au moins dans l'esprit des futurs architectes, expliquent les organisateurs. «Nous venons d'obtenir l'agrément de l'Institut pour le lancement du club. Et aujourd'hui, c'est la première activité que l'on organise», déclare Djallel, étudiant en architecture et président du Cénacle. En fait, «le département d'architecture vient aussi d'être promu en institut», ajoute la directrice de l'institut Mme Amina Fafou. Plusieurs bonnes nouvelles à la fois ! Un nouvel institut, un nouveau club scientifique, une activité et un nouveau souffle, car les membres du club sont déterminés à faire de l'institut un pôle doté d'un esprit architectural neuf, selon Djallel. Cénacle a choisi le chemin de l'art qui mène vers une architecture plus belle et plus moderne.Les «Portes ouvertes» ont eu lieu le 27 octobre dernier. C'est à cette occasion que le Cénacle a annoncé sa nouvelle naissance. Car le club existait avant mais sans argument. «Des artistes de renommée et aussi des étudiants amateurs ont répondu à notre invitation», affirme Mounaïm, étudiant en informatique et membre du club scientifique de son département. «Certains artistes étaient présents avec leurs œuvres, d'autres vont nous rejoindre au début de l'après-midi, mais leurs travaux sont déjà là», explique-t-il. Le président du club reprend le relais et nous invite à admirer les tableaux, les photos, les sculptures et autres caricatures exposés. à la recherche du beau «L'art est à l'architecture ce qu'est l'oxygène à la plante, indispensable, vitale même». C'est avec cette phrase que Djallel amorce la balade dans le hall réservé à l'événement. Cet espace aménagé artistiquement, exprime la tendance largement partagée par ces étudiants et leurs enseignants. «La préparation de ces portes ouvertes a nécessité plus d'une semaine de travail», explique Asma, membre du club, en nous montrant les décorations artistiques conçues, à l'image du logo du club qui nage au milieu d'une agglomération urbaine improvisée sur un muret du hall. On commence la tournée avec Djallel. Des caricatures d'Amine Labtar aux photos en 360° de Yacine Hamoudi, en passant par le patrimoine urbain et humain de l'Algérie, exprimés dans les tableaux de Hamza Nezzart et Mme Mimouni. Djallel et ses camardes essayent d' «injecter» l'art dans l'architecture. «Equinox est un club professionnel de la photo, il est également présent», poursuit notre guide, en nous montrons une série de photos, et d'ajouter «Cette après-midi, un workshop sur la photo avec Mestapha Sellali membre du club (Equinox) est programmé pour les étudiants». Un autre atelier de dessin et de documentaires d'architecture sont aussi au menu, poursuit-t-il. Notre interlocuteur, qui conjugue l'art avec tous les mots, n'a pas oublié d'inviter les étudiants talentueux, ni de nous les présenter avec leurs œuvres. étudiants «artistes» «Il est l'un des photographes les plus prometteurs», c'est ainsi que Djallel présente Nadjib, un étudiant en 5e année architecture et membre du club. Il expose une dizaine de photos. L'une d'elles est tellement exceptionnelle que «sa beauté a dépassé les frontières de l'Algérie», s'enorgueillit Djallel, avant de laisser Nadjib expliquer la raison du succès. «Cette photo, immortalisant le chemin de fer de Bab Ezzouar dans un brouillard d'hiver, flanqué d'un parapluie au milieu, a été classé 7e sur 900 photos lors d'un concours européen», lance Nadjib. «Ce concours a été organisé en France, par ‘'la plus belle photo en Europe''. Un groupe de 5 jurés de photographes professionnels spécialisés dans la photo conceptuelles a jugé de la qualité des œuvres», explique-t-il. Djallel le président et également sculpteur. Il fait partie lui aussi des «artistes» exposants, «C'est la première sculpture que j'ai faite, elle est ma première œuvre», dit-t-il fièrement en l'exhibant. «C'est dans le même esprit : art et architecture», précise-t-il. Sans perdre de vue, ni l'esprit du club ni celui de l'événement, il atteste encore «ces deux notions sont un seul corps, elles ont une seule âme». Djallel nous a accompagné jusqu' a la sortie de l'université. On quitte l'évènement. En cours de route, il continue tout de même de nous expliquer sa conception de l'architecture. «Je vois mal un saut qualitatif de cette dernière en Algérie, sans la touche artistique. C'est pour cela que je souhaite une longue vie à cette aventure, le Cénacle», conclut-il. La rupture entre l'art et l'architecture en Algérie étant déjà abondamment consommée, la mission des «Cénaclers» s'avère difficile. D'une lucidité rare, ils misent d'abord sur le changement des mentalités des futurs architectes. Leur détermination est tellement forte qu'ils ne laissent aucun «droit de cité» au pessimisme.