Depuis la mise en route du nouveau système de paiement électronique de masse, la clientèle des banques est devenue sensible à la tarification des services bancaires comme si l'activité des banques était comprise jusque-là comme une activité de service public et les clients comme des usagers. Il est vrai que les commissions et autres tarifs facturés par les banques à l'occasion des services offerts (remise de chèque, encaissement, virement, gestion de compte...) lorsqu'ils sont payables expriment juste ce qu'il faut, loin de tout calcul de rentabilité. Les contreparties sont ainsi quelque peu équilibrées puisque les dépôts à vue ne sont pas rémunérés et la délivrance de chéquiers non plus d'ailleurs. Cette situation a conduit pendant longtemps la clientèle à considérer les banques comme des fournisseurs de services gratuits. Le nouveau système de paiement a généré des coûts pour les banques en termes d'investissements et en termes d'exploitation, il est tout à fait indiqué dans cette configuration que la clientèle participe aux frais de fonctionnement de ce système qui procure la rapidité et la sécurité. Seulement voilà, l'autre question sous-jacente est celle qui consiste à se demander si les banques sont libres de fixer les prix qu'elles décident d'autorité de fixer sans protection pour la clientèle, en d'autres termes, est-ce que la tarification bancaire bénéficie tout comme pour les autres biens et services, d'un régime de liberté ? Le principe général de la liberté des prix a été consacré par plusieurs textes en Algérie depuis la libéralisation de l'économie à partir de 1990. Le dernier texte en date qui inscrit ce principe sur le fronton de la République est l'ordonnance 03-03 du 19 juillet 2003 relative à la concurrence qui dispose en son article 4 que " les prix des biens et des services sont librement déterminés par le jeu de la concurrence... " Cette disposition est véritablement révolutionnaire dans un pays comme l'Algérie dans la mesure où elle marque un rupture avec le régime des prix administrés et des blocages qui prévalaient depuis l'indépendance. Cependant la question qui se pose et qui se posera certainement toujours tant qu'une jurisprudence en la matière ne vienne pas clarifier les positions, est celle de savoir si cette disposition relative à la liberté des prix des biens et des services s'applique aux banques et établissements financiers et même aux compagnies d'assurances. La réponse de notre point de vue est non dans la mesure où elle ne s'applique pas directement aux opérations de banque et aux opérations connexes mêmes si les activités bancaires sont rangées dans les services. Les banques et les établissements financiers sont régis par une autre législation tout aussi libérale qui est l'ordonnance 03-11 du 23 août 2003 relative à la monnaie et au crédit. A ce titre, la loi confie au Conseil de la monnaie et du crédit qui est l'autorité monétaire, l'obligation d'établir la réglementation concernant " la protection de la clientèle des banques et des établissements financiers, notamment en matière d'opérations avec cette clientèle. " Cette réglementation a été déclinée en 1994 par un règlement de la Banque d'Algérie pris en application de l'article 44 de l'ex-loi monnaie et crédit. Elle consacre la liberté de fixation par les banques et les établissements financiers des taux d'intérêt créditeurs et débiteurs ainsi que les taux et niveau de commissions applicables aux opérations de banque. Cependant cette liberté n'est pas absolue puisqu'il est également écrit que la Banque d'Algérie peut, toutefois, fixer une marge maximale à respecter par les banques et établissements financiers pour les opérations de crédit. La réglementation va encore plus loin en obligeant les banques et les établissements financiers à porter à la connaissance de la clientèle et du public les conditions de banque, c'est-à-dire les tarifs des services bancaires pour les opérations qu'ils effectuent. Cette obligation est généralement respectée par les banques et les établissements financiers qui mettent à la disposition de la clientèle soit par voie d'affichage soit par prospectus en quantité industrielle ces conditions de banque. On le voit, le régime de fixation des prix des services bancaires est libre mais il reste encadré pour éviter les abus. Rien n'interdit à un client lorsqu'il estime que le prix facturé est excessif ou qu'il ne représente pas la contrepartie du service rendu de saisir la justice pour contester le tarif en cause. Le meilleur rempart dans ce domaine comme dans les autres domaines est d'instituer un comité des usagers qui pourrait donner son point de vue sur les niveaux de prix bancaires et éviter ainsi tout dérapage qui irait à l'encontre d'une bancarisation de la population et la couverture des services bancaires de base qu'il va falloir définir et encadrer sérieusement dans la perspective du surendettement qui guette la population friande de crédits à la consommation.