A peine annoncé, le projet de construction d'un CHU dans la ville des Ponts est déjà perçu comme une panacée censée alléger le fardeau du centre hospitalier universitaire Benbadis, actuellement saturé, suranné et insalubre. La structure actuelle, construite au début de la colonisation française, était en fait un couvent, avant de subir des extensions pour être transformée en hôpital militaire. Ce dernier sera par la suite affecté aux civils en 1950, avant de devenir un Centre hospitalier régional en 1960. Et ce n'est qu'en 1986 qu'il bénéficiera de l'appellation Centre hospitalier universitaire Dr Benbadis de Constantine. Et le moins que l'on puisse dire de ce CHU, c'est qu'il est non seulement vétuste, mais aussi grandement malade, rongé par la saleté et son corollaire, la déliquescence. Or, un CHU a pour mission d'offrir une prise en charge et des soins de très haut niveau, hautement spécialisés et cela 24h/24, de même que c'est une infrastructure censée représenter un pôle de référence autour duquel s'organise l'offre de soins. Malheureusement, au CHUC, l'offre n'est pas toujours qualitativement irréprochable. Et c'est vraisemblablement dans le cadre d'une nouvelle stratégie de modernisation du secteur et de la mise en place des outils nécessaires que s'inscrit, a priori, la réalisation de cinq nouveaux CHU au centre, à l'ouest, à l'est et au sud du pays. A Constantine, en tout cas, le choix du terrain a d'ores et déjà été opéré. Selon M. Kaki, l'intérimaire du directeur de la santé de la wilaya, le nouveau CHU sera domicilié au niveau de la nouvelle ville Ali Mendjli, actuel réceptacle de toutes les nouvelles réalisations, et sera érigé sur une superficie de 25 hectares au lieu des 15 retenus initialement. «Cette infrastructure, d'une capacité de 600 lits, sera située dans la nouvelle ville d'Ali Mendjli, en dehors du périmètre urbain, mais sera très accessible. Au départ, une assiette de 15 hectares avait été retenue, puis finalement le choix des responsables s'est porté sur un terrain plus grand, de l'ordre de 25 hectares», précisera à ce sujet M. Kaki dans une déclaration faite à El Watan. Il n'a, toutefois, pas été en mesure d'avancer le montant alloué à ce projet d'envergure ni la durée des travaux. Des insuffisances à rectifier Acculé depuis des années par un afflux incessant de patients originaires des wilayas limitrophes, le CHUC n'arrive plus à assurer des soins de haute facture. Les malades sont mal accueillis, ballottés d'un service à l'autre avant de dénicher un lit aux draps douteux et dont le matelas dégage des odeurs fétides. Les conclusions de la commission d'évaluation et de diagnostic des structures de santé dépêchée par le ministère de la Santé à la fin du moins de septembre dans plusieurs wilayas du pays, dont Constantine, sont d'ailleurs loin d'être encourageantes. «Des insuffisances ont été relevées, notamment en matière d'hygiène, d'accueil des malades, mais aussi concernant la tenue du personnel. Nous avons reçu des instructions à ce sujet pour améliorer la prise en charge du malade. Ce sera désormais notre cheval de bataille», affirme notre interlocuteur. Ainsi, chaque dimanche, des réunions de coordination seront organisées entre le directeur de la santé de Constantine et les chefs d'établissement de toutes les structures sanitaires existantes au sujet de l'application stricte des directives de la commission ministérielle. De l'avis du directeur de la santé par intérim, les structures sanitaires de Constantine ont juste besoin d'une bonne réorganisation et d'un renforcement de personnel, ajoutant à ce titre que «notre wilaya se suffirait largement à elle-même si elle ne devait pas prendre en charge les malades issus des villes voisines». Notre interlocuteur préconise à cet effet une «hiérarchisation des soins». En clair, il faudrait amener les malades à se diriger d'abord vers les polycliniques, et les hôpitaux de daïra en second lieu, laissant le CHU Benbadis comme dernier recours. Le nouveau CHU risque-t-il d'être asphyxié à son tour ? M. Kaki affiche plutôt un certain optimiste à ce sujet puisqu'il estime que «le flux de patients sera canalisé». Les responsables du secteur de la santé espèrent par ailleurs que cette nouvelle infrastructure permettra d'alléger la pression exercée sur le CHU Benbadis. Ils ambitionnent également de faire bientôt tourner à plein régime l'ex-hôpital militaire de Didouche Mourad. Une énième reconversion pour le CHUC ? Actuellement en pleine rénovation, cet hôpital, d'une capacité de 240 lits, a été doté du statut d'Etablissement hospitalier, un E.H, l'unique structure bénéficiant de ce statut à Constantine. En cours de réhabilitation depuis qu'il a été libéré par les militaires durant l'été 2010, le désormais hôpital civil de Didouche Mourad, situé dans la commune éponyme, n'assure actuellement que les consultations et les urgences. Cela, en attendant que la réfection des services, la rénovation des blocs opératoires et l'installation des équipements neufs soient achevées. Faisant pâle figure actuellement, celui de Benbadis va lui aussi bénéficier prochainement d'une opération de réhabilitation pour tenter de remettre à niveau ses services dont la majorité ont besoin d'une réelle «cure de rajeunissement». Cet ancien couvent, reconverti en hôpital militaire, puis en CHU, sera-t-il gratifié d'un nouveau statut, après la mise en service du nouveau centre hospitalier universitaire implanté à Ali Mendjli ? S'étendant sur une superficie de 13 hectares, l'hôpital civil de Didouche Mourad était également pressenti pour devenir, une fois cédé par les militaires, un… centre hospitalier universitaire, ou plus exactement une annexe du CHU Benbadis ! En somme, l'on a failli revivre une fois de plus, à Constantine, une réédition de l'Histoire, en se retrouvant singulièrement avec deux CHU, ayant antérieurement appartenu aux militaires ! M. Kaki soutient, quant à lui, qu'aucun changement de statut du CHU Benbadis n'est envisagé, «il restera comme tel, un Centre hospitalier universitaire», assure-t-il. Mais il ne peut y avoir qu'un seul CHU par ville, ce qui laisse supposer que celui de Benbadis pourrait donc être «sacrifié» sur l'autel des nouvelles exigences de l'heure en matière d'amélioration de la qualité des soins, lesquels seront assurés par une infrastructure créée avec le carnet de naissance d'un vrai CHU.