Les entreprises nationales ayant pris part à la 22e foire de la production nationale n'ont globalement pas présenté de nouveaux concepts dans le processus de fabrication, comme c'est le cas à chaque édition. L'innovation a en effet brillé par son absence au cours de cette manifestation. Pourquoi ce manque d'innovation chez les entreprises algériennes ? Nadia Chettab, professeure et chercheure agréée au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (CREAD), estime que la défaillance du système productif algérien en termes d'innovation et de compétitivité s'explique par la structuration même du cadre de fonctionnement de l'économie nationale. Comment ? Pour Mme Chettab, «la tergiversation des politiques publiques quant à l'adoption d'une stratégie de relance industrielle, le retard dans la création d'un système d'innovation, la désarticulation qui en ont résulté dans l'espace industriel entre l'action étatique et le développement scientifique et technique ont entraîné des effets contradictoires.» Ce qui a influé, selon cette experte, «négativement sur la structure industrielle algérienne engendrant ainsi des ‘‘défaillances systémiques''. Lesquelles ont laissé la place au jeu désordonné d'acteurs économiques et à une carence de transformation des avancées scientifiques en richesses économiques et sociales.» Si le ministère de l'Industrie dit avoir les moyens à mettre en œuvre pour rendre les entreprises compétitives sur les marchés national et international, Nadia Chettab rappelle toutefois que pour la mise en œuvre de cette stratégie, «il ne faut pas que l'histoire se répète.»Pourquoi ? Parce que, explique-t-elle, «l'Algérie a déjà opté pour des stratégies clés en main et des transferts technologiques qui l'ont privée de l'appropriation technologique.» «Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que l'ouverture économique, à travers la libre circulation des biens et des capitaux, ne garantit pas la diffusion technologique, mais ouvre seulement une opportunité à la réalisation du processus de diffusion», explique t-elle encore avant de relever que la complexité de ce processus appelle à la mise en place d'un cadre formel permettant de relier de façon cohérente les différents niveaux du processus de diffusion ainsi que des schémas et des programmes d'incitation à l'innovation et au transfert de technologies. Ce qui est connu sous le nom du Système national d'innovation (SNI). Citant des exemples à l'échelle internationale et régionale (Tunisie, Malaisie…), des pays se sont lancés dans des politiques industrielles et ont mis en place des formes d'organisation industrielle incitant leurs entreprises à passer à un stade d'innovation, Mme Chettab a tenu à préciser que la compétitivité «n'est plus liée à l'effort d'investissement matériel.» Mais «se détermine surtout par les technologies utilisées et l'innovation produite». Et ce, moment où les pouvoirs publics ne ratent pas les occasions pour rappeler les montants dégagés pour développer la recherche dans tel ou tel secteur. Or, l'Algérie a accumulé beaucoup de retard dans ce domaine. D'où l'urgence, selon non interlocutrice, «d'une prise en compte rapide et sérieuse de l'industrie et de son redéploiement spatial, de la suppression des contraintes dans l'environnement des affaires et de la création d'externalités positives induites par des politiques publiques appropriées.» En résumé, passer à «la mise à niveau de l'économie nationale aux normes internationales en vigueur». Et de construire en parallèle des avantages concurrentiels pour donner aux entreprises nationales les opportunités de mettre en place des stratégies offensives et d'aller à la compétitivité et l'innovation.