Après la publication relative aux dispositions de fiscalité directe(1), cette analyse commente les dispositions de la loi de finances pour 2014, publiée au journal officiel n° 68 du 31 décembre 2013, en matière de taxes sur le chiffre d'affaires. Bijoux de luxe et TVA L'article 8 du Code des Taxes sur le Chiffre d'Affaires est modifié pour inclure les bijoux de luxe importés dans le champ de la Taxe sur la Valeur Ajoutée au taux normal. L'exonération de la TVA pour les ouvrages d'or, d'argent et de platine soumis au droit de garantie demeure avec l'exclusion expressément énoncée des bijoux de luxe tels que définis à l'article 359 du code des impôts indirects. Dans la foulée, l'article 359 du code des impôts indirects, originellement conçu pour traiter des obligations des fabricants et marchands de métaux précieux, est amendé pour préciser que les bijoux de luxe sont les ouvrages d'or, d'argent et de platine dont le prix déclaré auprès de la douane est égal au moins à 2,5 fois le prix appliqué sur le marché intérieur durant le semestre précédent. Voici une disposition qui n'ignore pas l'appréciation de la valeur de ces produits et qui renvoie à la décision du directeur général des impôts pour définir les règles de fixation des prix applicables durant cette période. L'article 359 du code des impôts indirects est par la même occasion modifié pour réserver l'importation d'or, d'argent, de bijoux de luxe eux-mêmes définis comme ouvrages d'or, d'argent et de platine bruts, mi-ouvrés ou ouvrés, qu'aux seules personnes morales ayant au minimum un capital social de 200 millions de dinars. Pour ces mêmes personnes, l'importation des ouvrages ouvrés finis ne peut concerner que les bijoux de luxe. Permutations et extension d'exonération L'article 11 du Code des Taxes sur le Chiffre d'Affaires est modifié pour intégrer au titre des exonérations les navires destinés aux compagnies de navigation maritime ; l'ancienne rédaction ne prévoyait que les acquisitions d'aéronefs destinés aux compagnies de navigation aérienne. A l'inverse, on relèvera l'application du taux normal de 17% aux articles et produits bruts ou fabriqués, utilisés à la construction, au gréement, à l'armement, à la réparation ou à la transformation des navires de mer alors que paradoxalement, parmi les opérations déjà soumises aux taux réduit de 7%, citées à l'article 23, figurent encore celles effectuées par les chantiers de construction maritime et aérienne. L'intégration de produits nationaux, pour ces activités, n'est pas encouragée comme pour les travaux et prestations associées, alors que l'encouragement de la production locale est affiché comme levier d'incitation-clé pour cette loi de finances pour 2014. Une précision salutaire, qui ne sert plus la confusion qui prévalait dans l'ancienne rédaction de l'article 23 du Code des Taxes sur le Chiffre d'Affaires, est apportée sous son quatorzième paragraphe, lequel permettait l'application du taux réduit de TVA aux commissionnaires et courtiers. La loi de finances pour 2014 modifie ce paragraphe en précisant que le taux de 7% s'applique désormais aux commissionnaires et courtiers dont l'activité est fixée par voie réglementaire. C'est là une disposition sans équivoque puisque l'avantage du taux réduit ne concerne dorénavant que les activités déployées dans le cadre d'un agrément, comme celles des courtiers immobiliers ou courtiers d'assurances ou encore celles des commissionnaires en douanes ; le taux réduit de TVA ne bénéficiera donc plus aux services fournis dans le cadre d'intermédiations non réglementées. Citons enfin l'élargissement du taux réduit, sous un vingt-septième et nouveau paragraphe, aux livres édités et diffusés en version numérique. Il reste cependant que cette mesure ne pourra atteindre son plein objectif que lorsque les paiements en ligne seront accessibles à large échelle. Allègement de procédure La loi de finances pour 2014 modifie à nouveau l'article 29 du Code de Taxes sur le Chiffre d'Affaires pour retirer la disposition qui faisait obligation aux redevables de la TVA de présenter un état, y compris sur support informatique, comportant les références de chaque fournisseur, y compris le numéro d'identifiant fiscal, les nom et prénom (s) ou raison sociale, l'adresse, le numéro d'inscription au registre de commerce, la date et la référence de la facture, le montant des achats effectués ou des prestations reçues ainsi que le montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée. Cette simplification de procédure ne devrait pas faire perdre de vue aux redevables de la TVA l'utilité d'un tel état, en procédure interne de gestion et de suivi des récupérations de TVA, qui reste pratique pour retracer l'historique des déductions de TVA, la nouvelle mesure n'étant que dans la suppression de la présentation de l'état des déductions au receveur des impôts. Il faut également rappeler que les dispositions de l'article 76 du Code des Taxes sur le Chiffre d'Affaires demeurent en vigueur et que les redevables de la TVA sont tenus de remettre à l'appui de leur déclaration le relevé du chiffre d'affaires imposable. Le spectre du régime d'achat en franchise de TVA Un spectre plus restreint dans la portée de l'achat en franchise de TVA résulte de la suppression pure et simple du troisième paragraphe de l'article 42 qui prévoyait au rang des activités éligibles au régime de l'achat en franchise, les achats de matières premières, de composants ou d'emballages spécifiques, servant à la production, au conditionnement ou à la présentation commerciale des produits expressément exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée, ou destinés a un secteur exonéré de la taxe. L'achat en franchise est une procédure d'exception codifiée sous le Code des Taxes sur le Chiffre d'Affaires, qui permet à des redevables de la TVA de ne pas faire l'avance de trésorerie, par le fait de ne pas décaisser de la TVA en amont lorsque l'opération de vente des biens ou services concernés par l'achat est elle-même exonérée de TVA. Si la nouvelle mesure allégera les procédures de l'administration en réduisant le nombre de contingents annuels d'achats en franchise mais surtout leur gestion (cette dernière implique des attestations d'achats en franchise signés par l'administration fiscale, au cas par cas), les redevables de cette catégorie d'opérations seront rendus à l'application des dispositions des articles 50 à 50 quater pour obtenir le remboursement de la TVA. Il est utile de rappeler que le suivi en quasi temps réel des achats en franchise par l'administration résulte de l'application de l'article 47 du Code des Taxes sur le Chiffre d'Affaires qui précise que les achats en franchise de TVA sont effectués sur remise par le bénéficiaire au vendeur ou au service des douanes, d'une attestation visée par le service des impôts comportant engagement de paiement de l'impôt au cas ou les produits ne recevraient pas la destination ayant motivé la franchise. La solution la plus simple pour l'allègement de la charge de travail de l'administration aurait été de permettre l'achat en franchise sur une base déclarative des acheteurs, mais une telle procédure requiert une confiance et une organisation adéquate pour contrer la fraude à la TVA. Il faut préciser que l'achat en franchise de TVA reste applicable pour : • les biens et services ainsi que les travaux liés aux activités du secteur des hydrocarbures ; • les achats ou importations de marchandises, réalisés par les exportateurs ; • les entreprises étrangères sans installation professionnelle permanente en Algérie dont le cocontractant bénéficie de l'exonération de la taxe ; • les acquisitions des biens d'équipement et services fabriqués et rendus localement et entrant directement dans la réalisation de l'investissement de création ou d'extension lorsqu'elles sont effectuées par les entreprises exerçant des activités réalisées par les jeunes promoteurs éligibles au «Fonds National de Soutien à l'Emploi des Jeunes» ou au «Fonds National de Soutien au Micro-crédit» ou à «la Caisse Nationale d'Assurance Chômage». Pour cette dernière catégorie de bénéficiaires, la loi de finances pour 2014 aura restreint l'avantage de l'achat en franchise aux biens et services fabriqués ou rendus en Algérie. Il reste à voir si ce dispositif stimulera la production nationale. Il n'est d'ailleurs pas fortuit que les dispositions non fiscales de la loi de finances pour 2014 requièrent que les avantages fiscaux accordés aux promoteurs d'investissements, dans le cadre du dispositif d'aide à l'investissement et du dispositif d'aide à l'emploi, soient consentis au prorata du taux d'intégration des produits fabriqués localement. Il faut espérer que les modalités d'application de cette disposition correspondront à des moyens d'appréciation réalistes et facilement quantifiables. (A suivre) (1)Notre édition du 6 janvier 2014.